Intérieur de l'église de Xishiku, à Pékin, Chine (Photo Wikimedia Commons, Peter17)
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Chine: 2015, l'année noire de la persécution religieuse

Selon des observateurs, 2015 a été l’une des pires années dans l’histoire de la Chine concernant les persécutions religieuses. Plus de 1’500 églises, durant les deux dernières années, ont notamment subi des actions de démolition dans la province orientale du Zhejiang, affirme l’agence d’information catholique Ucanews.

Après avoir déclaré que 2014 avait été la pire année en termes de persécutions religieuses en Chine depuis la Révolution culturelle, des observateurs à l’intérieur et à l’extérieur du pays ont indiqué que la situation s’était encore aggravée en 2015. Les relations entre les groupes religieux et le Parti communiste n’ont jamais été aussi tendues depuis le règne de Mao.

Dans les monastères tibétains, les religieux et religieuses se plaignent d’une ingérence de plus en plus quotidienne du Parti dans leurs affaires internes. Dans la province occidentale du Xinjiang, le port des habits et signes extérieurs religieux a été interdit.

Une répression qui renforce le christianisme?

«Les autorités ont perdu le cœur du peuple suite à la campagne de démolition des croix», indique une ancienne journaliste catholique habitant dans le Zhejiang, qui préfère rester anonyme.

Beaucoup pensent que les efforts du gouvernement provincial pour éliminer, depuis quelques années, les signes trop ostentatoires du christianisme ont provoqué l’effet non-désiré de renforcer la détermination des chrétiens et l’intérêt pour cette religion. Eglises d’Asie (EdA), l’agence d’information des Missions Etrangères de Paris, indiquait en tout cas fin décembre que le protestantisme connaissait en Chine un essor réel, bien que difficile à quantifier.

La campagne «a aidé le clergé à s’unir et à se battre pour ses droits», affirme John, catéchiste à Wenzhou, l’une des principales villes du Zhejiang. Alors que la campagne anti-croix montait en puissance vers le milieu de l’année dernière, des évêques ont, dans un geste assez rare, publiquement dénoncé les autorités.

Propagande à l’intérieur des églises

Même si la campagne de démolition des croix marque un fléchissement, les chrétiens locaux sont de plus en plus confrontés depuis quelques semaines à l’ingérence des autorités à l’intérieur même des églises. A Wenzhou, les chrétiens rapportent que des cadres du Parti participent aux offices du dimanche afin de faire taire les voix critiques. Dans d’autres localités du Zhejiang, les autorités ont posé des affiches de propagande à l’intérieur des édifices. Ces actions s’inscriraient dans le cadre d’une nouvelle campagne officielle intitulée «Cinq entrées et transformations», qui a pour but de «siniser» les églises, afin de les soustraire aux influences de l’étranger. Cette volonté de «sinisation» des religions a été exprimée en mai dernier par le président Xi Jinping en personne, dans un discours officiel.

100 millions de chrétiens?

Selon Ucanews, certains observateurs estiment le nombre de chrétiens en Chine à plus de 100 millions, en très grande partie protestants. Le Parti communiste tenterait ainsi d’instrumentaliser à ses propres fins cet essor chrétien. On ne sait cependant pas vraiment si cette politique vient du noyau-dur du Parti, et si elle va perdurer, commente Fenggang Yang, directeur du Centre sur la religion et la société chinoise, à l’Université de Purdue, dans l’Indiana, au centre des Etats-Unis.

Des officiels de haut-rang semblent être en désaccord avec l’idée selon laquelle le christianisme devrait être adapté à la Chine, assure la chercheuse. Et l’on ne verra pas de ligne politique précise avant la tenue d’une rencontre officielle sur la question de la religion, menée par le président Jinping.

Fenggang Yang explique que les nombreux reports de cette conférence est le signe de l’insatisfaction du président du travail et de la direction des affaires religieuses. Ce serait également l’indice d’une impasse dans les débats internes à ce sujet. (cath.ch-apic/ucan/rz)

 

Intérieur de l'église de Xishiku, à Pékin, Chine (Photo Wikimedia Commons, Peter17)
4 janvier 2016 | 10:25
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture: env. 2 min.
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