Marie-Christine Varone

L'Evangile de dimanche: Tout se joue dans le coeur

Mc 7,1-8.14-15.21-23

Pharisiens et scribes contestent (1-5)

Ce n’est pas la première fois que scribes et Pharisiens (venus de Jérusalem – le lieu de l’orthodoxie juive – en Galilée) contestent des actions de Jésus ou de ses disciples (cf.2,1-3,6). Ici c’est le comportement de ces derniers qui heurte les représentants de l’observance; ces disciples ne se plient pas aux règles de pureté rituelle, mangeant sans avoir purifié leurs mains. C’est à leur maître, Jésus, que la question – reproche est posée: «pourquoi tes disciples ne marchent-ils pas selon la tradition des anciens?»

 Jésus répond (6-8)

En recourant à l’Ecriture (Is 29,13), Jésus applique le texte à ses interlocuteurs «vous«, qu’il traite d’hypocrites, c’est-à-dire de gens cherchant à faire illusion. Dans le passage d’Isaïe cité, c’est Dieu lui-même qui reproche à son peuple un culte vain, car il y a distorsion entre les lèvres (ce qui est extérieur) qui honorent et le coeur (ce qui est intérieur) qui est éloigné de lui; quant à l’enseignement, il porte sur des préceptes d’hommes et non sur sa Parole.

C’est aussi ce que font les interlocuteurs de Jésus en laissant de côté l’enseignement fondamental (le commandement) pour tenir (probablement avec une idée de crispation) la tradition des hommes

En apparence Jésus ne répond pas au pourquoi des Pharisiens et scribes. En fait il va à la racine du comportement de l’homme vis-à-vis de Dieu et de sa Parole. Le coeur est-il réellement engagé? Est-ce la Parole qui est «lumière pour la route» ou les traditions humaines?

Déclaration à la foule (14-15)

Jésus appelle à lui (ce n’est jamais banal) les foules: «écoutez-moi tous et comprenez». La déclaration va être capitale; il s’agira de l’accueillir avec tout ce qu’elle comporte de nouveauté, voire de renversement de la tradition. Jésus affirme que rien d’extérieur à l’homme n’est impur. Il n’y a donc plus rien de suspect ou de tabou et encore moins d’impur dans la création (ni animal, ni cadavre, ni aucun aliment, ni aucune partie du corps de l’homme).

Néanmoins déclare Jésus: l’impureté demeure, mais elle a sa source en l’homme. Cette déclaration, assez énigmatique, et le renversement de vision qu’elle appelle sont difficiles à admettre pour ses auditeurs.

Enseignement aux disciples (21-23)

Vient le temps des éclaircissements. Le «dedans de l’homme» (qui peut être source d’impureté) correspond au coeur de l’humain. Or le coeur, dans la Bible, n’est pas tant le siège de l’affectivité comme c’est le cas dans notre civilisation. Il est le centre de la personne, ce qui lui est le plus personnel, le lieu des choix et des décisions (donc assez proche de la volonté), le «sanctuaire de la liberté». Dès lors on saisit l’importance de ce qui s’y passe. Le coeur peut opter pour l’amour et le service (de Dieu comme du frère). Il est alors le lieu d’une belle fidélité créatrice; mais le coeur peut aussi nourrir de mauvais desseins (21), des choses mauvaises ou méchantes (23) comme celles qui sont nommées (cf. la liste des vv.21-22) et qui vont à l’encontre du respect de soi et du frère. De telles actions ou attitudes, qui sortent du dedans, donc du coeur, rendent l’homme impur.

La seule impureté qui subsiste donc après le Christ est celle dont l’homme se rend coupable en étant infidèle à sa vocation.

Libération et exigence

Grâce à l’enseignement de Jésus nous savons désormais que toute la création est bonne et que rien n’est à suspecter ou rejeter, mais aussi qu’il convient de veiller sur notre coeur, puisqu’il est le lieu de nos options et de nos décisions…


Évangile de Jésus Christ selon saint Marc

En ce temps-là, les pharisiens et quelques scribes, venus de Jérusalem, se réunissent auprès de Jésus,
et voient quelques-uns de ses disciples prendre leur repas avec des mains impures, c’est-à-dire non lavées.
– Les pharisiens en effet, comme tous les Juifs, se lavent toujours soigneusement les mains avant de manger, par attachement à la tradition des anciens ;
et au retour du marché, ils ne mangent pas avant de s’être aspergés d’eau, et ils sont attachés encore par tradition à beaucoup d’autres pratiques : lavage de coupes, de carafes et de plats.
Alors les pharisiens et les scribes demandèrent à Jésus : « Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ? Ils prennent leurs repas avec des mains impures. »
Jésus leur répondit : « Isaïe a bien prophétisé à votre sujet, hypocrites, ainsi qu’il est écrit : Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi.
C’est en vain qu’ils me rendent un culte ; les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains.
Vous aussi, vous laissez de côté le commandement de Dieu, pour vous attacher à la tradition des hommes. »
Appelant de nouveau la foule, il lui disait : « Écoutez-moi tous, et comprenez bien.
Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui rend l’homme impur. »
Car c’est du dedans, du cœur de l’homme, que sortent les pensées perverses : inconduites, vols, meurtres,
adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure.
Tout ce mal vient du dedans, et rend l’homme impur. »

 

Georges Rouault: «Les disicples de Jésus»
28 août 2015 | 18:00
par Marie-Christine Varone
Temps de lecture: env. 4 min.
Disciples (6), loi (43), Pharisiens (5), Scribes (1)
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