Claude Ducarroz

Ne trumpons pas la Suisse!

Je ne connais pas assez les Etats-Unis de l’intérieur pour émettre des jugements péremptoires sur ce qui a conduit une majorité du peuple américain à choisir Donald Trump comme président de cette grande nation. Mais mon statut d’observateur extérieur, quoique bienveillant, m’autorise à glaner quelques leçons pour la Suisse dans l’évènement-surprise qui vient de secouer l’actualité de notre monde.

Quand on veut se mettre au service des gens – notamment par l’engagement politique –, il faut commencer par les écouter, et surtout celles et ceux qui ne disent rien ou qui ne savent pas comment s’exprimer. Leur malaise peut devenir colère, celle qui n’est pas une bonne conseillère. Mais comment l’éviter quand montent au fond des cœurs les cris sourds suscités par l’injustice ou l’indifférence ?

En Suisse aussi, comme le révèlent certaines enquêtes sociologiques, des «petites gens» peinent et souffrent, souvent en silence, jusqu’à ce que leur mal-être finisse par éclater au grand jour. Peut-être est-il encore temps de prendre conscience et de réagir face aux séquelles d’une économie mondialisée qui fait exploser les bénéfices des plus riches et diminuer les crédits des moins favorisés.

Les paroles sont des armes redoutables, pour le meilleur ou pour le pire. On a vu des slogans réducteurs, des phrases assassines, des dessins menteurs, à vous faire froid dans le dos. La campagne électorale, marquée souvent par quelques excès inévitables, ne justifie nullement des calomnies et des attaques de bas étage.

«Chez nous aussi, on a vu fleurir des formules mensongères et des caricatures iniques»

Chez nous aussi, on a vu – et on voit encore – fleurir des formules mensongères et des caricatures iniques. Le minimum que l’on puisse attendre des candidats qui sollicitent nos suffrages, c’est qu’ils aient le respect des personnes, y compris de leurs adversaires politiques, tant des individus que des groupes qu’ils représentent. Veillons à ne pas descendre dans l’arène du mépris et de la haine. Car des paroles ou des écrits jusqu’aux actes brutaux, voire assassins, le chemin est parfois très court et la glissade savonnée.

Enfin, nous qui avons le privilège de pouvoir agir et réagir, exprimer nos opinions et même prendre des décisions par un large usage du suffrage universel, qu’en faisons-nous ? La montée du parti des abstentionnistes ne peut qu’inquiéter. Certes notre démocratie helvétique n’est pas parfaite. Mais des débats réguliers – légers ou graves – nous permettent de réfléchir et de prendre position. Et bien souvent des enjeux éthiques et sociétaux nous offrent la possibilité de redéfinir nos choix de base et de revisiter notre échelle des valeurs. Avec, en point de mire, notre manière concrète de promouvoir la justice, de lutter pour la paix, de renforcer les solidarités, de respecter l’environnement, de favoriser le vivre-ensemble local, national et planétaire.

Si c’est ça la «différence suisse», alors je suis fier d’être nationaliste. Je ne me laisserai jamais trumper! Claude Ducarroz, le 15.11.2016

Donald Trump, durant sa campagne présidentielle.
15 novembre 2016 | 08:00
par Claude Ducarroz
Partagez!