La « Lettre de Prague » de Frère Roger publiée à l’issue du rassemblement
Prague, 4janvier(APIC) La rencontre européenne annuelle organisée par la
Communauté de Taizé s’est déroulée cette année, du 28 décembre au 2 janvier
à Prague. 80’000 jeunes se sont retrouvés dans la capitale tchécoslovaque.
Venus de l’Est et de l’Ouest, ils ont, dans l’amitié et la foi, prié et
chanté pour une Europe libre, pacifiée et réconciliée.
Espoir, confiance, humilité, joie et émerveillement: c’est ce que certains veulent bien retenir du message de Frère Roger Schutz, prieur de la
Communauté de Taizé, auquel ils reprochent le caractère parfois trop « fusionnel » et affectif et plus encore le discours angélique et la fuite du
réel qui caractériserait les rencontres organisées par la Communauté de
Taizé. Mais la communion, la réconciliation, la solidarité et la responsabilité n’en sont pas absentes. Frère Roger l’a rappelé aux 80’000 jeunes
présents: « La paix du coeur n’est jamais oubli des autres. Ele n’efface pas
l’appel aux solidarités humaines, venu tout droit de l’Evangile… Qui
cherchera à réduire la souffrance là où il y a une demeure de misère? »
La rencontre de Prague, le treizième rendez-vous proposé aux jeunes
d’Europe par la Communauté de Taizé, a connu une affluence record. Elle
était la troisième à être organisée en Europe de l’Est, où la participation
est toujours plus massive: ils étaient 20’000 à Pecs (Hongrie) en mai 1989,
50’000 à Wroclaw (Pologne) il y a tout juste un an, 80’000 dans la capitale
tchécolovaque, parmi lesquels 35’000 Polonais, mais aussi 1’500 jeunes Soviétiques venus des républiques baltes.
L’apaisante certitude
La « lettre de Prague » publiée par Frère Roger à l’issue du rassemblement
fait allusion en son début à l’existence de « jeunes livrés au découragement » et dont la vie est « comme figée dans la perte du bel espoir humain ».
A ceux qui trouvent « sursaut de confiance » dans la foi, il déclare: « Vivre
intensément chaque jour aujourd’hui suppose se laisser saisir par le
Christ. Sa parole est si claire: ’Aujourd’hui, je voudrais entrer en ta demeure’.(Lc 19,5). Aujourd’hui, non demain »
Frère Roger insiste sur l’importance de la prière, « qui est parfois si
concrète »: « Notre prière ne demande pas d’efforts surhumains. Comme un faible soupir, comme une prière d’enfant, elle nous tient en éveil. Dieu n’at-il pas révélé aux petits, aux pauvres du Christ, ce que les puissants de
ce monde ont peine à comprendre? »
Le prieur de Taizé parle aux jeunes de la lumière du Christ qui demeure
quand leurs « ténèbres » les interpellent, pénétrant jusqu’à leurs « opacités ». « Il est des épreuves de l’existence dont tu ignores le pourquoi, leur
dit-il. Elles peuvent te marteler, et un de tes pires ennemis devient le
découragement. Mais devant toi demeure cette montée, elle est de croire en
Dieu, en vue d’un plus grand amour…Arrête-toi, ouvre l’Evangile, tu y découvriras l’apaisante certitude: ’par son inquiétude, personne ne peut
ajouter ne serait-ce qu’un jour à sa vie… C’est ma paix que je te donne…Que ton coeur cesse de se troubler et d’avoir peur’. (Lc12,25-26)…
La paix du coeur est une réalité spirituelle qui donne vie en toute situation, alors que l’anxiété et la peur parviennent à entamer la confiance en
la foi ».
Les mains nues
Dans le passage de la lettre où il souligne que la paix du coeur n’est
jamais oubli des autres, Frère Roger relève que les moyens apportés par la
science et la technique, si indispensables soient-ils, ne suffisent pas à
soulager les souffrances: il faut aussi « la confiance de la foi, l’intelligence du coeur, une soif de réconciliation ».
La lettre insiste une fois encore sur la pauvreté des moyens: « Sur tous
les continents, tant de jeunes, de femmes, d’hommes et aussi d’enfants, ont
tout pour que guérissent des situations blessées. Bien souvent, presque
sans moyens, des humbles de la terre ont préparé des voies. Il en est qui
se sont levés et, les mains nues, ont fait tomber les murailles de peur et
d’humiliation. Ils savaient qu’il n’y avait pas un peuple plus coupable
qu’un autre. Et maintenant ils cherchent à s’arracher aux méfiances d’un
passé proche ou lointain. Il est si essentiel de ne jamais humilier les
membres d’une nation dont certains dirigeants ont commis dans l’histoire
des actes de terreur ».
« Ils sont multitude ceux qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour être
levain de confiance entre les personnes, entre les peuples. Ils se sont
dressés parmi les humains comme des signes de l’inespéré. Ils se sont construits intérieurement aux heures de l’incompréhensible épreuve. Ils ont
persévéré envers et contre tout ».
Unité chrétienne: Il y a urgence!
La « Lettre de Prague » insiste aussi sur l’urgence du dialogue oecuménique: « Pour L’Evangile, affirme Frère Roger, la réconciliation n’est jamais
paresseuse, elle est immédiate. Elle ne perd pas de temps à vouloir élaborer des procès d’intention. Elle est attentive à ne jamais dramatiser les
situations. Elle ne s’attarde pas à chercher qui a eu tort et qui a eu raison, rien ne paralyse tant les capacités de la création ».
Dans une note en marge, où il constate que « l’intérêt pour l’oecuménisme
n’est pas ausssi vif qu’il y a trente ans », Frère Roger rappelle la « forte
intuition » de Jean XXIII, quand il disait en janvier 1959: « Nous ne ferons
pas un procès historique, nous ne chercherons pas à savoir qui a eu tort et
qui a eu raison, nous dirons: réconcilions-nous! »
41 rencontres intercontinentales
La « Lettre de Prague » sera méditée lors d’une rencontre de jeunes qui
aura lieu aux Philipinnes du 22 au 25 février prochains. Avant et pendant
cette rencontre, Frère Roger et quelques-uns de ses frères iront vivre dans
un bidonville de Manille.
Traduite en trente langues, la lettre du prieur de Taizé sera également
méditée au cours de 41 rencontres intercontinentales qui auront lieu cette
année à Taizé, du 3 février au 17 novembre. (apic/cic/ba)
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