Homélie du 09 février 2014

Prédicateur : Abbé Giovanni Fognini
Date : 09 février 2014
Lieu : Paroisse du Saint-Esprit (Hôpital cantonal de Genève)
Type : radio

« Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde». J’avoue que ces paroles de Jésus me font du bien, tout simplement . Ce n’est pas tous les jours que quelqu’un dit de moi que je suis une lumière…- et certainement, cela est vrai pour vous aussi !- Alors, j’accueille ces paroles avec joie et reconnaissance ! En même temps, je découvre mieux quelle est la mission du chrétien à travers ces deux images, ces deux métaphores que Jésus emploie.

« Etre sel de la terre » ! Le sel …c’est ce qui donne du goût, de la saveur. Il conserve aussi les aliments et en empêche la décomposition ; enfin il fertilise la terre.

Avec un peu de sel, un plat, un met change de goût. Trop de sel, c’est immangeable, pas assez de sel, c’est … comme la cuisine de l’hôpital ! Du sel tout seul, c’est infect. Le sel n’a de sens, de goût que mélangé à autre chose. Il ne crée pas la saveur, il la révèle : bien équilibré, le sel met en relief, en valeur tous les autres aliments.

C’est pourquoi, Jésus dit à ses disciples : « vous pouvez être le goût, la saveur de la vie ; par votre témoignage et vos actes, vous donnez du goût, de la saveur aux hommes. Vous apportez de la qualité à la vie, de la fécondité à l’histoire. Vous permettez à chacun, chacune de se révéler, de prendre sa place, de retrouver sa dignité de femme et d’homme. »

C’est notre mission au cœur de ce monde : donner vie, apporter fécondité, être dans l’histoire une force qui conserve le monde.

Une mission énorme, alors que le sel, c’est minuscule, peu visible ! Et lorsque nous mettons du sel dans des aliments, il disparaît, il se dissout. Belle évocation d’un aspect important de notre témoignage : nous sommes cette petite chose, minuscule, mais tellement importante, ce sel de la terre pour les autres et non pour nous-mêmes, pour notre propre gloire !

L’autre image que nous laisse Jésus est celle de la lumière… « Vous êtes la lumière du monde ». Au contraire du sel, la lumière doit être visible et elle ne peut pas être cachée.

Restons toutefois modestes : Jésus seul est LA lumière du monde. Nous sommes une parcelle de cette lumière. La lumière ne crée pas le monde : elle le révèle, elle donne de voir clair.

Etre lumière dans des situations de la vie où les ténèbres semblent l’emporter ; être lumière dans des situations de maladie, d’handicap, d’injustice, de solitude, de mort… Etre lumière à travers un geste de solidarité, de présence.

Ici aussi, il y a un équilibre à trouver : trop de lumière aveugle, pas assez de lumière n’aide pas à voir clair ! Dans notre mission de chrétien au cœur du monde, nous avons à inventer chaque jour et dans chaque situation comment être lumière. La lumière du Christ doit briller en nous et on ne peut la cacher : les hommes doivent la voir, la goûter, être heureux de se laisser éclairer par notre témoignage.

Si jamais nous entendons cette parole « vous êtes la lumière du monde » pour nous gonfler les pectoraux ou pour nous mettre à la première place, la suite de l’évangile ajoute tout de suite un correctif de taille. « En voyant ce que vous faites de bien, les hommes rendront gloire à votre Père qui est aux cieux ». Ce n’est pas notre personne et notre petite gloire qui est première … mais Celui qui est la source de notre agir, de nos paroles, de notre témoignage : c’est-àdire le Père ! L’invitation qui nous est faite, c’est qu’en étant « sel de la terre et lumière du monde », les gens ne s’attachent pas à nous, mais découvrent Celui qui nous fait vivre, qui est la Source : le Père !

Quelques versets plus loin, dans l’évangile de Matthieu, Jésus invitera les siens à ne pas agir pour être vu. Ici aussi, équilibre à trouver, à créer ! Notre mission est d’être visible, d’éclairer le monde, par des paroles et des actes visible. En même temps, s’effacer car ce n’est pas moi que je révèle ou que j’annonce: c’est Dieu, c’est son Royaume, c’est sa saveur, c’est sa lumière !

Je retrouve ce même souffle dans les paroles de notre Pape François, dans sa dernière exhortation apostolique « La joie de l’évangile » qui n’a pas peur d’écrire – je le cite –

« Je dois dire en premier lieu et en toute justice, que l’apport de l’Église dans le monde actuel est immense. Notre douleur et notre honte pour les péchés de certains des membres de l’Église, et aussi pour les nôtres, ne doivent pas faire oublier tous les chrétiens qui donnent leur vie par amour : ils aident beaucoup de personnes à se soigner ou à mourir en paix dans des hôpitaux précaires, accompagnent les personnes devenues esclaves de différentes dépendances dans les lieux les plus pauvres de la terre, se dépensent dans l’éducation des enfants et des jeunes, prennent soin des personnes âgées abandonnées de tous, cherchent à communiquer des valeurs dans des milieux hostiles, se dévouent autrement de différentes manières qui montrent l’amour immense pour l’humanité que le Dieu fait homme nous inspire. Je rends grâce pour le bel exemple que me donnent beaucoup de chrétiens qui offrent leur vie et leur temps avec joie. Ce témoignage me fait beaucoup de bien et me soutient dans mon aspiration personnelle à dépasser l’égoïsme pour me donner davantage »

Notre pape vient de nous donner de belles pistes concrètes pour être sel de la terre et lumière du monde.

Le prophète Isaïe, dans la première lecture de ce jour, nous en donne d’autres :

Voilà la beauté et la grandeur de ce que nous sommes, par grâce, et de ce qui est notre mission : donner goût et saveur à notre terre, révéler la lumière du Christ au monde, par des paroles et des actes quotidiens. Pour la gloire de Dieu et pour notre bonheur. Amen»

5° dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques : : Isaïe 58, 7-10; Psaume 111; 1 Corinthiens 2, 1-5; Matthieu 5, 13-16

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