Homélie du 02 février 2014

Prédicateur : Chanoine Guy Luisier
Date : 02 février 2014
Lieu : Abbaye de Saint-Maurice
Type : radio

Est-ce que la fête de ce dimanche nous rejoint dans l’ordinaire de nos défis, dans les préoccupations qui nous habitent aujourd’hui? Il me semble que oui, et je souhaiterais vous le montrer même si au premier abord, Présentation, Chandeleur, Fête des lumières, Temple de Jérusalem paraissent nous faire glisser vers la nostalgie des réalités du passé. En fait plus profondément nous sommes en pleine actualité. Peut-être pas celle d’internet – bien sûr, quoi que ! Peut-être pas celle des manchettes de journaux, quoi que ! Mais plutôt une actualité qui s’inscrit dans notre destin fondamental.

Que faut-il entendre par là ? Nous sommes fondamentalement faits pour nous présenter aux autres et à l’Autre absolu. Nous sommes faits pour être présents, dans toute la force de ce mot, présents aux autres et l’Autre absolu, notre Dieu…

C’est de cela que parle la Fête de ce dimanche.

Car il s’agit de refaire connaissance avec trois beaux mots de notre univers culturel, de les réapprivoiser, de leur donner une lumière nouvelle. Ces trois mots sont : présentation, présenter, présent.

Car en fait nous n’existons que dans le présent – quel beau mot avec son ambiguité de sens ! C’est le présent qui donne du sens à notre passé et construit notre avenir.

Une belle famille de mots. Présentation, présenter, se présenter, présent… Voilà des expressions qui même hors de toute connotation religieuse ont un certain coffre, une certaine profondeur, un relief certain.

Peut-être même faut-il d’abord les débarrasser, ou nous débarrasser du vernis théologique et théorique pour les découvrir dans leur force et leur dynamisme.

Parlons d’abord de présentation.

On parle dans la vie professionnelle et sociale d’une « bonne présentation », et la plupart des gens conviennent qu’il s’agit d’une réalité importante. Quand on cherche à décrocher un poste, quand on se rend pour la première fois devant un patron, il faut une bonne présentation, subtil équilibre entre des normes sociales et des mises en valeur individuelles. Dans notre société, même si les bons usages deviennent plus hétérogènes et flous, on attache tout de même une importance à une bonne présentation.

On y sent une idée de respect de l’autre, d’un effort de lissage de la vie sociale afin que chacun se sente respecter dans ce qu’il est, dans ce qu’il veut. On est dans l’ordre de la communication de soi. Cela a quelque chose à voir avec de la politesse et de la solidarité féconde. Chacun peut en convenir.

Et c’est ici qu’arrivent les mots présenter et présent.

Il y a une idée d’offrande, de don, de cadeau.

Il y a donc l’idée d’une gratuité. Se présenter, c’est se donner, s’offrir, avec les risques si magnifiques et humains de s’exposer et de se fragiliser. On est démuni lorsqu’on offre, lorsqu’on s’offre, on se met à la merci des autres.

Et voilà que l’air de rien, en regardant les belles harmoniques de ces mots nous arrivons en pleine spiritualité, en plein dans l’évangile.

Jésus est un homme. A travers ses humbles parents, ce bébé d’homme a voulu être présenté à son Père divin dans le Temple de Jérusalem. Jésus est en même temps Dieu, à travers ses humble parents, ce bébé, Dieu, est présenté petit et fragile à son peuple. Dieu comme un bébé fut présenté à la merci des passants. C’est une manière pour lui de se mettre à nos côtés. C’est sa façon de devenir présent à nos côtés, nos côtés humbles, démunis fragiles et petits.

La toute-puissance de Dieu se révèle tout autant dans la force active de l’homme Jésus que dans sa solidarité avec nos côtés humbles, démunis et fragiles.

Aujourd’hui par une belle coincidence de calendrier, nous mettons un hallo de lumière tant sur les laïcs dans l’Eglise que sur les consacrés. La place de chacun dans le peuple- Eglise est relative à la place qu’on donne à Dieu dans ce Peuple.

Ainsi est-il plus que jamais nécessaire, chacun à sa place et dans sa vocatin originale et personnelle, de nous plonger dans le mystère de la présence de Dieu parmi nous et de l’approfondir…

A ce stade de notre réflexion, on voit se dessiner une magnifique image de Dieu.

En Jésus c’est Dieu qui se présente à nous et l’homme qui se présente à Dieu.

Ainsi nous voyons se dégager un des plus beaux titres de Dieu. Dieu est le présent, avec le double et magnifique sens que prend le mot présent en français. Dieu est le présent, parce qu’il est l’aujourd’hui éternel. Dieu est le présent parce qu’il est le don, le cadeau éternel de l’humanité.

Qu’est-ce que cela implique au ras des paquerettes de notre quotidien. Cela veut dire qu’il ne faut pas aller chercher Dieu désormais ailleurs que dans le présent. Ce présent, cet aujourd’hui quel qu’il puisse être (souvent trivial, tellement ordinaire, souvent plat ou décourageant mais aussi si riche de potentialités diverses) est le lieu et le moment du vrai compagnonage avec Dieu. Dieu est présent. Et il est d’autant plus présent et démuni devant nous que nous cherchons à l’évacuer de ce qui ne nous plaît pas dans notre vie.

A cette réalité de présent de Dieu, doit répondre la réalité de notre présent à nous. Ainsi deux questions : Est-ce que nous sommes vraiment présents à la vie, à notre destin, à nos défis, à Dieu ou bien est-ce que nous nous divertissons dans les fuites diverses, nous fuyons dans les divertissements divers.

2 février. Fête de la présentation de Jésus au Temple, Fête du présent de Dieu à l’homme, et du présent de l’homme à Dieu.

Quelle que soit notre place dans l’Eglise et dans le monde, laïcs, consacrés, actifs, retraités, malades, nous pourrions profiter de cette journée pour accueillir plus humblement la présence de Dieu dans notre présent tel qu’il est. Si nous le faisons avec toute la douceur simple dont notre destin est capable, une lumière de salut se lèvera simplement sur nous et sur le monde.»

Fête de la Présentation du Seigneur

Lectures bibliques : Malachie 3, 1-4; Psaume : 23; Hébreux 2, 14-18; Luc 2, 22-40

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