Pascal Fessard

Administrateur ou pasteur?

«Ce fut un bon administrateur.» Quel gentil compliment pour un évêque partant en retraite. N’est-ce pas le féliciter exactement pour ce que l’on attendait de lui? Mission accomplie monseigneur, bravo! Que signifient alors les réserves émises à l’encontre de Mgr Brunner, un bon administrateur certes, mais malheureusement pas un pasteur?

Peut-être n’a-t-il pas assez compris les enjeux de la pastorale nouvelle, la réalité des paroisses dans un monde sécularisé? Probablement n’a-t-il pas su soutenir les bons projets, les bonnes idées et les bonnes personnes. Or, dans ce cas, ne faudrait-il pas dire de lui qu’il fut mauvais administrateur? En règle générale, les propos tenus dans le bilan public de Mgr Brunner laissent apparaître cette contradiction, car il paraît difficile, chez un mitré, de dissocier administration et pastorale. Nous avions autrefois la situation inverse dans un diocèse voisin, avec un évêque que l’on voyait bon pasteur mais piètre administrateur, avec des résultats au fond très proches, à la seule différence que le public aime le pasteur quand il déteste l’administrateur. Rien à signaler de plus que des sentiments enfantins si l’on se cantonne au bilan. Cependant, les regards sont tournés vers l’avenir; nous sommes désormais dans la succession épiscopale, et ce depuis des mois déjà.

Les critiques doivent donc se comprendre dans un autre sens. Les valaisans veulent appeler à l’épiscopat un pasteur, c’est-à-dire un homme du terrain pastoral, un prêtre ayant une riche expérience de paroisse, capable d’insuffler des idées inspirées, des idées d’avenir. A savoir que les valaisans – ceux qui s’expriment en tout cas – ne veulent pas de quelqu’un grandi dans les dossiers de la curie sédunoise, ni d’un professeur faisant carrière dans les auditoires universitaires, non, le prochain évêque doit être un pasteur!

Il en existe, rassurez-vous, j’en connais au moins un! Quelqu’un de généreux dans la misère, d’exigeant dans la foi, de pieux dans la souffrance, de droit et de courageux dans l’adversité, quelqu’un sans compromis dans les manoeuvres et sans ambition dans la politique, humble dans les défaites comme dans les victoires, priant dans son ordinaire, aimant si possible et demandant à Dieu d’aimer quand il n’y parvient pas de ses seules forces. Ce prêtre, bon administrateur, a réussi à obtenir d’un capital foncier improductif un revenu qu’il consacre à la pastorale afin que ses paroissiens, tous les âges confondus, puissent aller chaque année en pèlerinage à Lourdes, tout en permettant la construction, à côté de l’Eglise du village, d’une maison de retraite et d’une école. Quel bon pasteur! Oui, vous l’avez sans doute reconnu, c’est du curé de Muraz dont je parle, quelqu’un qui nous fait l’amitié de signer les homélies dominicales sur cath.ch, sans innovation héroïque et ostentatoire, simplement les belles perles spirituelles de l’Eglise catholique, recueillies de l’évangile au creuset des saints auteurs.

Mgr Causero, vous avez là un candidat idéal, mais cherchez encore s’il vous plaît, ce serait tellement dommage de retirer un si bon curé des nécessités pastorales, et de l’enliser dans les sables mouvants de l’administration épiscopale… au fond, un bon administrateur suffirait; et pour le bon pasteur, alleluia, nous avons le pape François!

 

Pascal Fessard

19 juin 2013 | 15:51
par Pascal Fessard
Temps de lecture: env. 2 min.
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