Homélie du 09 novembre 2014

Prédicateur : Père Benoît-Marie Clément
Date : 09 novembre 2014
Lieu : Abbaye de la Fille-Dieu, Romont
Type : radio

La mère et la tête de toutes les églises chrétiennes » : c’est l’inscription qui accueille le pèlerin qui visite la basilique chrétienne la plus ancienne de la Ville éternelle, dédiée au Saint Sauveur et aussi appelée St Jean de Latran, à cause du baptistère qui l’avoisine et parce que c’est l’empereur Constantin qui a donné son palais du Latran au pape Sylvestre pour qu’il en fasse sa résidence au lendemain de la paix de l’Eglise.

Mais pourquoi donc fêter cette dédicace lointaine, alors que nous avons près de nous des églises qui ont bien d’autres raisons de nous être chères ? Notre Père St Bernard se pose la même question : « Est-ce des pierres que Dieu s’occupe ? » Il inspira lui-même cette architecture très dépouillée que l’on admire dans nos églises cisterciennes construites à son époque, où tout est épuré pour enlever au moine toute occasion de distraction et ne le conduire que vers la lumière invisible de Dieu. Il y a bien une présence de Dieu particulière dans ces églises vénérables qui sont comme imprégnées de prière, parce qu’elles ont été consacrées exclusivement à la gloire de Dieu et en vue de la rencontre intime avec Lui, où des foules innombrables ont comme laissé leur trace de louange, de supplication et de confiance. On peut prier partout, mais nous prions mieux là, dans ces lieux où tout nous y aide, aux frontières du visible et de l’invisible. Et comme le corps humain est le temple du St Esprit, c’est Lui qui fait la sainteté de nos âmes, qui à leur tour sanctifient nos corps. De même, les pierres d’une église sont sanctifiées par la grâce de Dieu qui veut que là se rassemblent des chrétiens conscients de leur dignité : ce qui prouve la présence de l’Esprit Saint dans l’âme, c’est la vie spirituelle et l’amitié avec Dieu. Il y a quelque chose de personnel et quasiment incommunicable dans cette relation de la créature avec son Dieu, mais heureusement pour nous, nous ne sommes pas seuls à la vivre.

Nous avons tous besoin de nous soutenir les uns les autres dans ce labeur de sanctification, ce choix souvent difficile au milieu des tentations qui nous éloignent de Dieu. Il est donc essentiel que nous nous entretenions un dialogue personnel avec Dieu, mais aussi que nous prenions la peine de prier ensemble. Ainsi est alimenté le trésor de l’Eglise, en même temps que nous bénéficions de la ferveur commune.

La fête de ce jour nous ramène à la source de notre foi, transmise par les Apôtres. Avec les innombrables martyrs qui ont versé leur sang dans la capitale de l’Empire romain durant les trois premiers siècles de notre ère, ils nous en rappellent le prix. Car ce n’est pas rien que d’être entouré de cette foule glorieuse, autour du Pape de Rome qui est le serviteur de l’unité de l’Eglise. Il ne réside au Vatican que depuis l’époque moderne et la Basilique du Latran demeure sa cathédrale : voilà la raison pour laquelle nous célébrons partout dans le monde ce symbole de l’unité du Corps de l’Eglise autour du Pontife Romain, à la fois évêque de Rome et chef de toute l’Eglise. C’est là que chaque année, il célèbre la Messe du Jeudi-Saint où il lave les pieds de 12 pauvres, et où sont ordonnés les prêtres pour son diocèse. C’est là que les romains venaient par milliers au IVème et Vème siècles s’agréger au Corps du Christ par le baptême et la confirmation. Et depuis lors, le rituel de la consécration d’une église suit celui du baptême, ce qui est hautement significatif : comme le catéchumène, elle est lavée, consacrée par le St Chrême, marquée par la croix, habillée et illuminée. Que tous ces signes, faits une fois pour toutes en nous et en elle, viennent au secours de notre faiblesse. Qu’ils nous rassemblent toujours plus en un seul corps, comme les pierres unies entre elle pour former cet édifice qui plaît à Dieu et réjouit les yeux du corps et de l’âme.

Fête de la Dédicace de la Basilique du Latran, Rome

Lectures bibliques : Ezéchiel 47, 1-2.8-9.12; Psaume 45 ; 1 Corinthiens 3, 9b-11.16-17; Jean 2, 13-22

https://www.cath.ch/homelie-du-09-novembre-2014/