Série Apic : Lieux de pèlerinage moins connus de Suisse (9)

Maria-Rickenbach, une oasis de silence au-dessus de la grisaille

Niederrickenbach, 3 juillet 2013 (Apic) «Je suis tellement attaché à cet endroit que je ne vais plus le quitter», affirme l’abbé Albert Fuchs, 76 ans, chapelain depuis presque 10 ans de Maria- Rickenbach, dans le canton de Nidwald, et de ses 50 âmes. Ici, depuis plus de 480 ans, d’innombrables pèlerins ont cherché consolation et puisé confiance pour leur vie dans la prière auprès de «Notre-Dame dans l’érable». Ici: au-dessus de la grisaille du quotidien, sur une terrasse ensoleillée surplombant la vallée d’Engelberg, atteignable à pieds ou en téléphérique.

C’est un «lieu de force et de silence», promet le dépliant publicitaire. Les voitures restent en bas dans la vallée, on y laisse aussi les préoccupations du quotidien. Après huit minutes de téléphérique depuis Dallenwil, près de Stans, on atteint Maria-Rickenbach (nom officiel: Niederrickenbach), située à 1’200 mètres d’altitude. Lorsque le fond de la vallée est couvert de brouillard, le soleil brille plus souvent qu’à son tour dans cette station de montagne. Maria-Rickenbach est également le point de départ de très nombreuses promenades et excursions en montagne.

Albert Fuchs attend le visiteur devant chez lui, tout en arrachant les mauvaises herbes de son jardin. Dans l’hôtel «Pilgerhaus», juste à côté, il parle devant un café de son intense relation avec cet endroit. Pendant 24 ans, il a été curé de Stans, la capitale du canton de Nidwald, dans la vallée. Durant cette période, il lui est souvent arrivé de confier des «choses difficiles» là-bas en haut, à Maria-Rickenbach. De cet endroit émane effectivement une grande force. Cela lui semble encore plus clair lorsqu’il entend de ces nombreuses personnes avec lesquelles il correspond qu’elles ont reçu à Maria-Rickenbach courage, espérance et confiance, affirme Albert Fuchs, prêtre depuis 52 ans.

Une statue sauvée de la Réforme iconoclaste

La légende sur la fondation du lieu de pèlerinage parle d’un jeune Nidwaldien qui, au temps de la Réforme, en 1528, travaillait comme pâtre dans le Haslital bernois et a sauvé une statue de la Vierge menacée de destruction par les troupes bernoises. Il s’enfuit alors dans sa région en emportant la statue. Il la plaça dans le creux d’un vieil érable, là où se trouve aujourd’hui le maître-autel de la chapelle du lieu de pèlerinage.

En automne, au moment de retourner dans la vallée, il voulut emporter la statue. Mais la sainte image résista à ses efforts pour rester fixée à l’érable. Le pâtre en fit le récit au curé de Stans. Une foule de prêtres et de laïcs se rendit alors au lieu indiqué pour vérifier le fait. Bientôt il ne fut plus question dans tout le pays que de la merveilleuse image de Marie à Rickenbach. Et lorsque l’érable qui la retenait vint à périr, il fut remplacé par une niche en pierre. Le lieu attira toujours davantage de visiteurs et, en 1569, fut construit une auberge. En 1593 apparut la première chapelle, remplacée en 1691 par une plus grande. Au19e siècle, Maria-Rickenbach attirait toujours davantage de pèlerins. En 1848, le chapelain de l’époque estimait leur nombre à 15’000 par an. La troisième et dernière chapelle fut construite et consacrée en 1869.

Les premières bénédictines étaient arrivées à Maria-Rickenbach quelques années auparavant, en 1857. Elles se sont surtout consacrées à l’adoration perpétuelle. Aujourd’hui, leur communauté compte 14 religieuses, dont une majorité âgées de nettement plus de 60 ans.

Près de 300 ex-voto

Les quelque 300 tablettes hautes en couleurs assemblées dans la chapelle forment dans leur grande diversité un des plus grands et des plus beaux ensembles d’anciens ex-voto en Suisse. Ils expriment la reconnaissance de nombreux croyants qui sont sortis de leur situation de détresse grâce à l’intervention de Dieu, par l’intermédiaire de la Vierge Marie. Les ex-voto sont également destinés à renforcer la confiance des autres pèlerins en la force divine. Les plus anciens, qui remontent jusqu’en 1650, sont des témoins de l’art pictural populaire de leur l’époque.

Nos contemporains, qui disposent de tant de possibilités dans les domaines de l’accompagnement et de l’aide, peuvent à peine imaginer combien les hommes étaient nécessiteux et démunis il y a 100 ans, écrit Lothar Emanuel Kaiser, auteur du guide «Niederrickenbach / Maria-Rickenbach». Que peut faire un petit paysan avec ses 12 enfants, lorsque son unique vache devient gravement malade? Le chapelain Albert Fuchs montre un ex-voto qui le touche plus particulièrement. Il raconte en quelques mots simples une histoire de confiance en Dieu: «En 1860, la seule vache du père de famille Franz Hurni à Schüpfheim tombe malade, la prière de la famille a été exaucée, elle a remercié Dieu et Marie».

Avoir des idées et se battre pour les réaliser

Qu’il faille se battre avec énergie afin de pouvoir développer des projets en cette période de changements, Albert Fuchs ne le sait que trop bien en tant que vice-président de la Fondation pour la chapelle de Maria-Rickenbach: «Ici, il faut avoir des idées. Et on doit toujours se battre un peu, sans pour autant contrarier personne».

Il est vrai que le flot des visiteurs n’a que peu diminué durant la saison des pèlerinages, de mai à octobre. Ainsi, chaque paroisse du canton de Nidwald organise traditionnellement un pèlerinage par année à Maria-Rickenbach. Et d’autres groupes de pèlerins, parfois même plus grands, proviennent d’autres régions de Suisse. Mais pour que cela fonctionne, il faut aussi s’en occuper et nouer les contacts nécessaires.

L’hôtel «Pilgerhaus», propriété de la Fondation de la chapelle, a été rénové il y a deux ans pour un montant de 800’000 francs. Il est aussi utilisé pour des repas de mariage et d’autres fêtes. La rénovation du téléphérique en 2008 a coûté 5,6 millions de francs à la Fondation, qui en est propriétaire. Elle a bénéficié d’un prêt sans intérêts de 4 millions, remboursable en 20 ans. Et il a fallu trouver 350’000 francs auprès de donateurs pour la rénovation de l’orgue de l’église.

Et ce n’est pas tout: Après négociations avec la direction des chemins de fer régionaux et la remise d’une pétition munie de 8’800 signatures, il a été possible de sauver jusqu’en 2019 l’»arrêt sur demande» de Niederrickenbach, sur la ligne Lucerne – Engelberg, souligne le chapelain. Pour lui, il est clair que le lieu de pèlerinage ne pourra subsister que s’il continue à rester attractif et facilement accessible pour les pèlerins, les promeneurs et autres visiteurs.

Encadré 1:

Un chapelain surdoué pour les langues

De 1841 jusqu’à sa mort en 1866, l’abbé Jakob Joseph Mathis a été chapelain de Maria-Rickenbach. C’était un homme un peu hors du monde, qui avait de la difficulté à trouver les paroles pastorales qui conviennent avec les pèlerins, affirme le guide du lieu de pèlerinage. Par contre, il était surdoué pour les langues. Alors qu’il n’avait fréquenté l’école élémentaire que durant 30 jours, il a appris de nombreuses langues en autodidacte, à raison de deux ou trois par année. Selon certains spécialistes, vers la fin de sa vie il possédait parfaitement une vingtaine de langues. L’abbé Mathis a notamment publié un dictionnaire et un traité de grammaire de dialecte nidwaldien.

Encadré 2:

Indications pratiques

Le lieu de pèlerinage de Maria-Rickenbach est accessible par téléphérique. La ligne de chemins de fer Lucerne – Engelberg a un arrêt sur demande appelé «Niederrickenbach», juste après la gare de Dallenwil, en dessous de la station de base du téléphérique. On y trouve également un grand parking.

Site internet: www.maria-rickenbach.ch

Encadré 3:

Série Apic: Lieux de pèlerinage moins connus de Suisse

A côté d’Einsiedeln ou du Ranft, de nombreux lieux de pèlerinage moins emblématiques attirent de nombreux visiteurs en Suisse. Ils sont connus dans leur région, mais souvent très peu au-delà des frontières cantonales. L’agence Apic en présente 13 dans une série consacrée aux «Lieux de pèlerinage moins connus de Suisse».

Déjà parus: La Collégiale Ste-Vérène à Zurzach (AG), la Basilique Notre-Dame de Genève, la Grotte de Sainte-Colombe à Undervelier (JU), Notre-Dame de Fatima à Ponthaux (FR), Notre-Dame de l’Epine à Berlens (FR), le pèlerinage d’Heiligkreuz (LU), Notre-Dame de Lourdes à Zurich-Seebach (ZH), l’ermitage de Longeborgne (VS) et Maria Rickenbach (NW).

A paraître: Zitail (GR), Maria Dreibrunnen à Wil (SG), la chapelle de l’Immaculée à Quarten (SG) et les gorges de Sainte-Vérène à Soleure.

Note: Des photos de ce lieu de pèlerinage sont disponibles auprès de l’Apic au prix de 80.– francs la première et 60.– francs les suivantes: apic@kipa-apic.ch

(apic/job/bb)

3 juillet 2013 | 16:38
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 6 min.
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