"Suis-moi"/Photo:evangile-et-peinture.org
Homélie

Homélie du 30 juin 2019 (Lc 9, 51-62)

Chanoine Claude Ducarroz – Basilique Notre-Dame, Lausanne

« Je crois bien qu’il a la vocation. »

J’avais environ 10 ans. Je venais de dire, un peu naïvement, que je pourrais peut-être être prêtre, probablement pour faire comme mon curé qui était un homme sympathique et proche des gens. Et autour de moi, les commentaires commencèrent à courir : « Peut-être qu’il a la vocation ». En ce temps-là, dans mon village, avoir la vocation, pour un garçon, c’était être destiné à devenir prêtre.

Plein de vocations dans l’évangile de ce dimanche ! Deux noms sont connus : Jacques et Jean, pris parmi le groupe des 12 apôtres. Trois autres sont parfaitement anonymes. Deux – sans doute très généreusement- se présentent eux-mêmes à Jésus, tandis qu’un troisième est appelé selon la formule classique : « Suis-moi ». Des situations très différentes, mais toutes très compliquées.

Jacques et Jean avaient l’avantage d’avoir été appelés explicitement par Jésus. C’était à Capharnaum, au bord de la mer de Galilée, car ils étaient des pêcheurs.

Dans la traversée périlleuse de la Samarie pour aller à Jérusalem, le même Jésus les envoie en mission au devant de lui pour préparer sa propre venue.

Des surprises au menu de la mission

Les trois autres sont rencontrés au hasard du voyage, on pourrait dire n’importe où. Mais tous vont devoir corriger en profondeur le rêve de leur vocation, car suivre Jésus implique beaucoup de surprises au menu de la mission. Peur eux comme pour nous.

Puisqu’ils avaient été envoyés par Jésus le Christ, le porteur de l’Evangile, à savoir une bonne nouvelle, Jacques et Jean s’attendaient à jouir d’un certain succès apostolique. Or on refusa de les recevoir. Leur réaction spontanée ?  La colère qui tourne en vengeance : « Qu’un feu tombe du ciel pour les détruire ». On connaît la réponse de Jésus : « Il les réprimanda et les envoya dans un autre village. »

Car l’Evangile ne doit jamais s’imposer par la force, mais toujours se proposer en respectant la liberté de conscience de ceux à qui il est adressé. Et en même temps, pour ceux qui veulent suivre le Christ – quelles que soient les circonstances de l’appel – répondre à une telle vocation engage sans doute davantage que ce que l’on imagine au départ.

Reliés à Jésus

La bonne surprise, c’est que nous sommes reliés à Jésus par une sorte de cordon ombilical de type pascal, une communion qui peut nous entraîner, dans une pleine liberté respectée, jusqu’au delà de la mort, après avoir irrigué notre vie, quoi qu’il nous arrive. Il suffit, comme le rappelle saint Paul – qui savait de quoi il parlait après l’évènement bouleversant du chemin de Damas – de marcher sous la conduite de l’Esprit.

Et justement, cet Esprit en nous, et par les circonstances de la vie, nous rappelle que suivre Jésus, c’est le placer en tête de notre existence, avant les conforts de la richesse et même – ça peut arriver- avant les liens de famille quand ceux-ci peuvent constituer un obstacle ou un handicap à la réalisation de la vocation chrétienne. Jamais par mépris certes, mais par fidélité à un appel à aimer plus largement, plus gratuitement, plus profondément.

Un appel à la foi

Chacun de nous, à partir du mystérieux appel à la vie – première vocation – est invité ensuite à découvrir un appel à la foi qui donne un sens plénier à cette vie humaine, même au-delà de la mort. Je crois que quelqu’un se présente à lui, de mille manières possibles, dans la nuit des recherches intérieures ou dans la clarté des décisions de croire. Et ce quelqu’un murmure délicatement à la conscience de tout homme. Il appelle toujours, y compris à travers les heurs, bonheurs et même malheurs de la vie.

Ferme les yeux pour l’écouter du dedans, peut-être jusqu’à la prière. Rouvre tes yeux, et regarde tant de frères et sœurs à aimer, qui eux t’attendent et t’appellent aussi pour des rencontres qui vous conduiront ensemble au-delà de vous-mêmes.

Car l’amour vrai est porteur de vie plus belle pour tous, et tantôt il cache par délicatesse, tantôt il révèle par illumination la présence même de Dieu. Car Dieu est Amour, et ceux qui aiment connaissent Dieu et plus encore, Dieu demeure en eux et eux en Dieu. Quelle meilleure communion ?

Que vas-tu faire à partir de cette révélation, et déjà à partir d’un pressentiment encore un peu vague ? Partager ce trésor, annoncer cette bonne nouvelle, inviter au repas de l’Amour majuscule, goûter avec d’autres, à commencer par les plus pauvres et les plus souffrants, le fragile et merveilleux bonheur de nous savoir tous aimés de Dieu, à la vie et à la mort, pour la vie éternelle.

Mais oui, toi aussi, qui que tu sois, sans conditions préalables, tu as la vocation, tu es appelé par le Dieu-Amour. Appelé à le connaître toujours mieux, à te laisser aimer par lui, à partager avec les autres – même pendant les vacances – le mystérieux bonheur de cette connaissance en forme de naissance ou de renaissance.

On y va ensemble, à la suite de Jésus.


13ème dimanche ordinaire

Lectures bibliques : 1 Rois 19, 16b.19-21; Psaume 15, 1.2a.5, 7-8, 9-10, 2b.11; Galates 5, 1.13-18; Luc 9, 51-62


 

«Suis-moi»/Photo:evangile-et-peinture.org
30 juin 2019 | 09:40
Temps de lecture: env. 3 min.
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