Etats-Unis: Le Père jésuite Thomas Reese démissionne de la revue «America magazine»

Suite à des plaintes du Vatican, selon des responsables jésuites

Washington, 9 mai 2005 (Apic) Le Père jésuite Thomas Reese, 60 ans, démissionne de la revue «America magazine», suite à des plaintes du Vatican, selon des responsables jésuites américains. Il a annoncé en fin de semaine qu’il quittait le magazine le 1er juin après sept ans comme rédacteur en chef de cet hebdomadaire catholique national basé à New York et édité par les jésuites des Etats-Unis.

Des responsables jésuites à Rome ont déclaré que le Père Thomas Reese, entré chez les jésuites en 1962, a démissionné de son poste au magazine «America» après des plaintes répétées du patron de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le cardinal Joseph Ratzinger – aujourd’hui Benoît XVI -, pas d’accord avec le traitement réservé par le magazine à des questions ecclésiales délicates.

Un bureau de censure exigé

Le Père jésuite José M. de Vera, porte-parole de la Société de Jésus à Rome, a déclaré que le Père Reese a décidé de démissionner après avoir fait le point de la situation avec ses supérieurs, à la suite de l’élection du cardinal Ratzinger au pontificat. Le Père de Vera dément que le Père Reese, docteur en sciences politiques de l’Université de Californie, à Berkeley, a été forcé de démissionner. Il a toutefois reconnu que la pression venait du Vatican, et cela depuis plusieurs années. Le cardinal Ratzinger avait parlé au supérieur général des jésuites, le Père Peter-Hans Kolvenbach, de ses «inquiétudes» au sujet des articles d’»America» à plusieurs occasions.

Les articles qui ont fait problème concernaient le document doctrinal du Vatican «Dominus Iesus» sur le Christ comme unique sauveur, le mariage de personnes du même sexe, la recherche sur les cellules souches embryonnaires et la réception de la communion par des hommes politiques catholiques soutenant l’interruption légale de la grossesse. La politique éditoriale du Père Reese était de présenter les deux côtés de la discussion au sein de la communauté catholique. «Mais cela ne plaisait pas aux autorités vaticanes», a souligné le Père de Vera dans une interview à l’agence de presse catholique américaine CNS.

Sur injonction de la congrégation pour la doctrine de la foi

Le jésuite pense que certaines plaintes venaient probablement de catholiques aux Etats-Unis mêmes et que la congrégation dirigée alors par le cardinal Ratzinger réagissait à ces plaintes. Il y a plus d’un an, le Père de Vera déclarait que la tension avait atteint un tel point que des responsables du Vatican avaient menacé d’imposer un bureau de censure au magazine s’il n’y avait pas de changements. A l’époque, le Père Reese et les jésuites avaient accepté de mettre sur pied une instance interne chargée de relire les articles avant leur publication. Malgré cet arrangement, les articles publiés par «America» ont continué de provoquer des plaintes du Vatican.

Le rédacteur en chef démissionnaire sera remplacé par le Père jésuite Drew Christiansen. Ce dernier travaille, à la demande du Père Reese, pour le journal depuis 2002 comme rédacteur en chef associé. Il est connu pour son travail sur l’enseignement social chrétien et les questions de justice internationale et de paix. Depuis que le Père Reese a pris les rênes d’»America magazine», l’hebdomadaire a augmenté son tirage et gagné en audience nationale.

Avant de venir travailler à «America magazine», le Père Christiansen enseignait au «Woodstock Theological Center» à l’Université de Georgetown. Il fut directeur du Bureau international pour la justice et la paix de la Conférence catholique des Etats-Unis – à ce titre, il fut souvent en mission dans les territoires en guerre, notamment dans les Balkans et au Moyen-Orient – et a travaillé comme conseiller pour les affaires internationales auprès des évêques américains jusqu’en décembre 2004.

Ce n’est pas la première fois que la Congrégation pour la doctrine de la foi a influencé des magazines dirigés par des congrégations religieuses. En 1997, le pape Jean Paul II avait nommé un évêque pour surveiller toutes les publications italiennes des Pères de St-Paul, y compris l’hebdomadaire «Famiglia Cristiana» tirant à plus d’un million d’exemplaires. Le journal avait notamment été sanctionné pour des articles en faveur de la communion pour les divorcés-remariés. (apic/cns/be)

9 mai 2005 | 00:00
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture: env. 3 min.
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