Ambiance rock pour Prier et Témoigner 2015 à Fribourg (photo Maurice Page)
Suisse

«Aimer, c'est s'engager»: 26e édition de Prier Témoigner à Fribourg

Fribourg, 08.11.2015 (cath.ch-apic) Archiduc ou voyou, petite fille modèle ou jeune musulmane, l’édition 2015 de Prier Témoigner a une nouvelle foi manifesté l’étonnante diversité des enfants de Dieu. Ambiance rock, témoignages intimes, prières de louange, adoration et franche rigolade: tous les ingrédients étaient réunis pour séduire et réchauffer, les 7 et 8 novembre 2015, les quelque 1’300 personnes de la foule compacte des bancs de l’aula de l’Université de Fribourg.

Le Père Jean-Philippe Chauveau, grand témoin de Prier Témoigner 2015, n’avait au départ rien du bon paroissien. ‘De la rue à la rue’, son itinéraire n’est pas banal. Né dans une famille alcoolique et violente, violé comme jeune garçon, chef de bande placé en maison de correction où les «bonnes soeurs et les curés» le dégoûtent de la foi, il grandit dans la conviction que si personne ne l’aime, «c’est qu’il est moche dehors et dedans». Il souffre de la blessure du coeur la plus dure qui soit. Il abandonne la prière et la foi dès l’âge de douze ans, quitte sa famille à 17 et se remet à prier à 21 ans au cours de son service militaire. «Et là, je me suis fait avoir !»

Dans un bus rempli de mamies à chapelet

Sur son lieu de travail, il rencontre un catholique pratiquant qui lui fait comprendre sans paroles que l’amour de Dieu est gratuit. Embarqué bon gré mal gré dans un pèlerinage à Lisieux, dans un bus «rempli de mamies agrippées à leur chapelet», il visite seul la chambre de la petite Thérèse et il comprend qu’il doit devenir prêtre.

«Cela m’a fait flipper, moi le bon à rien.» L’appel se répète à Ars, sur la tombe du saint curé. Puis vient la rencontre avec Jean Vanier, fondateur de l’Arche, qui accueille les handicapés, et avec Marthe Robin. Sans le connaître, la mystique, fondatrice des Foyers de Charité, lui demande tout de go: «Monsieur, n’avez-vous jamais songé à devenir prêtre ?»

Il rejoint la communauté Saint-Jean, fait ses études à Fribourg et est ordonné prêtre en 1982. Il retourne alors auprès des ses frères et soeurs de la rue, paumés, drogués, prostituées. «Ce sont eux qui m’ont appris l’amour, la tendresse, l’écoute sans jugement et la confiance. Ils m’ont beaucoup ‘corrigé’».

La petite fille modèle

Eléonore, élevée dans une famille catholique intégriste, a tout de la petite fille modèle. Eduquée à la maison, entre papa et maman, elle ne manque jamais aucune dévotion, aucun chapelet, aucune messe, mais elle vit dans une bulle, un monde clos isolé de l’extérieur forcément ‘mauvais et pécheur’. Elle fait tout pour être une ‘catho-pro’, mais elle sent un grand vide intérieur. «Je n’avais jamais rencontré Jésus».

Elle trouve des chrétiens heureux dans la communauté Eucharistein. Elle y découvre la joie et la confiance. Elle participe à la messe, mais s’interdit d’abord d’y communier. Son éducation lui dit que c’est un péché. Quand elle s’approche enfin, «ce fut comme une deuxième ‘première communion’». Elle comprend que Dieu l’aime, même si elle n’est pas parfaite. «Je devais vivre ma foi par amour, pas seulement pour me rassurer en faisant tout comme il faut. Dieu t’aime même quand tu fais tout de travers.»

La foi du sous-marinier

Que se passe-t-il entre Frédéric, marin breton, pilote de sous-marin, et Awa, une jeune femme musulmane de Côte d’Ivoire ? Etudiante en France, Awa découvre la parole de saint Jean: «Comment peux-tu prétendre aimer Dieu que tu ne vois pas si tu n’aimes pas ton frère que tu vois ?» Elle se convertit à la foi catholique et rencontre Frédéric qui, à l’époque, est tendance bouddhiste tibétain. Ensemble, ils construisent un projet de famille avec leurs deux filles. «Cela nous demande souvent d’aller à contre-courant, mais cela vaut la peine.»

Avec Marie-Hélène et Rudolf de Habsbourg, c’est l’élégance du coeur qui parle. Mariés depuis 39 ans, l’archiduchesse et l’archiduc d’Autriche ont eu huit enfants, dont quatre sont entrés en religion. Prière en commun, célébration des sacrements, messe dominicale rythment la vie de la famille. Respect et confiance règlent l’éducation des enfants. Parlant de la vocation religieuse de ses enfants, Rudolf souligne que le «rôle des parents, c’est l’écoute, pas plus, il ne faut ni pousser ni freiner». Les petites fidélités de tous les jours portent la même exigence que les grands engagements.

Jésus m’a regardé sur mon vélomoteur

«Jeune fille, je passais tous les jours à vélomoteur devant un calvaire dans ma Gruyère natale. Et là, Jésus m’a regardée», raconte soeur Myriam Teresa, aujourd’hui carmélite au monastère du Pâquier.

Elle avoue avoir «longtemps tourné dans le giratoire avant de choisir la bonne sortie». Elle découvre la figure de la ‘petite Thérèse’ de Lisieux, encore elle. «Je veux bien être religieuse moniale, mais jamais au Carmel !» Sa résistance finit par être vaincue. «Aujourd’hui, je suis une femme heureuse et libre, en chemin de croissance.»

Pascal entend les cloches de saint-Pierre

Ce sont les cloches de l’église St-Pierre de Fribourg qui ont réveillé Pascal Dumont. Etudiant en droit, engagé dans la société, Pascal Dumont est «comme tout le monde». Il a fait sa première communion et sa confirmation, «mais cela ne me disait pas grand chose». Jusqu’à ce jour où les cloches de l’église voisine le réveillent un dimanche matin après une soirée de fête. Il s’habille et se rend à la messe.

A la sortie, le prêtre l’interpelle. «On ne t’a jamais vu, viens prendre l’apéro !» Peu à peu, il y prend goût. Sollicité, il participe à l’organisation du premier rassemblement «Prier Témoigner» en 1990. Il rencontre un peu plus tard quatre jeunes prêtres en soutane, heureux et épanouis. Entré à la communauté Saint Martin, il y est ordonné prêtre en 1997. Aujourd’hui, il est formateur des séminaristes et aumônier en ‘périphérie’ chez les riches et les puissants «qui prétendent n’avoir besoin de rien et surtout pas d’un Dieu pour les embêter.»

Le bien par le bien

«Peut-on faire le bien à travers le mal ?», s’est interrogé gravement Roberto Simona. Responsable pour la Suisse romande et italophone de l’Aide à l’Eglise en détresse, une oeuvre d’entraide qui défend les chrétiens persécutés dans le monde entier, il connaît de près la situation des chrétiens dans les pays en guerre, en Irak, en Syrie ou au Nigéria. Pour lui, la réponse à cette question réside dans la force unique de l’Evangile. Provoquer le bien par le bien est la responsabilité de chacun.

La variété des témoignages a été complétée par celui de Grégory Turpin, qui s’est exprimé en musique. Jeune converti, il passe un an au couvent à l’âge de 18 ans, puis le quitte pour raisons de santé et s’abîme dans le monde de la nuit. Libéré de ses addictions, Grégory témoigne par la musique de sa foi retrouvée. (apic/mp)


Encadré

Mgr Bruguès, la «mémoire du Vatican»

Ancien professeur de théologie morale à l’Université de Fribourg, Mgr Jean-Louis Bruguès a raconté, dimanche matin, à l’Auditorium B de Miséricorde, son cheminement personnel sur le thème «Aimer, c’est s’engager». Sans ambages, l’évêque dominicain a décrit les différents postes qu’il a occupés sans les avoir choisis. Pour ce passionné d’enseignement, le séjour à Fribourg (»douces années suisses») pendant deux ans et demi a été marquant, juste avant sa nomination comme évêque d’Angers.
De là, il passera à Rome comme secrétaire de la Congrégation pour l’éducation catholique (»1’500 universités dans le monde», rappelle-t-il avec fierté), puis sur demande du pape Benoît XVI aux Archives et à la Bibliothèque vaticanes. Fustigeant le sensationnalisme à la Dan Brown (Da Vinci Code), Mgr Bruguès a précisé la mission de cette institution romaine, au service de la mémoire de l’Eglise. Une mémoire de 87 kilomètres de rayonnage, unique au monde. Et même un pays communiste comme Cuba ou l’Eglise orthodoxe serbe, dont les archives ont été brûlées par les nazis, viennent aux Archives vaticanes pour reconstituer leur patrimoine mémoriel disparu.

Petit clin d’oeil à la Suisse, Mgr Bruguès a révélé que sa croix pectorale est une copie de la croix bordant l’autoroute A12 à la hauteur de Châtel-St-Denis… (apic/bl)

 

Ambiance rock pour Prier et Témoigner 2015 à Fribourg (photo Maurice Page)
8 novembre 2015 | 19:16
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 6 min.
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