Le Père Emmanuel, curé d'Ankawa - Ashti 2, devant une vue aérienne du camp de réfugiés (photo Maurice Page)
International

Erbil se prépare à accueillir des réfugiés chrétiens

Tant à l’est qu’au sud de la «zone de sécurité» que les Turcs sont en train d’installer avec violence au nord-est de la Syrie, les églises s’apprêtent à accueillir des réfugiés chrétiens… Encore une fois.

À Ankawa, le quartier chrétien d’Erbil, capitale du Kurdistan irakien, l’archevêque chaldéen-catholique, Mgr Bashar Warda, se prépare encore une fois à accueillir des milliers de réfugiés. Déjà en 2014-15, quand les terroristes de Daech avaient pris la ville de Mossoul puis pourchassé les chrétiens de la plaine de Ninive, Mgr Warda avait monté de vastes camps de containers pour protéger les familles de réfugiés du froid et de la neige.

Nouveaux flux de réfugiés

«Le nombre de réfugiés chrétiens en provenance de Syrie était déjà à la hausse depuis deux ans», explique Mgr Warda dans un communiqué parvenu à cathobel. Mais vu les combats autours des ville frontalières de Syrie ces derniers jours, il semble évident que de nouveau flux de réfugiés sont imminents. «Nous consacrons les mêmes soins dans l’accueil des réfugiés toute religion confondue», précise l’archevêque d’Erbil. «J’espère également pouvoir compter de nouveau sur les efforts d’hospitalité de la part des autorités régionales à Erbil et du gouvernement à Bagdad, mais surtout sur la solidarité de la communauté internationale. Pour éviter que les terres fragiles des minorités irakiennes – celles entre autres des chrétiens et des yézidis – souffrent de nouveau d’instabilité, il faut absolument pouvoir y remplacer les milices armées par des troupes régulières robustes.»

Pas de majorité kurde

Dans un entretien accordé à l’ONG ›Aide à l’Eglise en Détresse’, Mgr. Jacques Behnan Hindo, archevêque émérite syriaque-catholique de Hassaké-Nisibe, au nord-est de la Syrie, a rappelé qu’il insistait depuis longtemps auprès du parti kurde au pouvoir sur le territoire de son archidiocèse de ne pas brandir sans cesse leur identité kurde. «Les Kurdes ne représentent pas plus de 10% de la population», précise-t-il. L’autonomie dans la région est perçue en Occident – ainsi qu’en Turquie – comme une affaire uniquement kurde, tandis qu’il s’agit en fait d’une alliance des Kurdes avec les chrétiens et des Syriens arabes et turkmènes.

«Je savais que les Américains n’allaient pas sauvegarder les Kurdes contre d’un assaut turc. Les Kurdes vont tout perdre», prédit Mgr. Hindo, «comme ils ont déjà tout perdu quand des milices pro-Turcs ont pris Afrin.»  Mais ces combats n’iront pas sans graves ‘dommages collatéraux’. La ville de Qamishli, par exemple, date de 1925, quand il fallait trouver un lieu sécurisé pour abriter les survivants des génocides arméniens et assyriens par les Turcs à la fin de la Première Guerre mondiale. «Un grand nombre de ces chrétiens n’ont même pas la nationalité syrienne», dit Mgr Hindo. «Ils sont encore toujours Turcs ou Irakiens. S’ils sont encore une fois pourchassés, ils n’ont plus de droits ni d’avenir.» Un quart des catholiques de Qamishli ont déjà fui les dernières deux années. «Je sais qu’au moins cinq mille familles se précipitent maintenant vers Hassaké.»

Culpabilité de l’Occident

«Washington, Londres, Paris, Rome ou Berlin prônent sans cesse la démocratie, mais dans les faits, ils ne se préoccupent que de leurs propres intérêts, déplore Mgr Hindo. Si les droits de l’homme leur sont réellement aussi chers qu’ils le prétendent, où sont-ils maintenant? Leurs interventions affaiblissent nos régions, jamais ils ne nous renforcent. Les attaques des Turcs à Qamishli ont également affecté la prison de Chirkin, d’où se sont échappés plusieurs terroristes de Daech. Avec le soutien des Saoudiens et des Turcs, ces jihadistes vont encore terroriser nos régions, avant de se rendre en Europe pour y commettre des attentats sanglants.» (cath.ch/cathobel/mp)

Le Père Emmanuel, curé d'Ankawa – Ashti 2, devant une vue aérienne du camp de réfugiés (photo Maurice Page)
18 octobre 2019 | 14:20
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 2 min.
Partagez!