Les clarisses d'Arundel se lançaient pour la première fois dans la production musicale | capture d'écran youtube
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«Lumière pour le monde»: les voix des clarisses d'Arundel au top

«Light For The World» (lumière pour le monde), le premier album enregistré par les clarisses d’Arundel, caracole en tête des classements musicaux britanniques. «Savoir que nous avons touché tant de cœurs ouvre grand les nôtres et les remplit de joie», disent les religieuses.

Seize titres, enregistrés chez Decca en 2020, avec des chants grégoriens, des hymnes, des prières de saint François et de Sainte Claire sur des mélodies électroniques, ont capté l’attention notamment des jeunes. «Ce qui nous étonne le plus, ce n’est pas le nombre d’exemplaires vendus, mais le nombre de personnes impliquées. Savoir que nous avons touché tant de cœurs ouvre grand les nôtres et les remplit de joie», disent les religieuses interrogées par l’agence catholique italienne SIR.

L’accueil de l’album est la plus grande surprise pour les sœurs du couvent du Sussex. Cette production est en effet leur première incursion dans l’enregistrement de musique. Cet album comprend des pièces qui ont été une source constante de réflexion et de guérison pour elles, et désormais pour beaucoup d’autres aussi.

De la tranquillité monastique à la clameur de la célébrité

Une véritable révolution s’est produite en quelques semaines pour les vingt-trois moniales clarisses d’Arundel, une localité de quatre mille âmes situé dans la campagne anglaise du Sussex, à 100 km au sud-ouest de Londres. Les religieuses sont passées de l’anonymat absolu à la célébrité par l’album «Light For The World»

Sorti en octobre 2020, au Royaume-Uni, l’album a instantanément atteint la première place du classement de la musique classique, puis la cinquième place du classement pop avant de conquérir la moitié du globe. «Nous ne nous attendions pas à de tels résultats», admet Sœur Gabriel.

Cela dit le succès n’est pas monté à la tête des religieuses. «A part les interviews, notre vie n’a pas changé du tout. Notre quotidien est le même depuis la naissance du couvent en 1886, selon la règle de Sainte Claire de 1253: nous nous réveillons à 5h30 (une demi-heure plus tôt en été), prenons le petit-déjeuner et nous consacrons à une heure de méditation pour trouver notre centre intérieur. Ensuite, nous nous réunissons en prière dans la chapelle où, deux fois par semaine, nous célébrons la messe.

Le reste de la journée est consacré au travail, notamment à la cuisine, au jardinage et à la direction spirituelle, que nous proposons désormais via Zoom. Le déjeuner et le dîner sont passés en silence pendant qu’une sœur lit des textes religieux à haute voix. Trois fois par semaine, nous avons une pause dans l’après-midi pour discuter librement et rattraper les affaires personnelles.»

Beaucoup d’intentions de prières

Sœur Géraldine-Marie d’origine française nuance: «Le temps que nous consacrons à la correspondance, qu’elle soit traditionnelle ou en ligne, est très différent: depuis la sortie de l’album, les lettres et les courriels ont augmenté de façon exponentielle, surtout les demandes de prière. Les personnes qui nous écrivent recevront une réponse: nous leur demandons seulement un peu de patience en attendant.

Les clarisses d’Arundel aiment chanter | capture d’écran Youtube

Nous sommes heureuses de savoir que nous avons fait participer des jeunes, attirés par le son moderne des claviers et des synthétiseurs et par la spiritualité des paroles: leur âme a soif d’amour. Les jeunes, cependant, ne nous contactent pas directement, l’écriture est presque contre nature pour les dernières générations. Ils interagissent sur YouTube, plus pratique et immédiat.»

Un effort exigeant aux plans physique et mental

L’enregistrement de l’album a lui aussi modifié la routine quotidienne. «C’est vrai. Après mûre réflexion, nous avons donné confirmation aux producteurs et compositeurs James Morgan et Juliette Pochin, à l’origine de la proposition, poursuit sœur Gabriel. Et pour cause: le projet s’est avéré très exigeant sur le plan physique et mental. Si, au départ, nous avions posé comme condition préalable la participation de toutes – de 47 à 93 ans – nous nous sommes vite rendu compte que certaines sœurs n’avaient pas l’énergie nécessaire pour participer. La moitié d’entre nous a activement rejoint la chorale: le disque a pris six mois à réaliser, et nous l’avons terminé en mars 2020.»

Le couvent des clarisses à Arundel, dans le Sussex | wikimedia commons CC-BY-SA-2.0

Pour la religieuse, la coïncidence avec le début de la pandémie de coronavirus est un signe. Le titre lumière pour le monde résume parfaitement l’essence de l’album. «Nous n’avions certainement pas l’objectif de devenir célèbres: nous voulions seulement montrer notre réalité et laisser une sorte d’héritage à la communauté et aux amis. L’intention était de donner un moment de paix, de sérénité et d’espoir.»

Les mesures de sécurité, principalement l’isolement forcé ont touché tout le monde. «Le virus a créé une détresse psychologique générale, même pour ceux qui n’ont pas été touchés par la maladie. Parmi les problèmes qui se sont posés, il y a la difficulté de dormir. Depuis le19 mars, à l’occasion de la Journée du sommeil, une version spéciale du disque est disponible, d’une durée de 8 heures – divisée en sections Vespera, Nocte, Aurora et Lux – qui suit les phases de repos.»

Croire en la vie

Les moniales n’ont pas l’impression de remplir une nouvelle mission.»Non, la responsabilité reste la même: prier pour les personnes et pour toute l’humanité», commente sœur Géraldine-Marie. ‘Le chant appartient à ceux qui aiment’ écrivait Saint Augustin. L’album est un outil avec lequel nous pouvons nous connecter avec ceux qui souffrent et aider les autres. Sur le plan matériel, nous reverserons l’intégralité du produit des ventes à des œuvres caritatives.»

«Nous devrons faire face à d’autres jours compliqués et angoissants. Dans notre passion, laissons-nous guider par Jésus-Christ: la crucifixion, point culminant du supplice, l’a conduit à la résurrection. Lorsque nous sommes désespérés, affligés et fatigués, son expérience d’homme nous apprend à ne pas nous rabaisser, à croire en la vie et en un endroit meilleur. Confiant que, dans les mains du Seigneur, tout ira bien». (cath.ch/sir/mp)

Les clarisses d'Arundel se lançaient pour la première fois dans la production musicale | capture d'écran youtube
7 avril 2021 | 17:00
par Maurice Page
Temps de lecture: env. 4 min.
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