Le Père jésuite syrien Ziad Hilal témoigne à Fribourg du martyre de la ville d'Alep

Sauvons Alep La grande inscription surmontant l’entrée de la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg, ce dimanche 30 octobre 2016, était un appel pressant à se solidariser avec la ville martyre du nord de la Syrie.   

Pour attirer l’attention des fidèles sur le sort dramatique de cette grande métropole qui a déjà perdu la moitié de sa population en raison des combats, l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT) avait invité à Fribourg le Père Ziad Hilal, un jésuite syrien qui vit désormais à Alep (*).

Plus de la moitié des chrétiens ont quitté le pays

Après six ans passés dans la ville syrienne de Homs, également très affectée par la guerre, et une année de formation jésuite à Dublin, le Père Ziad Hilal travaille depuis le 1er septembre à Alep, en tant que consultant pour le JRS, le service jésuite des réfugiés, et l’Aide à l’Eglise en Détresse (AED). Au cours de la messe présidée par Mgr Alain de Raemy, le jeune jésuite a témoigné des souffrances quotidiennes des Alépins, qui ne voient pas venir à l’horizon une paix tant espérée.

«La ville est privée d’électricité depuis trois ans, l’eau arrive de temps en temps… Les chrétiens étaient 120’000 avant la guerre, ils ne sont plus que 40’000 aujourd’hui, déplore le jésuite. Deux évêques orthodoxes – les métropolites Gregorios Yohanna Ibrahim et Boulos Yazigi ont été kidnappés par les djihadistes le 22 avril 2013; d’autres prêtres ont été enlevés, et on n’a plus aucune nouvelle d’eux. Les chrétiens, qui formaient le 12% de la population syrienne, ne sont plus que 5 ou 6%, plus de la moitié ont quitté le pays». Mais les musulmans qui le peuvent quittent aussi le pays en masse.

Le pays connaît une véritable hémorragie

Le Père Ziad déplore qu’après 5 ans de combats, des négociations à Genève, Moscou ou Istanbul, la communauté internationale n’arrive pas à faire cesser une guerre qui a déjà fait plus de 300’000 morts et à imposer enfin la paix. Le pays connaît une véritable hémorragie: 5 millions de Syriens ont déjà cherché refuge à l’extérieur du pays, et 5 ou 6 autres millions sont des déplacés internes. Plus de la moitié des Syriens ont besoin d’aide.

 Le Père Ziad Hilal et Mgr Alain de Raemy à la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg (Photo: Jacques Berset)
Le Père Ziad Hilal et Mgr Alain de Raemy à la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg (Photo: Jacques Berset)

Les Eglises et les associations chrétiennes, comme le JRS ou Caritas Syria, sont très actives et viennent en aide à la population, dans la mesure de leurs moyens, et sans faire de distinctions entre chrétiens et musulmans.  »Nous servons chaque jour 10’000 repas chauds pour la population, et fournissons également 10’000 paniers sanitaires», relève le Père Ziad. «Les chrétiens à Alep, jusqu’à aujourd’hui, résistent. Ils sont un pont entre les communautés.  Le pape François nous encourage, et en citant les chrétiens du Moyen-Orient, il a parlé d’une Eglise de témoins et de martyrs. C’est par ailleurs en Syrie que les disciples du Christ ont été appelés chrétiens pour la première fois».

Plus d’un million d’enfants réclament la paix

Le jésuite, originaire d’un village du Hauran, une région de la Syrie méridionale, a demandé aux fidèles présents dans la cathédrale Saint-Nicolas de prier pour que la paix advienne enfin dans son pays. Pour cette paix, plus d’un million d’enfants musulmans et chrétiens ont réalisé   des dessins et écrit des messages qui ont été remis, à la mi-octobre, par les principaux leaders chrétiens de Syrie, à Bruxelles aux responsables de l’Union européenne (UE), et à Genève  au Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et au Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. L’espoir ? Il le voit dans la collaboration entre musulmans et chrétiens, qui se vit quotidiennement dans les quartiers, les associations caritatives et les œuvres d’entraide.

«Le problème n’est pas entre les religions, il est politique. Les bombes, quand elles tombent sur les quartiers, ne choisissent pas leurs victimes selon leur appartenance religieuse. Tous souffrent, les bombes ne font pas de différence! Cette guerre a des causes intérieures et extérieures; il y a des responsabilités syriennes, mais aussi des interventions étrangères de divers côtés qui alimentent la poursuite de la guerre. Nous devons sensibiliser la communauté internationale pour mettre fin à cette tragédie. La voie des armes n’a apporté que mort et destruction, la seule sortie possible de cette profonde crise qui détruit le pays et sa population est la négociation!» (cath.ch-apic/be)

(*) La périphérie ouest d’Alep subit depuis vendredi dernier l’assaut d’une coalition de rebelles islamistes et de jihadistes, dont les roquettes et les voitures piégées ont causé dimanche la mort d’au moins 38 civils, selon l’AFP.

Le Père Ziad Hilal a lancé un appel pour sauver Alep à la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg
30 octobre 2016 | 19:07
par Jacques Berset
Temps de lecture: env. 3 min.
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