Claude Ducarroz

Augmente la joie de Dieu

Voilà qui tombe à pic en cette année de la miséricorde: Luc nous offre trois paraboles… de la miséricorde!

Que Jésus fréquente des ivrognes et des gloutons (Cf. Luc 7,34), on peut éventuellement le lui pardonner. Mais qu’il se mette à table avec des pécheurs aussi affichés que les prostituées et les collecteurs d’impôts pour l’occupant, c’est scandaleux, du moins pour les scribes et les pharisiens, ces croyants parfaits et fiers de l’être. Par la parabole de la brebis perdue et retrouvée, par celle de la femme heureuse d’avoir récupéré la drachme égarée, Jésus fait un grand effort pédagogique pour révéler un autre visage de Dieu, le Père. Encore faut-il rester fidèle à ce divin portrait.

Dieu aime toujours le premier. Il aime tous les hommes, y compris les pécheurs. Heureusement. Ne sommes-nous pas tous à la fois responsables et victimes du péché du monde? Une triste situation qui fait de nous des êtres perdus, comme la brebis égarée. Mais quand un père aime à la dimension du cœur de Dieu, il ne peut pas se résigner à nos malheurs, même si nous sommes coupables. Il fait tout, y compris prendre le risque d’abandonner les brebis «propres en ordre», pour retrouver celle qui était perdue. C’est cela la divine miséricorde. Elle culmine dans la joie du berger qui revient, tout heureux, avec la brebis sur ses épaules. On peut aussi deviner la joie de la brebis elle-même qui vient de redécouvrir l’amour de son pasteur et le bonheur de vivre auprès de lui plutôt que dans les ravins dangereux de la fausse liberté.

Encore faut-il ne pas transformer le sens de la parabole. Le berger ne se réjouit pas de l’égarement de la brebis, mais de son retour. Et il y a plus de joie chez Dieu non pas parce qu’il y a un pécheur de plus, mais parce qu’il y a un malheureux de moins. C’est la conversion – une nouvelle vie plus humaine que la précédente ­– qui suscite de la joie dans le ciel, même parmi les anges.

Si nous croyons au pardon des péchés parce que nous pouvons compter sur l’infinie miséricorde de Dieu, il n’en reste pas moins que le péché lui-même est un drame qui peut nous conduire jusqu’à la rupture avec Dieu, même si –heureusement– Dieu continue de nous aimer, au point de venir à notre recherche, si éloignés que nous soyons. Et le péché, comme on le constate en nous et autour de nous, c’est aussi ce qui nous déshumanise en même temps qu’il altère nos relations aux autres.

Dans la miséricorde, il y a surtout un cœur qui bat, celui du Dieu-Amour. Mais il y a aussi notre misère. Si l’on veut retourner dans ce cœur toujours accueillant, il faut aussi reconnaître notre misère. Le pardon et la conversion: une rencontre explosive, libératrice.

Claude Ducarroz | 09.09.2016


Luc 15,1-10

Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui: «Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux!» Alors Jésus leur dit cette parabole: «Si l’un de vous a cent brebis et en perd une, ne laisse-t-il pas les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la retrouve? Quand il l’a retrouvée, tout joyeux, il la prend sur ses épaules, et, de retour chez lui, il réunit ses amis et ses voisins; il leur dit: «Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue!»
«Je vous le dis: C’est ainsi qu’il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion.
«Ou encore, si une femme a dix pièces d’argent et en perd une, ne va-t-elle pas allumer une lampe, balayer la maison, et chercher avec soin jusqu’à ce qu’elle la retrouve? Quand elle l’a retrouvée, elle réunit ses amies et ses voisines et leur dit: «Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé la pièce d’argent que j’avais perdue!»
«De même, je vous le dis: Il y a de la joie chez les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se convertit.»

«Il fait tout, y compris prendre le risque d’abandonner les brebis «propres en ordre», pour retrouver celle qui était perdue»
9 septembre 2016 | 16:02
par Claude Ducarroz
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