Mossoul: Première messe de Noël dans la ville libérée de Daech

Les cloches ont sonné pour la messe de Noël dimanche 24 décembre, pour la première fois depuis trois ans, à l’église Saint-Paul, dans la ville irakienne de Mossoul libérée des terroristes de Daech en juillet dernier.

C’est la première messe chrétienne de cette ville, occupée par les djihadistes du groupe Etat islamique (Daech) de juin 2014 à juillet 2017. Mgr Yohanna Petros Mouché, archevêque syro-catholique de Mossoul, a concélébré en compagnie du patriarche chaldéen catholique Louis Raphaël Sako cette messe de Noël très attendue par les chrétiens de Mossoul et de la Plaine de Ninive. Ils avaient été chassés de leurs villes par Daech en été 2014.

Mgr Yohanna Petros Mouché en compagnie du cardinal Mauro Piacenza, lors d’une célébration à Rome pour le retour des chrétiens de la Plaine de Ninive | © Jacques Berset

Les chrétiens peu nombreux à retourner à Mossoul

Quelque 60 familles chrétiennes sont revenues s’établir à Mossoul, dévastée par la guerre. Les fidèles rassemblés pour la messe de Noël étaient pour la plupart venus d’Ankawa, la banlieue chrétienne d’Erbil, au Kurdistan d’Irak, où ils s’étaient réfugiés lors de la prise de la région par les djihadistes.

Dans l’édifice religieux – le seul qui ait été plus ou moins épargné par Daech – mais où des tentures masquaient tant bien que mal les dégâts provoqués par les déprédations et les vitraux soufflés par les explosions –  le patriarche chaldéen Mgr Louis Raphaël Sako a appelé les fidèles à prier pour «la paix et la stabilité à Mossoul, en Irak et dans le monde».

Remerciement aux musulmans

En signe de solidarité islamo-chrétienne, des musulmans ont participé à l’office placé sous haute sécurité, en présence également de soldats de l’armée irakienne, et parmi eux le général al-Jibouri, qui a mené la bataille de Mossoul. Des membres des services de renseignement de Bagdad étaient placés en alerte. L’église avait été nettoyée par un groupe d’étudiants volontaires musulmans et chrétiens de l’Université de Mossoul.

Ce sont eux qui sont à l’initiative de cette messe de Noël fédératrice, rapporte l’envoyée spéciale du quotidien libanais L’Orient-Le Jour. «Le message transmis par cet événement reste l’unité et la paix. On souhaite montrer que Mossoul est aussi la ville des chrétiens», explique Taha, un jeune musulman étudiant la médecine à Mossoul. Ces étudiants ont mis sur pied l’association Mossoul pour tous, qui vise à favoriser le retour des chrétiens dans cette ville à majorité sunnite.

La méfiance ne s’est pas dissipée

Nombre de familles chrétiennes ne veulent pas revenir à Mossoul et demeurent dans un camp d’Erbil, craignant pour leur sécurité, car certains habitants de la métropole sunnite n’ont pas abandonné l’idéologie de Daech.

Mgr Louis Raphaël Sako a rappelé dans son prêche que les chrétiens ont accueilli des musulmans dans leurs églises au moment de la fuite des habitants de la plaine de Ninive à l’arrivée de Daech. «Aujourd’hui, il faut reconstruire les églises, mais aussi les mosquées, pour refonder l’Irak».

Il a poursuivi en saluant le travail des jeunes volontaires musulmans: «Daech a voulu détruire les relations entre les différentes confessions, ces jeunes resserrent ces liens!». Après l’allocution en langue arabe, des chants religieux araméens ont suivi dans une nef où chrétiens et musulmans étaient assis côte à côte.

Des églises transformées en mosquées

Après la célébration, les prélats des différentes Eglises présentes – entourés d’une forte escorte armée – se sont rendus dans d’autres églises du centre-ville dévastées par les djihadistes et gravement endommagées par les combats pour la libération de la ville. Certaines d’entre elles avaient été transformées en mosquées, comme l’église syro-orthodoxe Saint-Ephrem et l’église chaldéenne Saint-Joseph.

Lors de la prise de Mossoul, les djihadistes avaient laissé le choix aux quelques familles chrétiennes restées en ville, qui risquaient la peine de mort en cas de refus: soit partir, soit se convertir à l’islam, soit payer au tribunal islamique la jizzya, l’impôt de soumission dû par les dhimmis, les non musulmans. Ceux qui avaient choisi l’exil ont été dépouillés de tout, jusqu’aux boucles d’oreille des petites filles! – au passage des barrages établis par les soldats de l’Etat islamique. (cath.ch/orj/com/be)

 

Le patriarche chaldéen Louis Raphaël Sako réclame un dialogue 'civilisé' entre Américains et Iraniens | © Jacques Berset
25 décembre 2017 | 15:51
par Jacques Berset
Temps de lecture: env. 3 min.
Daech (156), Irak (315), Louis Raphaël Sako (35), Mossoul (56), Petros Mouché (5)
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