La prolifération des nouvelles Eglises au Togo, «un danger pour la foi chrétienne»

Lomé, 1er Mars 2015 (Apic) La prolifération au Togo des Eglises dites de «réveil spirituel» est un »danger pour la foi» chrétienne dans le pays, ont estimé plusieurs responsables d’Eglises traditionnelles. Ils s’expriment à propos de ce phénomène en pleine croissance dans une grande enquête du bimensuel togolais «Focus infos», publiée dans son édition du 27 février au 11 mars.

Pour l’abbé Désiré Kpodar, administrateur de la paroisse cathédrale du Sacré-Cœur de Jésus, à Lomé, la capitale, le caractère «acéphale» de ces Eglises qui «arrivent sur le marché» représente une profonde inquiétude pour la foi chrétienne et le salut des fidèles. «On se demande si les autorités en charge des questions religieuses mesurent, elles aussi, l’ampleur du phénomène»,  s’est-il  inquiété.

Des «vendeurs d’illusions qui surfent sur la misère des populations»

Le pasteur Franck Ahoumey,  responsable de la direction de l’éducation chrétienne de l’Eglise évangélique presbytérienne du Togo, a qualifié les pasteurs de ces nouvelles communautés religieuses de «vendeurs d’illusions qui surfent sur la misère des populations, leur vulnérabilité et leur sensibilité» pour les exploiter au maximum.

Le seul  fait que les pasteurs de ces Eglises fassent du marketing dans les médias concernant leurs structures démontre à suffisance leur caractère commercial, dénonce-t-il. Et d’ajouter que le train de vie des «pasteurs» de ces Eglises renseigne sur leur objectif véritable.

De son côté, le pasteur Emmanuel Dogbé, de l’Eglise Méthodiste du Togo, accuse les dirigeants du pays de «susciter et d’entretenir ces Eglises». Selon lui, l’Etat aurait favorisé leur création à partir des années 90 pour faire contrepoids aux Eglises traditionnelles, qui interviennent régulièrement dans le champ politique. «Les sorties constantes des responsables des Eglises traditionnelles allaient la plupart du temps contre le pouvoir en place», rappelle-t-il. De ce fait, «on a favorisé la création des Eglises dites de réveil, muettes sur les questions politiques, pour nous (les Eglises traditionnelles, ndlr) rappeler en quelque sorte le rôle de l’Eglise», souligne encore le pasteur Dogbé.

«Ces Eglises ont une seule mission, celle de conquérir des âmes pour le Malin, le Diable», estime pour sa part Guillaume Gbadja, fonctionnaire et fervent catholique.  «Elles profitent du mal vivre des populations qui, confrontées aux difficultés quotidiennes, sont à la recherche de solutions faciles, magiques». Dans ce cadre,  elles sont prêtes à écouter ou à suivre le premier venu.


Encadré

Prédominance féminine au sein des sectes chrétiennes

Même s’il n’y a pas de statistiques officielles à propos du nombre de sectes chrétiennes au Togo, plusieurs sources estiment qu’entre 75 et 80% de leurs fidèles sont des femmes. Elles sont généralement commerçantes, employées ou fonctionnaires, célibataires, divorcées ou veuves. Cette prédominance féminine en leur sein s’explique, selon un pasteur, par «la vivacité des cultes et l’interaction lors des moments de prédication entre le pasteur et les fidèles».

Des sans-emplois, élèves ou étudiantes, âgés de 20 à 50 ans, font aussi partie de leurs fidèles les plus assidus aux différents cultes. Des  couples aussi assistent à leurs prières, souvent «à l’initiative de l’épouse». En revanche, les chefs d’entreprises, les hauts cadres de l’Etat et du secteur privé, les avocats, notaires, architectes sont très minoritaires parmi leurs fidèles. Les personnes du troisième âge se retrouvent davantage dans les Eglises traditionnelles, tout comme les intellectuels actifs, qui ont fait des études universitaires. (apic/ibc/be)

Jacques Berset

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