En février 2018, en signe de protestation, les Eglises avaient fermé la basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem  Photo:  wikimedia commons Berthold Werner CC BY-SA 3.0
International

Jérusalem: les Eglises dénoncent la volonté confiscatoire de l'Etat israélien

Les chefs des Eglises grecque orthodoxe, arménienne et catholique à Jérusalem dénoncent «une attaque systématique et sans précédent contre les chrétiens de Terre Sainte» portée par le gouvernement israélien, rapporte le 19 juin 2018 terrasanta.net, le site de la Custodie franciscaine de Terre Sainte.

Les Eglises qui partagent la garde du Saint-Sépulcre à Jérusalem ont écrit au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le pressant de bloquer un projet de loi qui autoriserait l’Etat à saisir des terres vendues par les Eglises.

Projet de loi qualifié de «scandaleux»

Elles qualifient ce projet de loi de «scandaleux», estimant ce texte violerait «les droits les plus élémentaires» et saperait «le délicat tissu de relations» construit il y a des décennies entre les communautés chrétiennes locales et l’Etat hébreu.

Les responsables des Eglises arménienne, grecque orthodoxe et catholique à Jérusalem craignent qu’un tel projet de loi ne nationalise les terres qu’elles vendent. Comme l’annonce l’agence d’information vaticane Fides, ils demandent expressément au Premier ministre israélien de bloquer «rapidement et de manière décisive» ce projet de loi.  Le courrier des trois Eglises est parvenu au chef du gouvernement israélien le 18 juin 2018.

Censé être suspendu, le projet de loi continue pourtant son bonhomme de chemin dans les arcanes parlementaires. De fait, d’après Fides, les trois signataires ont eu vent, par les médias locaux, du fait que le projet n’avait pas été «archivé» et était «sur le point d’être soumis au Comité ministériel pour approbation future».

Duplicité

C’est pourtant le contraire qui avait été annoncé en février dernier suite à la fermeture du Saint-Sépulcre, du 27 au 29 février. Ainsi, dans leur courrier, les trois Eglises à Jérusalem ne manquent pas d’accuser les autorités israéliennes de ne pas avoir respecté l’engagement pris il y a quatre mois. Le gouvernement israélien avait alors, notamment, annoncé la suspension de l’examen de cette proposition de loi.

Rachel Azaria, députée du parti centriste Koulanou (»nous tous»), membre de la coalition gouvernementale, est à l’origine d’un texte rédigé après les révélations, l’été dernier, que le patriarcat grec orthodoxe avait vendu certaines parcelles de terrain à Jérusalem à des investisseurs anonymes.

Hostilité déclarée «de certains éléments» contre les chrétiens

Les Eglises ont vu dans cette première version une atteinte à leurs droits de vente et donc de propriété. C’est pourquoi, elles avaient vivement réagi cet hiver. Elles avaient alors déclaré que la proposition de loi impacterait négativement sur leurs droits à acheter et à vendre des terrains – leur seule source réelle de revenu – et qu’elle constituerait une menace pour le statu quo entre l’Etat et les institutions non-juives.

Les Eglises estiment que «certains éléments au sein du gouvernement israélien tentent toujours de promouvoir la division et le racisme, sapant ainsi le statu quo en ciblant la communauté chrétienne sur la base de considérations étrangères et populistes».

Protéger des spéculations immobilières ?

Selon Rachel Azaria, le projet de loi ne viserait pas les Eglises mais aurait pour seul objectif de protéger de spéculations immobilières les centaines de résidents vivant dans des quartiers tels que Rehavia, Talbieh et Nayot à Jérusalem. Les terrains sur lesquels ils vivent étaient jusqu’à récemment la propriété de l’Eglise, principalement de l’Eglise grecque orthodoxe. Cette dernière est le deuxième propriétaire terrien le plus important du pays après l’Autorité des terres d’Israël.

L’Eglise orthodoxe loue ses terres sous la forme de baux emphytéotiques (baux immobiliers de très longue durée), signés dans les années 1950 entre l’Eglise et l’Etat, via le Fonds national juif. Ces contrats établissent qu’à expiration du bail, toutes les habitations construites sur ces terrains reviennent à l’Eglise. Or, les résidents s’attendaient à ce que ces baux soient prolongés. Mais ces dernières années, l’Eglise grecque orthodoxe a vendu de vastes terrains immobiliers à des investisseurs privés dont on ignore s’ils renouvelleront les baux une fois ceux-ci arrivés à terme – certains prennent fin d’ici 18 ans – et, si c’est le cas, sous quelles conditions.

Les résidents vivant dans ces maisons craignent de fait que les promoteurs privés en achetant aux Eglises, soient libres de faire ce qu’ils veulent avec leurs biens, y compris l’augmentation des loyers ou la démolition du bâti existant. (cath.ch/terrasanta/be)

 

En février 2018, en signe de protestation, les Eglises avaient fermé la basilique du Saint-Sépulcre de Jérusalem Photo: wikimedia commons Berthold Werner CC BY-SA 3.0
19 juin 2018 | 16:33
par Jacques Berset
Temps de lecture: env. 3 min.
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