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Homélie

Homélie du 11 décembre 2016 (Mt 11, 2-11 )

 Abbé  Pierre Jaquet – Basilique Notre-Dame, Genève

« Orienter notre joie vers la joie de la naissance du Fils de Dieu »
Malgré les apparences, Dieu accomplit son œuvre.
– Isaïe insiste : « Soyez forts, ne craignez pas, voici votre Dieu ! »
– Saint Jacques encourage : « Prenez patience et tenez fermes, car la venue du Seigneur est proche ! »
– L’Évangile confirme : « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle ! »

Dieu est fidèle à ses promesses ; sa parole accomplit ce qu’elle dit ; le royaume des cieux est tout proche.

Les apparences

On peut se demander : les apparences ne seraient-elles que des apparences ? Tournons-nous vers Jean-Baptiste :
– l’Évangile le montrait souverain au désert, le voici maintenant prisonnier d’Hérode, enfermé dans une prison ;
– au Jourdain, il prêchait avec assurance, le voici maintenant qui s’interroge ;
– libre de ses mouvements auparavant, il est maintenant obligé d’envoyer des messagers;
– il parlait avec assurance de conversion, le voici pris par le doute : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? »

Les apparences ne seraient-elles que des apparences :
– « le désert et la terre de la soif, les mains défaillantes, les genoux qui fléchissent, les gens qui s’affolent, les captifs amenés en déportation » – pour reprendre les paroles d’Isaïe ;
– ou encore, celles de saint Jacques : « l’impatience, le manque de fermeté, les gémissements des uns contre les autres. »
Tout cela, ne serait-ce que des apparences ?

Les emprisonnements modernes

De fait, la prison de Jean-Baptiste n’est-elle pas aussi un peu la nôtre ? Les cachots des temps modernes, n’est-ce pas de vivre dans un univers culturel éclaté, fragmenté, sans plus aucune référence à Dieu, dans lequel beaucoup vivent isolés ? L’individualisme dans lequel un grand nombre se replie actuellement n’est-il pas une geôle ? Les emprisonnements modernes ne sont-ils pas la prévalence du virtuel sur la réalité, la primauté de l’émotion par rapport à la question du sens ?

L’hypermédiatisation de notre monde globalisé, l’ère du clic et du zapping ne montrent-elles pas toujours plus les souffrances, les douleurs d’hommes, de femmes, d’enfants, de populations entières prises dans des catastrophes ou dans les mondes parallèles de la violence, de la faim, de la drogue, de l’argent, du pouvoir ?
Non, ce ne sont certainement pas là que des apparences. Les maux, les injustices, les peines qui accompagnent chaque génération sont bien réels, le plus souvent injustes et cruels.

Dieu est à l’oeuvre

C’est en prenant en compte tout leur poids, toute leur gravité que les lectures de ce dimanche de l’Avent affirment que Dieu est à l’œuvre. Il n’est responsable ni des catastrophes ni des mondes parallèles ni des injustices qu’une minorité de nos semblables font peser sur un grand nombre.

Dieu n’est pas angoissé non plus par le monde qu’il a créé. Il sait de quoi l’homme est capable : de conversion, de pardon et de miséricorde. Dieu ne veut pas emprunter un autre chemin que celui de l’homme, car ce dernier est capable d’écouter sa parole, de la mettre en pratique, de l’accueillir comme Bonne Nouvelle – cette nouveauté que le monde attend – et de s’ouvrir à la grâce de Jésus, Messie et Fils de Dieu.

Éveillés à un sixième sens

Grâce à notre baptême, le Christ est aujourd’hui présent dans nos cœurs et c’est lui qui viendra encore au dernier jour pour nous inviter à prendre place dans son royaume. Aussi sûrement qu’il est né hier à Bethléem et s’est fait chair !
C’est à un sixième sens, celui de la foi, de l’espérance et de la charité, que nous éveillent les lectures de ce dimanche : au Christ Bonne Nouvelle !

Depuis longtemps Isaïe en parlait : « Ceux qu’a libérés le Seigneur reviennent, ils entrent dans Sion avec des cris de fête, couronnés de l’éternelle joie. Allégresse et joie les rejoindront, douleur et plainte s’enfuient ! »

De même saint Jacques : « Prenez patience, voyez le cultivateur, il attend les fruits précieux de la terre avec patience, jusqu’à ce qu’il ait fait la récolte précoce et la récolte tardive ! »
L’Évangile aussi : « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez (…) la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres ! »

Le sens de la Bonne Nouvelle

Il est important de cultiver dans son cœur le sens de la Bonne Nouvelle, ce sixième sens que développent la foi, l’espérance et la charité.
Il y a bien des années, j’ai eu l’occasion de voyager quelques semaines au Niger. En raison de la sécheresse qui sévissait, j’avais été frappé par les effets de la désertification.
Un jour, je me trouvais près des contreforts de l’Aïr. Je vois encore le lit de cette rivière saisonnière – cet ouadi – qui était vide, asséché. L’eau n’y avait plus coulé depuis plus d’une année. Je venais d’ailleurs de le traverser à pied sec.

Le lendemain, le temps a soudainement changé et une forte pluie est tombée jusqu’à la nuit. À mon réveil, le matin, je n’en ai pas cru mes yeux : une eau vive coulait abondamment, avec un courant tel qu’il aurait été dangereux de le traverser.
À considérer cette expérience, les paroles du prophète Isaïe prennent aujourd’hui une saveur particulière : « Ce désert et la terre de la soif, qu’ils se réjouissent, le pays aride, qu’il exulte et fleurisse, qu’il se couvre de fleurs des champs, qu’il exulte et crie de joie ! »

La joie de l’Evangile

« Es-tu celui qui doit venir ? » demandait Jean-Baptiste. Il ne fait pas de doute que le Christ l’est, celui qui vient !
L’Exhortation apostolique du pape François, la « Joie de l’Évangile », a la même tonalité. Je lis les trois premières phrases de ce document :
La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ la joie naît et renaît toujours

Comme l’a dit la prière d’ouverture de ce dimanche du Gaudete, du « Réjouissez-vous » : laissons le « Seigneur orienter lui-même notre joie vers la joie de la naissance de son Fils »
Portant l’enfant en elle, Marie sait assurément que le Seigneur est celui qui vient.
Qu’elle nous aide à nous ouvrir à la Bonne Nouvelle de sa présence au cœur de notre vie !

Notre-Dame de Genève, priez pour nous !
Notre-Dame, Messagère de paix, priez pour nous !


3e dimanche de l’Avent

Lectures bibliques : Isaïe 35, 1-6a.10 ; Psaume 145 (146) ; Jacques 5, 7-10 ; Matthieu 11, 2-11


 

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11 décembre 2016 | 09:15
Temps de lecture: env. 4 min.
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