Le président mexicain pour des excuses de l’Eglise aux peuples natifs

Le président mexicain Andrés Manuel López Obrador (AMLO) invite le pape à demander pardon pour la colonisation de l’Empire aztèque et le traitement des indigènes. Ce serait un acte «d’humilité et de grandeur» de la part de l’Eglise de réhabiliter en outre le Père Miguel Hidalgo y Costilla, considéré comme le «père de l’indépendance mexicaine», excommunié et exécuté par le pouvoir colonial espagnol le 30 juillet 1811.

Dans une lettre, AMLO a notamment encouragé le pape François à présenter ses excuses au nom de l’Eglise catholique aux peuples indigènes, à l’occasion des 500 ans de la conquête du Mexique, a relayé l’homme politique sur son compte Twitter le 10 octobre 2020.

Sa missive, qui contenait d’autres demandes, a été apportée le même jour au pontife argentin par l’épouse d’AMLO,  Beatriz Gutiérrez Müller, reçue en audience privée.

Demande de prêts de documents des Musées du Vatican

La femme du président mexicain a été reçue par le pontife dans les appartements pontificaux. Elle a apporté une lettre de son mari demandant officiellement le prêt pendant un an de plusieurs codex précolombiens et cartes anciennes de Tenochtitlan – la capitale de l’empire aztèque, ancêtre de Mexico – qui font partie de la collection des Musées du Vatican. Le Mexique souhaite notamment le prêt du Codex Borgia et le Codex Vatican de la culture Nahuatl et de la culture Toltèque-Chichimèque.

Ces documents doivent servir à des expositions exceptionnelles à l’occasion du 500e anniversaire de l’invasion espagnole, qui se trouve être aussi le 700e anniversaire de la fondation de la capitale aztèque et le 200e de l’indépendance mexicaine, les trois événements devant être célébrés en 2021.

Les atrocités les plus honteuses

De plus, Andrés Manuel López Obrador a demandé au pontife argentin de saisir cette occasion pour présenter au nom de l’Eglise catholique, aux côtés du gouvernement mexicain et de la monarchie espagnole, «des excuses publiques aux peuples natifs qui ont subi les atrocités les plus honteuses afin de piller leurs biens et leurs terres et de les soumettre».

La «Conquista», la conquête du Mexique par les troupes de Hernan Cortès entre 1519 et 1521 a été particulièrement sanglante, et la population indigène a par la suite beaucoup souffert de maladies et de mauvais traitements. Le président demande que l’on demande pardon pour les souffrances infligées jusqu’à maintenant aux peuples autochtones du Mexique et que l’on respecte désormais, «dans un engagement sincère», leurs croyances et leurs cultures, refusant leur marginalisation pour des motifs économiques ou de racisme.

Vers la réhabilitation de deux prêtres nationalistes «rebelles» ?

La demande du président AMLO survient dans un contexte de fortes tensions identitaires au Mexique autour de la mémoire nationale. Une statue de Christophe Colomb a été enlevée par le gouvernement de la capitale Mexico deux jours avant la tenue d’un événement appelé «Nous allons la démolir», organisé par des militants le 12 octobre, jour anniversaire de la découverte de l’Amérique en 1492.

Le président mexicain a rappelé le rôle décisif joué par «deux prêtres bons et rebelles» lors de la libération du pays au début du 19e siècle: le Père Miguel Hidalgo y Costilla, considéré comme le «père de l’indépendance mexicaine», et le Père José Maria Morelos y Pavon. Tous les deux ont été exécutés par le pouvoir espagnol pour leur combat indépendantiste et leur refus de l’oppression des propriétaires terriens.

Avant sa mort, le Père Hidalgo avait été excommunié par l’Inquisition pour ses positions libérales. Le président mexicain a encouragé le pape François à réhabiliter ce héros de la nation mexicaine: «seule votre sensibilité pourrait comprendre la transcendance d’un tel acte de contrition historique». Le Saint-Siège, comme à son habitude, n’a pas communiqué sur l’audience privée. (cath.ch/imedia/cd/be)