Bernard Litzler

La France en souffrance

Les urnes ont livré leur verdict: Emmanuel Macron affrontera Marine Le Pen le 7 mai prochain pour accéder à l’Elysée. Après une campagne animée, un candidat inattendu se retrouve face à la cheffe du Front national. Situation inédite dans une Ve République habituée aux partis traditionnels, à l’alternance gauche-droite, à l’«entre-soi» politique.

Mais les semaines précédant l’échéance du premier tour des présidentielles ont montré les souffrances d’un pays mal dans sa peau. La posture du héros national, successivement entretenue par Fillon, Mélenchon ou Hamon, revient finalement au «Petit Prince» Macron. En face, Marine, portée par les déceptions des oubliés de la croissance, essaiera, avec sa faconde populiste, de fustiger les forces de l’argent et des partis, unis dans un front républicain anti-FN.

Le héros gagnant du 7 mai aura donc fort à faire pour atténuer les souffrances de la France en déshérence. Le chômage, cancer national, gangrène les esprits. Des régions entières pâtissent de la marginalisation qui transforme les petites cités en fantômes et les centres villes en déserts. La vitalité du pays diminue, le fatalisme s’installe et la peur de l’autre gagne.

Les oubliés de la croissance se sentent abandonnés. Alors la solidarité vole en éclat et les Français attendent tout – trop – de l’Etat. La «culture du déchet» que dénonce le pape François étend ses ravages. Conséquence: le repli nationaliste que prône la «France marine» accentue la tentation d’une solution radicale.

Et pourtant ce pays foisonne de créativité et recèle des trésors d’ingéniosité. Il reste un moteur puissant de la construction européenne, il intègre les étrangers depuis des décennies. «En Marche», le mouvement de Macron, porte bien son nom. Mais la France n’a pas attendu ce slogan pour avancer. Espérer pour la France, c’est croire que la solidarité a un avenir. Car un pays plus fort, c’est aussi un barrage mental au Brexit, à l’isolationnisme, au déclin de l’Europe. C’est un redoublement d’espoir pour un continent que les extrémismes à la façon Trump, Poutine ou Erdogan ne font pas rêver. Rêvons donc pour et avec la France, car il vaut mieux, vu de Suisse, avoir un voisin bien portant que malade.

Bernard Litzler

La France, un pays mal dans sa peau (photo DR)
24 avril 2017 | 15:07
par Bernard Litzler
Temps de lecture: env. 2 min.
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