La mondialisation marque la vie des congrégations
Montréal, 10 juin 2014 (Apic) De plus en plus de membres des quelque 200 communautés religieuses présentes sur le territoire canadien, qui connaissent un vieillissement rapide, sont originaires de pays étrangers. Mais pour Sœur Rita Larivée, toute nouvelle présidente de la Conférence religieuse canadienne (CRC), il serait faux de penser que leur présence accrue vise à contrer le manque de vocations autochtones. Pour la supérieure générale des Sœurs de Sainte-Anne, il s’agit aussi des effets de la mondialisation: « les communautés religieuses deviennent plus interculturelles ».
Elue pour un mandat de deux ans à l’issue de l’assemblée générale de la CRC, tenue à Montréal du 29 mai au 1er juin 2014, Sœur Rita Larivée bouscule les idées reçues sur l’avenir des communautés religieuses canadiennes. Pour la nouvelle présidente, l’interculturalité des communautés religieuses canadiennes n’est pas rattachée à un manque de vocations, mais elle correspond à l’émergence de l’Eglise catholique dans d’autres pays.
Ses propos détonnent dans un contexte où l’avenir des communautés religieuses est souvent associé au déclin quantitatif de leurs membres. Interrogée sur le fait que toujours davantage de religieux présents sur le territoire canadien sont d’origine étrangère, elle estime qu’il serait faux de croire que leur présence accrue vise à contrer la diminution des effectifs. « Si l’on me demande si cela répond à un manque de vocations, je dis non. C’est plutôt un changement, un déplacement ».
La religieuse rappelle que, jadis, une communauté religieuse était surtout associée à une culture, celle du pays où elle se trouvait. Mais avec la mondialisation et les développements des moyens de communication, les dynamiques sont bouleversées. « Avant le tremblement de terre de janvier 2010 en Haïti, nos communications dépendaient d’une ligne téléphonique fixe. La catastrophe a obligé beaucoup d’Haïtiens à migrer vers la téléphonie portable. Concrètement, ça veut dire qu’en quatre ans, les communications entre nous et nos consœurs là-bas ont radicalement changé. Même chose pour l’Afrique: elles n’ont plus besoin d’un ordinateur et de dépendre de l’électricité. De simples textos facilitent comme jamais nos relations », peut-on lire sur le site québécois d’information religieuse «Proximo».
« A cela s’ajoute le fait que les frontières deviennent plus fluides. Et on voit la même chose dans la vie religieuse: les religieux et les religieuses se déplacent plus. Les communautés religieuses deviennent plus interculturelles », poursuit Sœur Rita Larivée.
Ainsi, la plus grande présence au pays de membres de communautés religieuses nés à l’extérieur du Canada n’est pas tant une réponse à un manque de vocations canadiennes que la conséquence de l’émergence de l’Eglise catholique dans divers pays autrefois considérés comme des « pays de mission », à l’instar, par exemple, d’Haïti ou de la République démocratique du Congo. Selon Sœur Rita Larivée, c’est parce que l’Eglise catholique est en croissance dans de tels pays que cela accélère la mixité culturelle des communautés religieuses. Elle évoque à cet égard un « nouveau réveil » qui confirme l’abandon depuis longtemps entamé d’une relation verticale entre les pays occidentaux et les pays de mission pour faire place à une véritable intégration des particularités culturelles de chacun au sein des communautés religieuses d’aujourd’hui.
« Quand je suis en mission dans un autre pays, je ne dis pas : ›je suis en mission, et l’autre non’. Nous sommes toutes en mission. Et nous sommes en mission ensemble. Ça peut être vrai ailleurs comme ça peut être vrai ici. Les différentes cultures apportent différentes visions du monde et nous nous en réjouissons car cela correspond à l’Evangile », explique la présidente de la CRC.
Certes, Sœur Larivée concède qu’il y aura effectivement moins de membres au sein de diverses communautés dans dix ans. Mais parmi les dossiers prioritaires qui occuperont la CRC au cours des deux prochaines années se trouve celui des relations avec les communautés nouvelles, elles-mêmes déjà interculturelles, à l’instar de la Famille Marie-Jeunesse et des Fraternités monastiques de Jérusalem, qui remportent un certain succès au Québec. Elle confirme que diverses pistes seront explorées afin de mieux intégrer ces communautés nouvelles à la vie des communautés traditionnelles qui constituent l’essentiel de la CRC. « On sait qu’il y aura moins de religieux et religieuses. Ce que l’on ne sait pas encore par contre, c’est quel apport pourront avoir ces nouvelles communautés », laisse-t-elle entendre, indiquant qu’il y aura peut-être « d’agréables surprises » de ce côté.
Encadré
Selon des données collectées au 31 décembre 2012, sur l’ensemble du territoire canadien, il existe 236 congrégations religieuses membres de la Conférence religieuse canadienne (CRC). 70 % de ces congrégations sont féminines et 30 % masculines. C’est le même pourcentage qui joue pour les congrégations francophones (70 %) et anglophones (30 %). Le nombre total des religieux et religieuses s’élève à moins de 16’000, dont 80 % sont des femmes et 20 %, des hommes. 80 % sont francophones et 20 % anglophones.
Des religieuses et des religieux vivant au Canada, 90 % sont originaires du pays et 10 % viennent d’ailleurs. La répartition sur le territoire national est très inégale: 68 % au Québec; 16 % en Ontario; 8 % dans l’Ouest canadien; 6,5 % en Atlantique et 1,5 % dans les territoires du Nord.
La répartition par groupe d’âge est la suivante: 50 % ont plus de 80 ans; 44 % entre 60 et 80 ans; 5 % entre 40 et 60 ans et seulement 1 % ont moins de 40 ans. Il n’y a qu’environ 1 % de religieux et religieuses en formation initiale. Le nombre de personnes associées ou membres de fraternité serait aux environs de 10’000, dont 1 % de laïques consacrés. En 2011, le nombre total de religieux et religieuses appartenant aux congrégations membres de la Conférence religieuse canadienne en 2011 était de 18’098. D’après les données recueillies, le nombre total des religieux et religieuses appartenant aux congrégations membres de la CRC au 31 décembre 2012 était de 16’900. Cf. www.crc-canada.org. (apic/rvm/proximo/crc/com/be)
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