"C'est terminé. Je ne le reverrai plus. je vais bien. Il souffre plus que moi". Daniel Pittet (Photo: Kath.ch)
Suisse

Daniel Pittet et Joël Allaz: l'ultime rencontre

L’auteur de Mon Père, je vous pardonne, Payot 2017, a rencontré à nouveau Joël Allaz, l’ancien capucin qui a abusé de lui lorsqu’il était jeune. Une ultime rencontre le 16 août 2017, au couvent de Wil (SG), «que n’aurait jamais imaginée» Daniel Pittet il y a encore huit mois.

«Il y a huit mois, jamais je n’aurais imaginé cette rencontre!», lance Daniel Pittet. Au téléphone, la voix est sereine. L’auteur du livre Mon Père, je vous pardonne, Payot 2017, et victime du prêtre pédophile Joël Allaz a revu son bourreau, le 16 août dernier. Celui-ci a abusé de lui de 1968 à 1972. La rencontre s’est déroulée au couvent de Wil (SG) où l’ex capucin réside actuellement.

Un courrier au ton différent

A l’origine de cette rencontre improbable, le courrier que lui a adressé Joël Allaz il y a un mois. Une lettre, un mea culpa en vers et une photo ont touché Daniel Pittet. «Le ton était différent du courrier de 2004 et la lettre spontanée. Je me suis décidé à aller le saluer». il fait allusion au précédent courrier reçu du prêtre qu’il ne trouvait pas sincère. La démarche avait en effet été suggérée au capucin par sa hiérarchie.

Outre le courrier, Daniel Pittet justifie sa décision par le fait qu’il est très rare qu’un pédophile se reconnaisse coupable et accepte son état comme semble le faire son abuseur. «En général, ils n’avouent jamais et il est très difficile de les confondre». A l’entendre, la rencontre a été très cordiale. Daniel Pittet affirme n’avoir eu aucune appréhension en se rendant à Wil.

«Un gentil grand-papa»

«J’avais l’impression d’être avec un gentil grand-papa, poursuit-il. Lorsque vous parlez avec lui, vous n’imaginez pas une seule seconde tout ce qu’il a fait». Il l’a trouvé en meilleure forme que lors de leur dernière entrevue: «Il n’est pas du tout en train de mourir». Joël Allaz lui a parlé de sa vie, des cours donnés dans le cadre de la formation Galilée, des rencontres qu’il a faites au long de son ministère. «De cela, il a une excellente mémoire», relève Daniel Pittet.

La photo et internet

L’homme, il a été réduit à l’état laïc, a évoqué sa vie quotidienne: les promenades dans le jardin du couvent, la photographie dont il est passionné et internet qu’il utilise avec aisance. Il se tient au courant de toute l’actualité. «Mais il ne m’a pas demandé comment j’allais. Il est centré sur lui-même. En fait, il est dans son monde et heureux ainsi», analyse l’initiateur, en 2015, du succès de Aimer, c’est tout donner.

Il souffre plus que moi

Daniel a apporté à Joël Allaz un livre et des chocolats. La discussion s’est poursuivie. Le prêtre pédophile a confié à sa victime qu’il comprenait la décision de Rome de le réduire à l’état laïc. Il a en revanche «été choqué» lorsqu’on lui a signifié son éviction de l’ordre capucin. «Je me suis toujours senti capucin, c’était mon identité».

«Je suis content d’être allé le voir et de lui offrir ce livre, Fribourg vu du ciel», affirme-t-il. Une ultime rencontre pour solde de tout compte? «Oui, c’est terminé. Je ne le reverrai plus. Je vais bien. Il souffre plus que moi». (cath.ch/bh)


«J’ai péché contre toi»

L’ancien capucin Joël Allaz a écrit à Daniel Pittet une demande de pardon qui accompagnait un courrier et une photo.

 

Daniel,

J’ai péché contre toi.

Je t’ai trompé.

J’ai piétiné ton enfance.

j’ai abusé de ton innocence.

J’ai détourné ta soif d’amour.

Daniel,

je reconnais ma faute,

toutes mes fautes.

Devant toi,

je reconnais mon péché.

Et toi Daniel,

tu m’as déjà pardonné!

 

Joël

«C'est terminé. Je ne le reverrai plus. je vais bien. Il souffre plus que moi». Daniel Pittet
18 août 2017 | 15:24
par Bernard Hallet
Temps de lecture: env. 3 min.
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