Du chant grégorien au féminin

Canticum amantissimi – une belle découverte

Le chant grégorien, ou plain-chant, est la source de toute la musique occidentale. Si l’on a l’habitude de l’entendre interprété par des voix masculines, des voix féminines rendent également très bien les beautés de cette musique, nous rappelant que le grégorien a souvent été chanté par des femmes, dans les couvents de religieuses, par exemple. C’est ainsi que l’on pourra apprécier le disque «Canticum amantissimi», dans lequel on peut entendre la «Schola Resupina», un petit groupe féminin viennois dirigé par Isabell Köstler. Le disque bénéficie également du concours de l’organiste Helene von Rechenberg.

 

Ce CD, extrêmement bien conçu, commence de façon mariale avec le Salve Regina, dans sa version solennelle. La seconde piste continue à explorer la même hymne, mais dans une version alternatim, à savoir une alternance entre des versets chantés et des versets joués à l’orgue. Ici, ces derniers font entendre une musique datant de 1525 environ, composée par le compositeur autrichien Paul Hofhaimer (1459-1537).

 

La suite de l’enregistrement présente des chants de la liturgie (graduels, communion, alléluia, Introït…), tous fondés sur le texte du psaume 44 (45). C’est précisément ce qui donne à ce disque son titre, puisque ce psaume est un chant nuptial pour le roi, un chant d’amour. Sa dimension mariale a également été souvent soulignée, à tel point que ses derniers versets sont chantés le jour de l’Assomption. A ce psaume répond le «Vidi speciosam», repris de la traduction du Cantique des cantiques dans la Vulgate de saint Jérôme. Au vu de la résonance mariale de ce répons, il était tout naturel de le faire précéder d’une pièce pour orgue à qui l’on a donné une même connotation: le «Recercar con obligo di cantare la quinta parte senza toccarla», issue du recueil des «Fiori Musicali» de Girolamo Frescobaldi (1583-1643), organiste de Saint-Pierre de Rome. Comme l’indique le titre, le compositeur s’amuse avec l’interprète, en lui demandant de ne pas jouer une des voix, mais de la chanter. Cette voix répète sans cesse le même motif et est donc écrite une seule fois sur la partition, au tout début. Au musicien de deviner quand elle doit intervenir. Frescobaldi s’amuse même à ajouter «Me comprenne qui pourra, je me comprends»! Le texte n’étant pas précisé, on a tendance à en faire une litanie à la Vierge, sous l’influence de la «Sonata sopra Sancta Maria» que l’on trouve dans les Vêpres de Monteverdi, composées peu avant, et où une phrase chantée se superpose à une sonate instrumentale. Ainsi, dans le disque de la Schola Resupina, on entendra les chanteuses répéter le texte «Sancta Maria, ora pro nobis. Sancta Dei genitrix, ora pro nobis», etc. Cette oeuvre vaut le détour, même si, à mon sens, l’ensemble n’y a pas la même aisance vocale que dans le plain-chant.

 

Le disque se termine également sur une touche mariale, avec, tout d’abord, le chant de l’Ave Maria. Les deux dernières œuvres font entendre l’Ave Maris Stella, tout d’abord dans une version pour orgue du compositeur espagnol Juan Cabanilles (1644-1712). Son «Tiento partido de mano derecha sobre Ave Maris stella» s’inscrit dans la riche tradition de l’orgue espagnol. Faisant entendre le thème de l’hymne, il le développe dans un grand solo de la main droite très virtuose. La dernière œuvre du disque suit à nouveau le principe de l’alternance. L’Ave Maris Stella est ici entendu, dans ses versets impairs, dans la version de Girolamo Frescobaldi.

 

Ce disque est une belle découverte. Outre sa conception forte intéressante, la qualité vocale des chanteuses vaut le détour. De même, on sent que l’organiste est à l’aise dans la musique ancienne, et qu’elle peut compter sur une excellente technique. Je ne peux donc que recommander l’achat de ce CD, qui nous permet de découvrir ou redécouvrir une belle partie de notre histoire musicale catholique.

 

Damien Savoy

 

Le site de l’ensemble: www.resupina.at

Pour plus d’informations concernant les oeuvres d’orgue de ce disque: CANTAGREL, Gilles, «Guide de la musique d’orgue», Fayard, 1991.

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