La liberté, l’amour et le mal, trois thèmes fondamentaux de l’existence humaine
Rome; 24 septembre 2013 (Apic) Quelques jours après la publication de la lettre du pape François au fondateur de La Repubblica, le quotidien italien a publié, le 24 septembre 2013, la réponse articulée de Benoît XVI à un livre du scientifique italien ouvertement athée et anticlérical Piergiorgio Odifreddi. Dans sa longue lettre, le pape émérite amorce un dialogue avec son interlocuteur. Il s’oppose à son interprétation sur la question de la pédophilie dans le clergé et sur la figure du Jésus historique.
Benoît XVI développe une réponse en quatre points, réagissant à l’ouvrage du mathématicien, ‘Caro Papa, ti scrivo – Un matematico ateo a confronto con il papa teologo’ (Cher pape, je t’écris – Un mathématicien athée face au pape théologien). Ce livre critique notamment son ouvrage consacré à Jésus de Nazareth et son Introduction au christianisme. Cette lettre a été reçue par Piergiorgio Odifreddi le 3 septembre, soit avant la publication de la lettre du pape François au fondateur de La Repubblica, le 11 du même mois. Le livre était parvenu à Benoît XVI peu après sa renonciation au pontificat, par le biais d’un ami commun au scientifique et à Mgr Georg Gänswein, secrétaire particulier du pape émérite.
Si le souverain pontife émérite reconnaît volontiers que les mathématiques sont la seule science « au sens strict », il souligne toutefois que la théologie a fourni des « résultats remarquables » dans les domaines historique et philosophique. En outre, Benoît XVI affirme que la théologie a pour but de concilier la religion et la raison, deux fonctions « d’importance essentielle pour l’humanité ». Il ajoute que la « science-fiction », qui est pour Piergiorgio Odifreddi assimilable à la théologie, est présente dans de nombreuses sciences, y compris dans la théorie de l’évolution.
Pédophilie du clergé
Le pape émérite remercie son interlocuteur pour le « dialogue sérieux » sur ces sujets, mais dénonce ensuite le traitement réservé aux questions du prêtre, de la morale catholique et de la figure de Jésus. En ce qui concerne la pédophilie au sein du clergé, Benoît XVI, qui a été en première ligne dans la lutte contre ce scandale, rappelle fermement : « je n’ai jamais cherché à cacher (les) choses ». « On ne devrait pas présenter de façon ostentatoire cette déviance comme s’il s’agissait d’une saleté propre au catholicisme », ajoute-t-il. Et d’insister : « On ne peut taire le mal à l’intérieur de l’Eglise, mais on ne peut pas taire non plus le grand sillage de bonté et de pureté que la foi chrétienne a tracé au fil des siècles ».
« Ce que vous dites sur la figure de Jésus n’est pas digne de votre rang scientifique », poursuit le pape émérite, s’appuyant sur de nombreux auteurs, revenant avec précision sur ses critiques et conseillant des lectures à son interlocuteur. La réponse de Benoît XVI, caractérisée par une grande érudition et une argumentation solide, rejette avec force certaines affirmations formulées par Piergiorgio Odifreddi sur Jésus de Nazareth et son interprétation exégético-historique.
Liberté, amour, mal
Le pape émérite explique enfin que la science pure ne peut suffire à appréhender l’humain. « Je voudrais faire remarquer que, dans votre religion des mathématiques, écrit-il, vous ne considérez pas trois thèmes fondamentaux de l’existence humaine : la liberté, l’amour et le mal ». « Je suis étonné que vous évacuiez ainsi la liberté, qui a pourtant été la valeur porteuse de l’époque moderne », souligne encore Benoît XVI avant d’insister : « Une religion qui délaisse ces questions fondamentales reste vide ».
« Monsieur le professeur, conclut le pape émérite, ma critique est en partie dure. Mais la franchise fait partie du dialogue : c’est seulement de cette façon que la connaissance peut grandir. Vous avez été très franc avec moi, et vous accepterez ainsi que je le sois avec vous ».
Le pape François a lui aussi adressé un long courrier au fondateur du quotidien italien La Repubblica, Eugenio Scalfari, en réponse à deux lettres ouvertes publiées dans les colonnes du journal de gauche en juillet et en août. Le jour de la publication, Piergiorgio Odifreddi avait critiqué le choix du journaliste de s’adresser à Jorge Mario Bergoglio. « Il s’agit de la personne la mois apte à répondre, avait-il affirmé dans la presse, Bergoglio est un curé de campagne, nous l’avons compris désormais. Il n’est pas comme Ratzinger, un pape théologien, qui a mis en place le Parvis des gentils (…) pour un dialogue entre croyants et non-croyants ». A ce moment-là, le scientifique avait déjà reçu la missive du pape émérite.
Par le passé, ce mathématicien italien s’est caractérisé par des ouvrages fermement anti-chrétiens, mais a adopté récemment des positions plus modérées, se plaçant notamment sur le créneau porteur en Italie de la recherche du dialogue avec la foi catholique. (apic/imedia/mm/mp)
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