Le Vatican précise sa doctrine économique

Le cardinal Peter Turkson, préfet du Dicastère pour le développement humain intégral, et Mgr Luis Ladaria Ferrer, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, ont présenté ensemble le 17 mai 2018 le document Œconomicae et pecunariae questiones (Questions économiques et financières). Ce texte vise à donner une «solide vision anthropologique» à l’activité économique, a relevé Mgr Ladaria.

La Congrégation pour la doctrine de la foi, a reconnu son préfet, publie généralement des documents sur la morale sexuelle ou bioéthique. Mais l’économie, a-t-il poursuivi, fait partie de la vie et doit obéir à la morale. En tant que gardienne de cette dernière, la Congrégation peut donc aider l’économie à s’orienter sur la base d’une éthique adéquate.

Ce document n’a pas été voulu par le pape François lui-même, mais il l’a soutenu, a précisé Mgr Ladaria. Après l’habituelle consultation d’experts, ce document a été approuvé par la session ordinaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Puis, le pontife a donné son accord.

Cette réflexion, a pour sa part déclaré le cardinal Turkson, prolonge mais ne se substitue pas à la ‘Note pour une réforme du système financier et monétaire international dans la perspective d’une autorité publique à compétence universelle’ de 2011. Elaborée par le Conseil pontifical Justice et Paix, alors présidé par le même cardinal Turkson, cette note avait suscité des remous au Vatican, le Saint-Siège ne voulant pas s’associer à la revendication d’une autorité publique universelle.

«Myopie anthropologique»

La valeur magistérielle de Œconomicae et pecunariae questiones, nécessite l’adhésion des catholiques, a par ailleurs noté Mgr Ladaria. Le préfet note néanmoins que le document n’est pas infaillible, n’étant pas issu «directement de la Révélation». Il laisse donc la place à l’interprétation notamment sur des points précis.

Pour le préfet de dicastère, ce document vise à identifier l’origine de la propagation des pratiques financières malhonnêtes et prédatrices. A savoir l’existence d’une «myopie anthropologique et une crise progressive de l’être humain». L’homme, selon lui, «ne sachant plus qui il est, ni ce qu’il fait dans le monde», agit au gré des intérêts qui dominent le marché.

L’amour du bien intégral

Il convient donc de redire, à travers ce document, que l’amour du bien intégral de l’homme est la clef d’un authentique développement économique. Ainsi la légitimité du système ne s’observe pas seulement par la simple croissance quantitative des échanges, mais par l’épanouissement de l’homme qui en découle. Seule cette vision peut permettre de considérer le prochain, non pas comme un concurrent, mais comme un allié.

Pour l’économiste Leonard Becchetti, contributeur de ce document, l’objectif n’est donc pas de «déconstruire» le système financier mais d’en libérer tout le potentiel au bénéfice de tous les individus. Ce texte ambitionne en particulier de lutter contre «un monde de profits sans prospérité». Pour l’économiste, la mauvaise distribution des richesses s’avère être l’un des principaux obstacles. C’est pourquoi, a-t-il estimé, la réponse adéquate consisterait à intensifier la régulation, en particulier des transactions financières parallèles. (cath.ch/imedia/ah/mp)

Le cardinal Peter Turkson, préfet du dicastère pour le service du développement humain intégral |© Jacques Berset
17 mai 2018 | 14:33
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 2 min.
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