Mgr Leonardo Steiner, secrétaire général de la CNBB, a pris des positions "musclées" en 2017 | © Senado Federal/Flickr/CC BY 2.0
International

2017, l'année de la fermeté pour les évêques brésiliens

La Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB) s’est illustrée en 2017 par des prises de positions plutôt musclées sur certains thèmes d’actualité, notamment éthiques, politiques, sociaux ou environnementaux. Retour, à travers plusieurs extraits de communiqués, sur une année marquée en particulier par de nombreux scandales de corruption.

Réforme du régime des retraites

Après la réunion du Conseil permanent de la CNBB, du 21 au 23 mars, l’entité a émis trois notes concernant le projet d’amendement de la Constitution (PEC 287/2016) permettant, notamment, le report de l’âge de départ à la retraite pour les travailleurs. Dans la principale d’entre elles, les évêques considèrent que l’Etat «choisit le chemin de l’exclusion sociale». La note invite les chrétiens et les personnes de bonne volonté «à se mobiliser afin de rechercher le meilleur pour le peuple brésilien, principalement les plus fragiles.»

Exonération fiscale des institutions philanthropiques

Dans un autre communiqué, publié lui aussi le 23 mars, sur le thème de la suppression de l’exonération fiscale des institutions philanthropiques, les responsables de la CNBB estiment que ce projet est une erreur. Ils mettent en effet en avant le fait que les institutions philanthropiques proposent des services réels dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’assistance sociale. «Eliminer l’exonération équivaudrait, dans la pratique, à rendre impossible le service de quelque 1’400 institutions dans le domaine de la santé, 2’100 dans l’éducation et plus de 5’000 dans le domaine de l’assistance sociale.»

Ethique en politique

Les membres de la présidence de la CNBB ont publié, le 19 mai, une note officielle intitulée «Pour l’éthique en politique». Ils y affirment que la CNBB «accompagne avec étonnement et indignation» les graves accusations de corruption proférées par le Tribunal fédéral suprême à l’encontre du président Michel Temer.

Dans cette note, les évêques estiment que «de telles accusations exigent de rigoureux éclaircissements, en se soumettant aux exigences constitutionnelles.» Selon la CNBB, «une fois les faits vérifiés, les auteurs des actes illicites doivent être tenus responsables de leurs actes». Il ont rappelé également que, selon l’article 37 de la Constitution, «il est du devoir de tout serviteur public, principalement ceux qui occupent des fonctions importantes, de maintenir une conduite intègre, sous peine de ne pas pouvoir exercer la charge qu’il occupe».

Pour la CNBB, «la vigilance et la participation politique de nos communautés, des mouvements sociaux et de la société, rassemblés, peuvent contribuer à l’élucidation des faits et de la défense de l’éthique, de la justice et du bien commun». Pour les évêques, «surmonter la grave crise que vit le Brésil  implique la sauvegarde de l’éthique en politique, dont le rôle est fondamental dans une société démocratique.»

Conseil indigéniste missionnaire (CIMI)

En juin, un rapport d’une Commission d’enquête parlementaire (CPI), baptisée «CPI de la Fondation nationale de l’indien (FUNAI) et Institut national de la colonisation et de la réforme agraire (INCRA)» accusait d’entrave à la loi plus d’une centaine de caciques indigènes, anthropologues, procureurs de la République et personnes liées au CIMI. La CNBB a rapidement pris position, face à cela, en attaquant frontalement les parlementaires.

Dans le communiqué, approuvé par le Conseil permanent, les évêques soulignaient en effet «l’augmentation de la violence dans le monde rural, notamment au détriment des représentants des peuples indigènes et des organisations syndicales paysannes, au moment même où la CPI enquêtait sur les supposées entraves de ces derniers à la loi.»

La CNBB s’est également faite l’écho de l’indignation de la société civile brésilienne qui estime que «cette Commission d’enquête parlementaire est une tentative de l’Etat de criminaliser toute personne ou entité susceptible d’entraver la politique d’exploitation des ressources naturelles, notamment en Amazonie, au profit des grands propriétaires terriens, très influents dans le gouvernement du président Michel Temer.»

Réforme du travail

La CNBB a signé une note publique critiquant le projet de réforme du travail votée le 11 juin au Sénat. Dans le communiqué, signé par 11 entités telles que le ministère public du Travail (MPT) et l’Ordre des avocats du Brésil (OAB), les évêques affirment que le texte de loi est «criblé de points anticonstitutionnels» et représente «un grave retour en arrière au niveau social.» Parmi les points anticonstitutionnels relevés, figurent notamment le non respect des accords de branches et des conventions collectives.

Journée de prière et de jeûne pour le Brésil

La Conférence nationale des évêques du Brésil (CNBB) a invité les fidèles à une journée de prière et de jeûne, le 7 septembre 2017, à l’occasion de la fête de l’Indépendance. Les évêques ont décidé de mobiliser les chrétiens «après avoir analysé la réalité du pays». Dans la lettre envoyée à tous les évêques brésiliens, Mgr Leonardo Steiner, secrétaire général de la CNBB, indique que «la journée de prière est une opportunité pour que s’unissent les chrétiens et les personnes de bonne volonté qui veulent un Brésil meilleur, plus fraternel et non divisé».

Un des extraits de la prière envoyée à tous les évêques du pays demande: «Aidez-nous à construire un  pays juste et fraternel. Que nous soyons tous attentifs aux besoins des personnes les plus fragiles et sans défense. Que le dialogue et le respect gagnent sur la haine et les conflits. Que les obstacles soient surmontés grâce à la rencontre et la réconciliation. Que la politique soit, de fait, au service des personnes et de la société et non des intérêts personnels, partisans et de groupes (économiques).»

Renca

Le 5 septembre, Journée nationale de l’Amazonie, la CNBB a divulgué une note dans laquelle elle a manifesté «son refus véhément» du décret qui accordait aux compagnies minières la possibilité d’exploiter la Réserve nationale de cuivre et associés (Renca), un territoire grand comme le Danemark, en plein cœur de l’Amazonie. Cette ouverture à l’exploitation minière de cuivre, or, diamant, fer… risquait de provoquer une large déforestation et la destruction irréversible de la biodiversité.

Alors que les représentants du Réseau ecclésial pan-amazonien (Repam) estimaient que «le décret bafouait la démocratie brésilienne et cédait aux intérêts des grandes entreprises minières», la CNBB a assuré que «la décision gouvernementale (allait) à l’encontre de la Constitution Fédérale et contre l’obligation de consulter les peuples indigènes, et (mettait) en évidence la logique perverse du marché adoptée au Brésil.»

Une mobilisation qui a obligé le président Michel Temer à annuler le décret.

Travail esclave 

Début novembre, le Conseil permanent de la CNBB a également publié un communiqué rejetant avec véhémence le projet de loi 1129 du ministère du Travail destiné à «éliminer les protections légales contre le travail esclave». (cath.ch/jcg/rz)

 

 

 

 

Mgr Leonardo Steiner, secrétaire général de la CNBB, a pris des positions «musclées» en 2017 | © Senado Federal/Flickr/CC BY 2.0
29 décembre 2017 | 09:20
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture: env. 5 min.
Brésil (389), CNBB (59)
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