le primat de l’Eglise russe hors-frontières

Moscou : Des chrétiens russes interpellent (080591)

Graves menaces de division de l’Eglise orthodoxe russe

Moscou, 8mai(APIC) Alors que l’Eglise orthodoxe russe est déjà sur la

touche en Ukraine occidentale, où les partisans de l’Eglise orthodoxe autocéphale ukrainienne du patriarche Mstyslav Skrypnyk tentent de l’évincer,

elle est également confrontée dans différentes régions de l’Union soviétique aux menées de l’Eglise russe « hors-frontières », dont le siège est à New

York.

Face aux graves menaces de division de l’Eglise orthodoxe russe du patriarcat de Moscou, des intellectuels chrétiens moscovites ont interpellé

Mgr Vitaly, primat de l’Eglise orthodoxe russe « hors-frontières », afin de

mettre un terme à l’ouverture de « paroisses parallèles » en URSS.

Le journal « Pout » (la Voie), édité à Moscou par le Mouvement démocratechrétien de Russie, a publié dans l’une de ses dernières livraisons une

lettre ouverte adressée au métropolite Vitaly Rostislav Oustinoff, primat

de l’Eglise russe « hors-frontières ». Signée par quatre laïcs orthodoxes

moscovites, dont Alexis Zalessky, président de l’ »Association d’aide aux

chrétiens pour la réouverture des églises », et Vladimir Osipov, rédacteur

de la revue conservatrice « Zemlia » (la Terre), cette lettre s’interroge sur

la finalité de l’action menée par l’Eglise russe « hors-frontières » sur le

territoire soviétique.

Ouverture de « paroisses parallèles »

Au moment où la situation des croyants est en train de s’améliorer,

puisqu’ils ont maintenant la possibilité d’ouvrir des églises, la projection des divisions juridictionnelles en Russie représente une grave menace,

affirment les signataires. L’ouverture par l’Eglise « hors-frontières » de

paroisses parallèles risque de rompre l’unité du témoignage orthodoxe dans

une société qui sort à peine de plusieurs décennies de propagande anti-religieuse. « Quel regard jetteront sur toutes ces divisions entre chrétiens

ceux parmi les non-croyants qui sont plutôt favorablement disposés envers

la religion (et il y en a de plus en plus dans le pays)? Est-ce que cela ne

les renforcera pas dans leur incroyance ? », se demandent-ils. Compte tenu

du manque d’éducation spirituelle et morale de la société soviétique dans

son ensemble, une telle situation de division à l’intérieur de l’Eglise représente « un terrible sujet de tentation spirituelle pour les croyants autant que pour les non-croyants ».

La situation est d’autant plus délicate que l’évolution à l’intérieur de

l’Eglise regorge de contradictions qui ne sont pas toujours visibles ou

compréhensibles depuis l’étranger. L’attitude bienveillante des autorités à

l’égard de l’Eglise a permis l’émergence de toutes sortes d’individus. Selon les signataires, certains se réclament du christianisme par effet de

mode, d’aucuns recherchent « un capital politique, voire même simplement financier », d’autres encore, « voyant que dans les cercles ecclésiastiques

s’est formée une ’opposition’(…) se pressent d’y adhérer non pas pour

cause de divergence avec la hiérarchie, mais à cause d’offenses (vraies ou

fausses) qui leur ont été faites ».

Mise en garde contre la « crédulité »

Les signataires mettent encore en garde les dirigeants de l’Eglise

« hors-frontières » contre une attitude trop crédule à l’égard d’individus

qui « surgissent un peu partout » et « se réclament de ’l’Eglise des catacombes’ ou de la ’Vraie Eglise orthodoxe’ ». Dans bien des cas, il s’agit

d’ »imposteurs » dont la succession apostolique est douteuse. Aussi, dans

l’attente d’une meilleure solution qui, selon les auteurs de la lettre,

passe par un concile rassemblant les évêques du patriarcat de Moscou et

ceux de l’Eglise « hors-frontières », les signataires demandent que l’Eglise

en exil prenne conscience de ses responsabilités en faisant clairement connaître sa position vis-à-vis des communautés qui se déclarent en Russie

sous son obédience.

Le journal « Pout » publie également un entretien sur ce thème, accordé

par le Père Georges Edelstein, prêtre orthodoxe du diocèse de Kostroma,

bien connu pour son engagement en faveur de la liberté religieuse au début

des années 80. Revenant sur les accusations lancées par le passé par le

Synode russe « hors-frontières » contre le patriarcat de Moscou, le Père

Edelstein estime que « personne aujourd’hui ne peut oser affirmer que la

hiérarchie du patriarcat de Moscou est dépourvue de la grâce divine et que

ses sacrements ne sont pas valides ». « Aussi je pense qu’un prêtre n’a pas

le droit de rompre avec sa hiérarchie épiscopale pour des divergences

d’opinion politique, ni de passer dans une autre juridiction ».

« Diviser pour régner »

La création de paroisses parallèles sur le territoire d’une autre Eglise

constitue une contradiction avec les principes de l’ecclésiologie orthodoxe. Mais cette affaire semble également revêtir un aspect politique. Comme

le rappelle le Père Georges Edelstein, le pouvoir soviétique a toujours

cherché à susciter des schismes à l’intérieur de l’Eglise suivant l’adage

« diviser pour régner ». Les autorités actuelles maintiennent cette ligne de

conduite. Ainsi, selon l’hebdomadaire « Moskovskie Novosti » (Les Nouvelles

de Moscou), en mars dernier, le Père Basile Saveliev, un prêtre de l’Eglise

hors-frontières vivant en Sibérie, à Omsk, a été convoqué par un officier

du KGB. Celui-ci lui a exprimé sa compréhension pour les membres du clergé

qui rompaient avec le patriarcat de Moscou. Il a ensuite, sans succès, proposé au prêtre de collaborer, en donnant des informations sur les croyants

qui visitent sa paroisse et en contribuant à la publication de documents

susceptibles de compromettre l’évêque du patriarcat de Moscou pour le diocèse d’Omsk.

Depuis 1989, dans différents points de l’Union soviétique, une trentaine

de paroisses et de prêtres ont rompu leurs liens canoniques avec le patriarcat de Moscou et se sont placés sous la juridiction de l’Eglise russe

« hors-frontières », une organisation ecclesiale fondée dans l’émigration au

début des années 1920 et dont la canonicité n’est pas reconnue par l’ensemble des Eglises orthodoxes autocéphales. Ces paroisses se sont regroupées

sous le titre d’ »Eglise orthodoxe libre de Russie » autour d’un évêque ordonné en secret par le Synode « hors-frontières » en 1982, l’évêque Lazare

Jourbenko, âgé de 79 ans, qui réside à Tambov. Un deuxième évêque, Valentin

Rouslavtsev, a été ordonné pour cette Eglise le 10 février dernier à Bruxelles. (apic/sop/be)

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