Le fils de la veuve de Naïm. Homélie du 10e dimanche Ordinaire C (Lc 7, 11 -16)

St Augustin nous dit que Jésus s’est servi des choses qui se voient, pour conduire notre foi vers les réalités qui ne se voient pas. Il s’est servi de la grande tristesse de la veuve pour montrer sa tendresse et sa compassion envers notre humanité.

Deux foules se rencontrent près des portes de la ville de Naïm, à 10 kilomètres de Nazareth. Jésus avec ses disciples forme un groupe, et une veuve amenant son fils unique pour l’enterrer hors de la ville, un deuxième.

La coutume à l’époque était d’enterrer le mort le jour même de son décès, et si cela était possible, même dans les premières heures suivant la mort. On peut donc facilement imaginer la peine de cette femme éprouvée, encore sous le choc du décès tout récent de son fils.

Nous le savons par expérience, enterrer un père ou une mère, c’est toujours difficile. Mais enterrer un fils, en plus un fils unique, en plus quand on est veuve, là vraiment la peine apparaît sans borne. Concrètement, cette femme va rester seule, sans défenseur. Il faut se rappeler la situation d’extrême fragilité des veuves dans l’antiquité et encore aujourd’hui en de nombreux endroits.

Ainsi, cette femme est-elle l’image tragique, l’icône d’une extrême pauvreté et d’une profonde détresse. Elle a subi deux morts précoces, celle de son mari et celle de son fils. La mort lui a arraché les hommes de sa vie. Elle symbolise la fragilité de notre condition humaine subissant la mort comme un désordre et une immense souffrance.

 

Et que fait Jésus voyant ce cortège funèbre? «En la voyant, le Seigneur fut saisi de pitié pour elle et lui dit: ne pleure pas». Littéralement, Jésus fut pris aux entrailles, touché au-dedans par la détresse de cette femme. Entendez comme c’est beau! notre Dieu n’est pas impassible, lointain, arrogant, extérieur à notre réalité; au contraire, il se fait tout proche, jusqu’à être remué au-dedans. Dieu apparaît comme étant humain, familier, vulnérable, proche, capable de s’émouvoir d’une peine qui lui est extérieure.

Pour le croyant, cette tendresse quasi maternelle de Jésus traduit en notre monde les attitudes mêmes de Dieu, car Jésus est l’image du Dieu invisible.
Ainsi, pour le chrétien, Jésus qui se laisse toucher jusqu’aux entrailles par cette veuve, c’est Dieu qui est touché par le concret de nos vies, nos joies et nos peines.

 

Quand vient le miracle qui rétablit l’ordre ancien, on ne peut qu’être frappé par l’extraordinaire autorité de Jésus: «Jeune homme, lève-toi». Et le jeune homme revient à la vie! Comme toujours, c’est par le mot le plus simple que Jésus est efficace. (Et si dans le fond, la simplicité était la seule forme vraiment efficace?). Pour Jésus, pas besoin de formules compliquées, de signes alambiqués, de paroles secrètes, de potions magiques, mais une simple parole pleine d’autorité: «lève-toi». Comparez aussi la grande différence avec Elie entendu en première lecture. Il a eut besoin de s’y reprendre à trois fois pour y arriver. Avec Jésus, tout est simple, il dit et tout se passe selon sa Parole.

Cette parole «lève-toi» est utilisée pour désigner la résurrection du Christ, et aussi la résurrection baptismale. C’est la Parole de Vie qui a autorité sur la Mort. Mais attention, le mot n’est pas magique, c’est l’autorité de celui qui le prononce qui lui confère son effet: Jésus, le Fils de Dieu, a autorité sur la mort.

 

Interrogeons-nous quant au sens de toute cette histoire. St Augustin nous dit que Jésus s’est servi des choses visibles pour conduire notre foi vers les réalités invisibles. Il s’est servi de la grande tristesse de la veuve pour montrer sa tendresse et sa compassion envers notre humanité. Pour le croyant, Jésus est Dieu qui pénètre au cœur de la douleur humaine en disant ne pleure pas, sèche tes larmes, la mort n’est pas le dernier mot.

Cette veuve nous fait bien sûr penser à une autre femme encore plus célèbre, Marie perdant son fils, son unique, de façon horrible. Ce fils tant aimé et chéri, mort un jour et sorti vivant du tombeau le troisième jour. Cela est arrivé pour ceux qui se sont endormis, pour nous qui avons mis notre espérance en Jésus. Entendez comme notre espérance en la vie éternelle est déjà une certitude dans le Seigneur Jésus!

Au milieu de tout ce qui nous paraît être victoire de la mort sur la vie, nous devons garder les yeux grands ouverts sur le Seigneur qui continue à nous dire: lève-toi, j’ai vaincu le monde, n’aie pas peur. Au milieu des larmes et des morts, de la souffrance et des découragements, résonne toujours pour celui qui écoute, la tendresse du Père révélée en son Fils. Ne pleure pas, je suis la Résurrection et la Vie, qui croit en moi, même s’il meurt, vivra.

C’est pour cela que le chrétien, même quand il pleure, chante la mort, parce qu’il sait que la mort  n’a pas le dernier mot.

 

Seigneur, merci pour ta compassion à l’endroit de cette pauvre veuve.

C’est bien de ressusciter comme le fils de la veuve de Naïm, mais c’est mieux encore de ressusciter pour la vie éternelle.

Seigneur, celui-là était mort quant au corps.
Nous, nous sommes souvent morts quant à l’esprit.

On pleure beaucoup quand un corps meurt.
Mais on ne pleure pas assez quand une âme se meurt.

Il faut prier pour les âmes qui se meurent. Elles sont nombreuses.

Aide-nous Seigneur, vient à notre secours, que notre joie soit d’avantage dans la conversion de notre cœur que dans la guérison de notre corps.

Amen.

 

Père Jérôme Jean

Portail catholique suisse

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