Homélie du 10 novembre 2013

Prédicateur : Abbé Vincent Marville
Date : 10 novembre 2013
Lieu : Basilique Notre-Dame, Neuchâtel
Type : radio

Cette histoire des sadducéens n’a pas de sens. Des frères bien alignés, tout autant stériles et disposés à mourir selon leur rang. Dans l’agenda de la veuve, l’aîné s’efface avant le cadet, le lundi meurt avant le mardi, puis vient le mercredi ; mais tout ça sans réelle fécondité. « Que reste-t-il de tout cela, dites-le moi ! » chantait Charles Trenet :

Que reste-t-il de ces beaux jours

Des mois d’avril, des rendez-vous

Que reste-t-il de tout cela, dites-le moi !

Et si toute cette histoire improbable était invariablement la nôtre ? Celle de notre quotidien bien sage, qui s’efface sans laisser de trace.

Et dans ces 7 jours, lequel est-il prépondérant ? demandent les sadducéens. Jésus répond : ›c’est le 8e, c’est le jour de la résurrection’. Car je me permets une relecture de l’histoire des 7 maris stériles avec nos jours de la semaine, lesquels ne sont pas forcément féconds en termes de relations. Jeudi, vendredi… et vient enfin le week-end. Ou alors, peut-on voir le dimanche comme échappant au cycle des 7 jours ?! « Venant après le sabbat, le dimanche peut être considéré non seulement comme le début d’une nouvelle semaine, mais aussi comme un au-delà du sabbat, un 8ème jour. Un jour surnuméraire, qui fait déboucher dans le temps de Dieu et nous fait déjà toucher du doigt les temps derniers ; cette conception a été très importante pendant des siècles. » J’emprunte la réflexion à un conférencier chargé de dresser l’origine du dimanche. (Père Philippe Lefebvre, OP ; intervenant à la session diocésaine)

Ce 8e jour, c’est le « dimanche pour la vie » : tel a été le titre de la récente session diocésaine, qui a réuni quelques 420 prêtres, diacres et agents pastoraux laïcs du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg. Lors de cette session de trois jours, le diocèse a cherché par quel point de vue mieux mettre en valeur le dimanche comme étape de rassemblement et de ressourcement. Les optiques sont nombreuses, que l’on vienne de la pastorale des jeunes, de la pastorale des malades ou tout simplement d’une paroisse traditionnelle. Mais tout d’abord, un peu d’histoire.

Jusqu’au 4ème siècle, les chrétiens célèbrent le dimanche alors que la société où ils sont ne le considère pas du tout comme un jour chômé. On a de beaux témoignages sur la célébration du dimanche, dès le 2ème siècle. Les persécutions n’arrêtent pas le courage des martyrs, ces martyrs témoins du Christ bien sûr, mais également témoins du dimanche, tels ces jeunes de la ville d’Abithina en Afrique proconsulaire :

«Nous avons célébré la Cène du Seigneur sans aucune crainte, parce qu’on ne peut y renoncer; c’est notre loi » ;

« Nous ne pouvons pas vivre sans la Cène du Seigneur », sans le repas du Seigneur.

 

En Orient, St Jean Chrysostome indique en quoi la participation à la célébration forme un plus :

Tu ne peux pas prier à la maison comme à l’Église, où il y a le grand nombre, où le cri est lancé à Dieu d’un seul cœur. Il y a là quelque chose de plus, l’union des esprits, l’accord des âmes, le lien de la charité, les prières des prêtres.

Mais nous sommes en 2013. La résurrection n’est plus comprise comme une réalité si essentielle qu’elle imprimerait déjà sa marque dans notre calendrier. Cependant, il est important de « ne pas nous poser comme victimes d’une société jugée hostile au dimanche, avertit le Père Wernert, un des conférenciers de la session venu de Strasbourg. Il s’agit d’être acteur d’une communauté qui croit au sens du dimanche dans des formes visibles, ouvertes et heureuses ».

Au moment de commencer une nouvelle semaine, quel jour m’aura spécialement marqué ? Le jour de la lessive, le jour des courses, ou la date de mon opération ? Quel jour sera véritablement fécond, dans cette succession de dates, de saisons, puis d’années ? Quel jour sera-t-il celui de l’alliance, d’un mariage durable, le jour qui me remplit ?

Jésus répond : «Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la résurrection d’entre les morts, ne se marient pas, car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu, en étant héritiers de la résurrection.

Héritiers de la résurrection, proximité des anges, monde à venir : quel feu d’artifice ! Savons-nous encore percevoir toute cette fête, toute cette richesse dans l’humble célébration dominicale de notre paroisse ?»

32e dimanche du temps ordinaire

Lectures bibliques : 2 Maccabées 7, 1-2.9-14; Psaume : 16, 1ab.3ab, 5-6, 8.15; 2 Thessaloniciens 2, 16 – 3, 5; Luc 20, 27-38

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