La rencontre du pape avec des adeptes du culte vaudou critiquée
Jean Paul II au Bénin: sous le signe de la cohabitation (050293)
Cotonou, 5février(APIC) C’est une journée placée sous le signe de la cohabitation que Jean Paul II a vécue jeudi, en s’adressant successivement
aux musulmans et aux adeptes du culte vaudou. Avec deux idées centrales: la
liberté religieuse est un droit inaliénable; chrétiens, musulmans et adeptes des religions traditionnelles doivent unir leurs efforts pour construire une société basée sur la justice sociale, les valeurs morales, la liberté et la paix.
A Parakou, au nord du Bénin, la cohabitation entre chrétiens et
musulmans ne pose en général pas de problème. C’est qu’ils «regardent dans
la même direction et cultivent les mêmes valeurs de paix et de tolérance»,
explique l’imam Ligali Issiaka. Puisque, comme le dit le Coran, les
chrétiens sont «les plus proches» des musulmans, le chemin est tout
indiqué: «entretenir l’amitié par un dialogue franc et sincère».
Jean Paul II approuve: «Personne ne s’étonnera que des frères, croyant
en un seul Dieu, désirent mieux se connaître et partager leur expérience».
Et de signaler sur quoi doivent porter le dialogue et la collaboration: la
prière, la place de la famille, la préoccupation commune pour la paix,
l’élimination de la pauvreté…
Au cours de la messe célébrée au stade de Parakou, Jean Paul II s’est
spécialement adressé à la jeunesse: «Chers jeunes, je voudrais qu’en vous
mettant à l’écoute du Christ vous appreniez à devenir des hommes et des
femmes responsables. En effet, ne peut-on pas dire que le milieu africain
tend parfois à dissoudre les responsabilités individuelles dans une mentalité de groupe? Pour plus de progrès, il faut que se développe une vraie
conscience professionnelle. (…) Aimez l’effort et le travail. Luttez contre le parasitisme dont la société africaine est souvent victime aujourd’hui. (…) Enfin, n’ayez pas peur. Sachez que, grâce à votre foi
chrétienne, vous appartenez à un peuple victorieux. (…) Pour dominer cette peur, il faut que s’instaure un climat de liberté où chacun et chacune
puisse s’épanouir et exprimer toute sa créativité».
Ce que le christianisme apporte en plus et non en moins…
Dans l’après-midi de jeudi, de retour à Cotonou pour y rencontrer les
représentants des adeptes du culte vaudou, Jean Paul II a plaidé en faveur
de la liberté religieuse: «L’Eglise considère la liberté religieuse comme
un droit inaliénable, un droit qui s’accompagne du devoir de rechercher la
vérité». Le Bénin est, avec le Nigéria en Afrique, les Antilles et Haïti en
Amérique, l’un des berceaux historiques du vaudou. 60% des Béninois sont
restés adeptes des religions traditionnelles, dont un quart est représenté
par le vaudou.
Cette rencontre du pape avec des représentants du culte vaudou a suscité
quelque irritation dans l’Eglise béninoise, qui craignait une tentative de
récupération. Jean Paul II, en effet, est accueilli avec chaleur par des
hôtes qui plaident d’emblée en faveur de la cohabitation. Le chef Sossa
Quéhéhungué lui explique que son fils lui-même va bientôt devenir prêtre
catholique. Il ajoute: «La tendance actuelle de mettre toutes les religions
dans une vaste synthèse me paraît aller dans le sens de l’histoire». Discours ambigu, surtout quand il jure que «le vaudou n’a rien à voir avec le
diable et satan: c’est un Dieu qui sert le but final du culte», et signale
que «des milliers d’amis vont à l’Eglise le dimanche et trouvent ainsi leur
chemin de Damas…»
Dans sa réponse, Jean Paul II expose calmement sa démarche: «Le Concile
Vatican II a reconnu que dans les diverses traditions religieuses, il y a
du vrai et du bon, des semences de Verbe». Il explique ensuite ce que le
christianisme apporte en plus et non en moins: «Les ancêtres de ces missionnaires venus d’Europe avaient eux-mêmes reçus l’Evangile alors qu’ils
avaient déjà une religion et un culte. En recevant le message de Dieu, ils
n’ont rien perdu». (apic/cip/pr)