La solitude de l’immigré à l’horizon de la théorie de Marcuse
plus frappantes de la société industrielle capitaliste. La solitude, malgré
l’accumulation de gens dans les villes, surtout, est bien réelle, cela en
dépit des systèmes de communication, de technologie et de tous les désirs
d’entrer en relation avec nos semblables. Une solitude bien réelle aussi
nonobstant l’effort consentis par des groupes et associations qui ont en
commun, certes avec des approches et des méthodes différentes, de lutter
contre cette solitude.
En fait, « chaque solitude a son visage », ainsi que le remarque J.-F. Six
dans son « Guide de solitudes » (page 11). Ce dernier relève que la solitude
en général existe dans la société actuelle, mais il constate aussi qu’il
existe une expérience personnelle de la solitude, ainsi qu’une attitude face à la solitude. Une solitude qu’il convient de définir.
Selon Six, la solitude, « c’est un ensemble de sentiments qu’éprouve le
commun des mortels quand il est séparé des autres par des circonstances extérieures et qu’il estime, à tort ou à raison, être tenu à l’écart par les
autres, exclu et pas aimé » (J.-F. Six, p. 12).
La solitude de l’immigré.
La solitude n’est seulement un phénomène individuel: elle est également
un phénomène social grandissant de notre époque. Un trop grand nombre de
personnes ou de groupes de populations ne sont pas reconnus comme tels. Et
des populations entières sont l’objet de l’exploitation et de la misère. On
assiste ainsi à la montée d’un déplacement des masses humaines qui, partant
à la recheche d’une vie plus digne, provoquent au sein de leurs communautés
et de leurs familles la déchirure et le déracinement d’hommes, de femmes et
d’enfants.
Depuis le siècle dernier, le sous-prolétariat dans les villes de pays
industrialisés a été grossi par des gens qui fuyaient les difficultés de la
campagne pour s’en aller à la recherche d’un travail dans les grandes agglomérations. Un sous-prolétariat également formé par l’immgration étrangère d’origine et de culture différentes. Les uns et les autres s’installèrent dans des banlieues et des quartiers construits entre la ville et la
campagne. Dans des banlieues et quartiers constituant de « véritables isolats » qui favorisèrent la création de phénomènes typiques de rejet, de racisme et de lieux de solitude.
Transculturation
Le migrant qui a quitté coutumes et habitudes se voit dans l’ »obligation » de modifier sa manière d’agir et de réagir par la force des choses et
des circonstances; il doit adapter son mode de vie à celui du pays d’exil.
Et même si beaucoup de migrants ne perdent pas – ou pas complètement leurs identités culturelles, d’autres, en revanche, deviennent ce qu’il
convient d’appeler des « aculturés » en raison du « confort et de la technologie » qu’ils rencontrent. Sans trace de leur culture d’origine, ils en arrivent à mépriser les difficultés du passage d’une culture à l’autre et à une
sous-estimation de la culture maternelle.
De nombreuses études font l’objet d’un examen approfondi des problèmes
psychologiques et sociaux des immigrés. Certaines d’entre elles examinent
l’acheminement « convergent » des groupes vers l’hmogénéisation croissante de
leur condition sociale, voire même la négation de leur spécificité dans
certains pays. Cela « au nom du fonctionalisme ou du marxisme » ou même des
deux à la fois, car capitalisme et marxisme ne font pas toujours mauvais
ménage (Michel Oriol, « L’Emigré Portugais ou l’homme multidimentionnel », p.
541).
Dans le présent travail, nous allons reprendre l’analyse de Herbert Marcuse au sujet des conduites sociales et des attitudes adoptées à l’égard
des migrants par la société industrialisée. Des attitudes que Marcuse explique comme faisant partie d’une caractéristique du monde moderne destinée
à la construction de ce qu’il nomme « l’homme unidimentionnel ». Selon Marcuse, la société tend à liquider « ce qu’il appelle « le résidu irrationnel »
qui constitue à la fois le TEMPS et la MEMOIRE du migrant, mais aussi à
éliminer auprès de ce même migrant tout ce qu peut lui rappeler le passé.
Pour cette société, tout repère à ce passé compris comme un élément toujours présent qui inspire et vitalise le comportement humain doit être empêché.
Marcuse ne s’arrête cependant pas là. Son apport sur la question est
d’autant plus intéressant qu’il pense et estime qu’un groupe dominé est capable de disposer du souvenir de sa propre histoire, mais aussi qu’il garde
la capacité de concevoir et de promouvoir un autre avenir que celui qu’on
lui assigne à partir d’une rationnalité dominante (cf Michel Oriol, p.
542).
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