Déjà 60 églises et monastères détruits malgré la KFOR

Kosovo: Les extrémistes albanais détruisent à nouveau un monastère orthodoxe historique

Belgrade, 17 septembre 1999 (APIC) Les extrémistes albanais ont détruit à nouveau un monastère orthodoxe historique, le couvent de Zociste datant du XIVème siècle, allongeant ainsi la liste des sanctuaires de l’Eglise orthodoxe rasés par des militants désireux de faire tabula rasa d’une présence culturelle serbe multiséculaire. Selon le patriarcat orthodoxe de Belgrade qui a communiqué la nouvelle jeudi, plus de 60 églises et monastères ont déjà été détruits depuis l’arrivée des militaires occidentaux de la KFOR en juin dernier.

Le monastère de Zociste, situé près de la ville d’Orahovac, au sud-ouest du Kosovo, contenait des fresques historiques remarquables, rappelle l’Eglise orthodoxe. Au début de la semaine, l’église du couvent a été dynamitée. Les moines avaient déjà dû fuir Zociste en compagnie de 200 habitants serbes quand les milices de l’UçK ont attaqué le village à la fin juin. Toutes les maisons avaient alors été pillées et incendiées. Seule l’église des Saints Côme et Damien était restée debout, mais elle a été rasée au sol l’après-midi du 13 septembre. Les fresques de Zociste, notamment la présentation des prophètes de l’Ancien Testament, étaient réputées loin à la ronde.

Mgr Artemije, l’évêque orthodoxe serbe du Kosovo, déclare avoir pourtant reçu des assurances de la part des officiers de la KFOR que les troupes envoyées au Kosovo protégeraient les églises d’une grande valeur historique. Mais ce ne fut visiblement pas le cas à Zociste, où les soldats danois de la KFOR n’étaient même pas au courant de l’attentat qui venait de se passer. Mgr Artemije et le métropolite monténégrin Amfilohije ont présenté jeudi aux évêques serbes rassemblés à Belgrade une ample documentation sur la destruction des lieux de cultes serbes par les Albanais du Kosovo depuis l’arrivée des troupes de la KFOR.

Silence des Européens dénoncé

Le président de l’Académie des sciences de Serbie, le professeur Dejan Medakovic, a pour sa part dénoncé en termes sévères «le silence de l’Europe centrale» face à la destruction des édifices religieux orthodoxes au Kosovo. Historien de l’art, D. Medakovic est membre de la commission d’historiens pour les Balkans mise en place par la fondation ecclésiale «Pro Oriente» à Vienne, en collaboration avec le cardinal croate Franjo Kuharic et le patriarche Pavle de Belgrade, chef de l’Eglise orthodoxe serbe. Pour le professeur serbe, on note en Europe une indifférence effrayante à l’égard des racines chrétiennes de la culture du continent européen.

Une véritable «épuration ethnique» contre la minorité serbe, selon Mgr Artemije

L’évêque Artemije a mis en garde contre la proposition de transformer les milices de l’UçK en une sorte de troupe de protection armée au Kosovo. Il ne s’agit à ses yeux que d’une manœuvre pour échapper au désarmement qui devrait être achevé le 19 septembre. L’UçK peut bien devenir une organisation civile ou un parti politique, mais si elle devait rester armée, elle mènera jusqu’au bout sa politique «d’épuration ethnique» contre ce qui reste de la population serbe dans la province à majorité albanaise, insiste l’évêque orthodoxe du Kosovo.

Les observateurs notent que l’UçK, malgré les assurances officielles mais peu convaincantes des responsables de la KFOR, est loin d’avoir désarmé, et qu’elle maintient des caches d’armes clandestines. Selon l’Eglise orthodoxe, contrairement à ce qu’affirme l’OTAN à Bruxelles, les violences et assassinats contre la petite minorité serbe restée au Kosovo n’ont pas baissé d’intensité. Malgré la présence des troupes de la KFOR, des cimetières orthodoxes sont la proie des vandales, des bandes armées pillent et incendient les maisons, des grenades et des obus de mortiers sont tirés contre les villages où sont restés les serbes, affirme l’Eglise orthodoxe à Belgrade.

Appel du patriarche Pavle «au monde chrétien et civilisé»

Dans un «appel au monde chrétien et civilisé», le patriarche Pavle relève qu’il est affligeant d’apprendre qu’en cette époque de Grand Jubilé Chrétien, à la fin de deux millénaires de christianisme, des églises chrétiennes continuent d’être détruites «pas dans une guerre, mais en temps de paix garantie par la communauté internationale!»

Le chef de l’Eglise orthodoxe serbe espère que la vue des églises orthodoxes dynamitées et des lieux de culte profanés vont éveiller la conscience de ceux qui sont à même de stopper ces crimes commis en leur présence. Le patriarche Pavle lance également un appel à la partie des Albanais du Kosovo qui voient raisonnablement leur avenir dans une coexistence avec les Serbes. Il leur demande de «résister et de prévenir ces actes de folie». Et de souligner qu’il n’y aura pas de victoire de l’humanité et de la justice au Kosovo si la vengeance et le désordre prévalent. «Personne n’a moralement le droit de célébrer la victoire avec satisfaction tandis qu’un mal est remplacé par un autre mal, et que la liberté d’un peuple devient l’esclavage d’un autre».

Le «Kosovo Corps» ne devrait pas devenir un embryon d’armée

L’UçK ne cache pas son ambition de devenir une véritable armée dans un Kosovo indépendant, ce qui serait contraire à tous les engagements internationaux de ne pas démanteler la Serbie pris par les puissances qui sont intervenues au Kosovo. En attendant, l’ONU et l’OTAN ont commencé à recruter des hommes pour composer la nouvelle «force de défense civile» pour le Kosovo, appelée «Kosovo Corps». Cette force de 5’000 hommes, destinée à des tâches de défense civile (désastres naturels et autres urgences), devrait intégrer de nombreux anciens combattants de l’UçK. Cette dernière espère en faire l’embryon de sa future armée, raison pour laquelle elle n’est pas prête à remettre l’entièreté de son arsenal d’ici le 19 septembre. Près de 200 membres du «Kosovo Corps» seront armés, mais la KFOR a mis en garde: c’est elle seule qui restera responsable du maintien de l’ordre dans la province. (apic/bbc/kap/be)