Homélie du 06 avril 2014

Prédicateur : Abbé Pascal Desthieux
Date : 06 avril 2014
Lieu : Eglise Saint-Joseph, Genève
Type : radio

« La mort n’existe pas ! »

Chers paroissiens et chers auditeurs, vous vous souvenez peut-être de cet article paru dans le journal gratuit d’un grand distributeur, quelques jours avant la Toussaint (Magazine Coopération du 29 octobre 2013). C’était le témoignage de Jean-Paul Duc, qui a été cliniquement mort pendant près d’une heure à la suite d’une crise cardiaque.

Il décrit son expérience dans un livre (Jean-Paul Duc, Entre la vie et la mort, mon cœur balance, 2012.) : il s’est vu à côté de son corps inanimé, percevant les personnes s’agiter autour de lui. Un être très lumineux s’est approché et lui a tendu doucement la main, « une très belle main », pour l’emmener avec lui. Il n’a bien sûr pas continué ce chemin, puisqu’il est là pour nous raconter son expérience, et il est revenu à la vie quand sa femme a couru vers lui et s’est même jetée sur lui. Il a senti alors une immense chaleur.

Il ajoute : « Avant, j’avais une peur abominable de la mort. Aujourd’hui, cette peur a disparu. Complètement. Avez-vous peur d’un ciel bleu ? Si quelqu’un a peur de la mort, qu’il sache au moins que c’est inutile : il n’y a pas de mort. Quand vous la verrez, vous comprendrez. »

Lazare, lui, est resté quatre jours, mort, dans le tombeau. Grâce à l’intervention de Jésus, il revenu à la vie. Dommage, il n’a pas écrit de bouquin… Cela nous aurait beaucoup intéressés ! Car c’est la question la plus fondamentale de tout être humain : que se passe-t-il après la mort ?

La plupart du temps, les personnes qui ont vécu une expérience de mort imminente – elles sont nombreuses – témoignent d’une grande douceur, d’une profonde paix, alors qu’elles progressent vers une intense et chaude lumière. C’est très beau, et cela correspond tellement bien avec notre foi chrétienne en la résurrection.

Il est vrai aussi qu’il y a des témoignages, heureusement beaucoup moins nombreux, où ce passage a été vécu douloureusement. Peut-être dans un grand regret de tous les manques d’amour et les égoïsmes.

Saint Jean de la Croix disait : « Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l’amour ». Il nous sera demandé, non pas de présenter nos diplômes, ni de déclarer tout ce que nous avons gagné, mais simplement : « As-tu aimé ? ».

Revenons à Lazare. Il est resté quatre jours dans le tombeau. Il faut donc préciser que ce qu’il a vécu dépasse largement les expériences de mort imminente. D’abord parce qu’il a été réellement mort. (Jésus le confirme : « Lazare est mort », et sa soeur Marthe le dit de manière très réaliste : « cela fait déjà quatre jours qu’il est dans le tombeau et il sent déjà »).

L’autre grande différence avec les témoignages que nous pouvons lire est que le Christ n’était pas encore ressuscité. Lazare a donc probablement été dans ce lieu de l’attente de la résurrection, lieu que l’on qualifiait généralement de « sommeil ». Jésus emploie d’ailleurs ce terme quand il dit : « Lazare s’est endormi, et je vais le tirer de son sommeil ».

Cela devait être aussi un lieu rempli d’espérance avec cette promesse rapportée par le prophète Ezéchiel : « Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai sortir, ô mon peuple ».

« Ton frère ressuscitera », dit Jésus. Marthe répond selon l’espérance des Juifs de son temps : « je sais qu’il ressuscitera au dernier jour, à la résurrection ». En relevant son ami Lazare, Jésus apporte un élément totalement nouveau : celui d’une résurrection imminente : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt vivra ». Désormais, puisqu’il va vaincre la mort, il n’y aura plus besoin d’attendre le dernier jour. Il est la résurrection.

Il nous permet de participer à cette résurrection par notre baptême, ce jour où nous avons été plongés dans la mort avec lui pour ressusciter avec lui. C’est ce qui faisait dire au cardinal Danneels, ancien archevêque de Bruxelles, qu’il y a deux dates fondamentales pour tout chrétien : la première est la résurrection du Christ, car depuis ce jour-là, la mort est vaincue. La seconde est notre propre baptême, puisque depuis ce jour-là, nous y participons.

À Marthe, Jésus avait demandé : « crois-tu cela ? » Cette question s’adresse à nous, et tout spécialement à vous les catéchumènes, qui serez baptisés dans deux petites semaines : croyez-vous que le Christ est la résurrection et la vie ?

Par notre baptême, nous avons déjà part à sa Résurrection, nous vivons du Ressuscité, avec lui et en lui. Bien sûr, il nous faudra encore passer par la mort physique pour que notre résurrection soit pleinement accomplie.

Vous me direz que vous n’êtes pas forcément pressés… Je repense à un brave paysan, plein de bon sens, qui disait : « Seigneur, c’est quand tu voudras, mais pas avant ! ».

En attendant de mourir, il nous reste à « vivre » cela, à « croire » cela. Ceux qui ont vécu une expérience de mort imminente témoignent qu’ils ne vivent plus de la même manière après ce moment si décisif de leur vie. Ils n’ont en général plus aucune peur de la mort et appréhendent la vie de manière très différente, en mettant beaucoup plus de priorité sur ce qui est essentiel.

Il devrait en être de même pour nous tous qui croyons au Ressuscité, et qui nous préparons à une expérience non pas de mort mais de résurrection imminente ! Nous ne devrions logiquement plus mener une existence sans amour, sans espérance, sans joie partagée. La vie d’un croyant est pleine de résurrection, pleine de vie, pleine de joie. Et surtout, notre foi nous aide à ne pas avoir peur de la mort : elle ne sera pas le dernier chapitre de notre vie, mais l’avant-dernier avant la vie et le bonheur éternels.»

5e dimanche de Carême

Lectures bibliques : Ezéchiel 37, 12-14; Romains 8, 8-11; Jean 11, 1-45

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