Un travail indispensable d’autant que le chef de l’Eglise catholique est bien conscient des critiques que sa récente encyclique sur l’environnement et ses prises de position répétées contre le pouvoir excessif de l’économie ont entraînées dans le monde anglo-saxon.
Le premier discours d’un pape devant le Congrès américain, le 24 septembre à Washington (Etats-Unis), fera date. Il n’y a pas de doute que, cet été, le pape François va particulièrement plancher sur cette allocution devant une assemblée – le Sénat et la Chambre des représentants – au sein de laquelle les Républicains sont désormais majoritaires. D’autant que celui que le président bolivien Evo Morales a présenté comme «le pape des pauvres» n’a pas que des amis aux Etats-Unis. Plus encore depuis son discours devant les mouvements populaires en Bolivie, lorsqu’il a notamment dénoncé de «nouvelles formes de colonialisme» comme «l’idole argent» et qu’il a invité les peuples à s’unir pour un «réel changement» de «système».
A deux mois de ce voyage, Kishore Jayabalan, directeur à Rome de l’Acton Institutene cache pas sa préoccupation, jugeant que «quoi que dise le pape, il sera instrumentalisé d’un côté ou de l’autre». Interpellé par I.MEDIA, le directeur de ce think tank catholique américain espère que le pape François saura «adapter le message à son auditoire». «Les Américains l’estiment, explique encore Kishore Jayabalan, ils l’aiment, mais ils ne le suivent pas nécessairement».
Concernant les questions économiques en particulier et les critiques auxquelles le pape argentin fait face, Kishore Jayabalan se dit partiellement rassuré : «Au moins, il a reconnu qu’il n’y connaît pas grand chose et qu’il doit travailler la question cet été». Interpellé sur la situation de la Grèce, de retour d’Amérique latine, le pape François avait ainsi confié qu’il était «allergique à l’économie» depuis son plus jeune âge.
L’Encyclique Laudato Si’ sur la protection de l’environnement est une autre pierre d’achoppement dans le monde anglo-saxon. La critique des excès du capitalisme et l’affirmation que l’homme est partiellement responsable du réchauffement climatique ne sont pas du goût de tous. Les critiques sont nombreuses et la dernière en date – mesurée – vient d’un proche collaborateur du pape. Dans une interview accordée au Financial Times, le cardinal australien George Pell a ainsi assuré que l’Eglise n’avait pas «d’expertise particulière en science». S’il a reconnu de «nombreux éléments intéressants» dans l’Encyclique Laudato si’, le préfet du Secrétariat pour l’économie a tout de mê me soutenu que «l’Eglise n’a pas de mandat de la part du Seigneur pour se prononcer sur les sujets scientifiques».
Dès lors, il n’est pas impossible que le pape François décide de répondre à ces critiques lors d’un autre discours majeur qu’il prépare cet été avec ses collaborateurs : celui qu’il prononcera le 25 septembre à New York devant l’Assemblée générale des Nations unies.
Le pape qui a tenu en ses mains un crucifix en forme de faucille et de marteau se veut pourtant rassurant. En juillet et en août, avec un agenda limité à quelques apparitions publiques, il va donc travailler dur sur les enjeux de son voyage à Cuba et aux Etats-Unis, du 19 au 28 septembre. «J’ai entendu que certaines critiques ont été faites aux Etats-Unis, confiait-il ainsi le 12 juillet dernier, je l’ai entendu. Mais je ne les ai pas lues et je n’ai pas eu le temps de bien les étudier, parce que chaque critique doit être reçue et étudiée pour que l’on dialogue ensuite». (apic/imedia/ami/pp)
Pierre Pistoletti
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