Photo/INC./Flickr/CC BY-NC-ND 2.0)
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Birmanie: le pape veut renforcer les liens entre catholiques et bouddhistes

Face au conseil suprême Sangha, le 29 novembre 2017, le pape François a souhaité un renforcement des liens et des valeurs communes entre bouddhistes et catholiques. Après la messe avec les catholiques de Birmanie, il s’est rendu au Centre Kaba Aye, haut lieu du bouddhisme Theravada à Rangoun.

A son arrivée au centre bouddhiste, le pontife s’est déchaussé, comme le veut la coutume. Il a été accueilli par le ministre des Affaires religieuses et de la culture, Thura U Aung Ko, en raison des liens étroits entre l’Etat et le conseil bouddhiste Sangha. Autour du pape, la suite pontificale était assise en face des moines.

Affichant son intention de renforcer les liens d’amitié entre bouddhistes et catholiques, le pape a insisté sur leurs valeurs communes: la justice, la paix, la dignité fondamentale de chaque être humain. Mais aussi la famille, essentielle pour un «développement intégral» de la société.

Dans un pays où l’identité bouddhiste est constitutive du pays, le pontife a ensuite affirmé la nécessité de reconnaître que ces valeurs sont en dernière analyse «enracinées dans l’appartenance à une commune humanité». Au-delà donc de la culture et de l’appartenance ethnique et nationale.

Nationalisme bouddhiste

Le comité Sangha a récemment ordonné au mouvement nationaliste bouddhiste Ma Ba Tha, créé en 2014, de cesser ses activités, sous peine de poursuites. Ce parti prône la défense du bouddhisme et la pureté de la race birmane. Il a réussi à faire approuver une loi en 2015 sur les minorités religieuses, pour limiter les mariages interreligieux et les conversions.

Affirmer ces valeurs communes est d’autant plus important, a souligné le pontife, que les temps sont marqués par les conflits, les blessures, la pauvreté et l’oppression, créant de «nouvelles divisions» dans le pays. La récente crise des Rohingyas s’explique en partie par le rejet des musulmans de l’Etat d’Arakan de la part de la majorité bouddhiste, attisée par l’armée.

Mais il existe pour le pape une autre voie, fondée sur «la compassion et l’amour». Elle permet de dépasser l’incompréhension, l’intolérance et la haine.

S’ouvrir au transcendant

Pour cela, le grand défi, a poursuivi le pontife, est d’aider les personnes à s’ouvrir au transcendant. Etre capables de regarder profondément à l’intérieur de soi et de se connaître soi-même. Le pape a cité les paroles du Bouddha appelant à éliminer la colère, puis celles de la prière de saint François d’Assise: «Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix».

Le pontife a affirmé que l’Eglise catholique était un «partenaire disponible» pour la coopération nécessaire entre les leaders religieux, pour que ces efforts portent des fruits durables. Cela suppose en particulier de la part du pouvoir civil, a-t-il relevé, un esprit d’impartialité et de solidarité réciproque.

En Birmanie, les catholiques sont encore discriminés par la loi, même s’il existe des assouplissements. Il y a cinq ans, en décembre 2012, le cardinal Charles Bo, archevêque de Rangoon, s’était ainsi félicité que les catholiques puissent fêter Noël sans autorisation particulière.

Contrôle étatiste du bouddhisme

Le Centre Kaba Aye est un des temples bouddhistes les plus vénérés en Asie du sud-est. Il accueille le comité suprême étatique Sangha, qui regroupe 47 moines bouddhistes de haut rang, nommés pour 5 ans par le ministère des Affaires religieuses. Il a été institué en 1980 pour contrôler le clergé bouddhiste en Birmanie

Sur 51 millions d’habitants en Birmanie, plus de 87% sont bouddhistes, dont 500’000 moines et novices. Le bouddhisme Theravada est un des deux principaux courants de cette doctrine éthico-philosophique née au 6e siècle avant Jésus-Christ, qui a été élaborée par l’ascète indien Siddhartha Gautama, appelé le Bouddha – l’illuminé.

Les bouddhistes ont joué un rôle de premier plan dans l’indépendance birmane en 1948, avant de s’opposer au coup d’Etat militaire en 1962. S’est ensuivie une alternance de tentatives d’enrôlement des bouddhistes dans le régime, puis de répressions, comme en 1988. Depuis 2007, le bouddhisme est partie prenante de l’ouverture démocratique du pays. (cath.ch/imedia/ap/rz)

Photo/INC./Flickr/CC BY-NC-ND 2.0)
29 novembre 2017 | 12:32
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture: env. 3 min.
Birmanie (89), Bouddhisme (41)
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