Jean-Jacques Friboulet

Vérité et mensonges

 

La vérité semble dévaluée par nos contemporains. Pas seulement celle de la foi, mais plus modestement celle d’une connaissance conforme au réel.

Dans la campagne Outre-Manche sur le Brexit, ses partisans ont promis à la population des gains de l’Etat qui ne sont pas près de se produire et ils ont dit ces mensonges en connaissance de cause. Aux Etats-Unis, le candidat D.Trump promet des baisses d’impôt sans précédent alors que son pays est hyper-endetté. Plus près de nous, des politiciens ont affirmé que les contingentements votés sur la main d’œuvre immigrée le 9 février 2014 étaient compatibles avec les accords bilatéraux. Le Conseil Fédéral vient de reconnaître que c’était faux et qu’il n’y aurait pas d’accord avec l’Union européenne dans le délai prescrit par l’initiative.

Peut-on expliquer cette négligence de la vérité parce que celle-ci n’est jamais amusante comme l’affirmait M. Audiard? L’affirmation est souvent juste mais un peu courte quand on constate que  la fréquence du mensonge augmente dans tous les milieux y compris les milieux scientifiques. En témoigne la lutte contre le plagiat que doivent mener les grandes universités. Les raisons de cette dévaluation de la vérité sont plus profondes.

Ce déclin de la vérité peut conduire certains de nos concitoyens, en particulier les jeunes, au scepticisme.

En matière d’informations et de propos politiques il y a sûrement la baisse d’audience de la presse écrite et l’augmentation de celle des réseaux sociaux. A la suite des années 1930 et des méfaits de la propagande, les journalistes s’étaient dotés après la guerre et dans les grands pays d’un code de déontologie. Nulle déontologie sur les réseaux sociaux. On peut y raconter tout et n’importe quoi sans self-control. C’est grâce à cette pseudo-liberté que DAECH peut déverser sa prose de haine contre les «mécréants». Mais DAECH n’a pas le monopole de cette littérature. Les insultes à caractère raciste ou antireligieux sont fréquentes sur internet. L’Institut de journalisme de l’Université de Fribourg s’est transformé dans les années 2000 en Département des sciences de la communication et des médias. Tout un symbole pour le passage d’une déontologie à une liberté sans limite avec l’aide des nouvelles technologies.

Un autre phénomène vient renforcer ce déclin de la vérité eu égard au réel. Il s’agit de la baisse d’influence des sciences qui forment à une observation de terrain (histoire et géographie) ou à des raisonnements rigoureux (philosophie)au bénéfice des sciences sociales (psychologie, sociologie, économie) qui peuvent se réfugier dans les concepts et les modèles. Certes ces dernières devraient tester leurs théories avec des protocoles scientifiques rigoureux et de nombreuses observations mais elles s’en abstiennent le plus souvent; les chercheurs se contentent de travailler sur des données fournies par d’autres et construites dans des conditions que très souvent ils méconnaissent. Ils ne vont pas sur le terrain. C›est la raison, par exemple, de leur ignorance des phénomènes naturels. Cette routine de la recherche conduit à traiter toujours les mêmes questions et à ignorer d’autres phénomènes. Les journaux nous apprennent ainsi que le gouvernement anglais aimerait reporter l’échéance du Brexit parce que ses ministères ne possèdent pas les spécialistes capables de traiter les conséquences de cette rupture.

Ce déclin de la vérité peut conduire certains de nos concitoyens, en particulier les jeunes, au scepticisme. Le scepticisme, au-delà d’un doute raisonnable, est une voie sans issue. Sans recherche de la vérité, il n’y a pas de responsabilité et donc pas de vraie relation à l’autre y compris la nature. Au-delà de nos convictions chrétiennes, c’est tout simplement un impératif humain.

Jean-Jacques Friboulet | 17.08.2016

«Les partisans du Brexit ont menti en connaissance de cause»
17 août 2016 | 09:30
par Jean-Jacques Friboulet
Temps de lecture: env. 3 min.
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