Homélie du 21 avril 2013

Prédicateur : Abbé Nicolas Glasson
Date : 21 avril 2013
Lieu : Eglise Sainte-Thérèse, Fribourg
Type : radio

Chers frères et sœurs,

Les quelques versets du discours du Christ sur le Bon Pasteur que nous venons d’entendre disent que le Bon Pasteur, Jésus Christ, est Dieu. Et si nous lisons le début de la parabole du Bon Pasteur (Jn 10, 1-20), nous apprenons que le Christ-Dieu n’est pas seulement le Bon Pasteur de son troupeau, mais qu’il est aussi la Porte de la bergerie (Jn 10, 7). Et alors le Christ parle d’autres pasteurs, qui, en son nom, doivent, au long de l’histoire, conduire son peuple à Dieu, mais qui pour ce faire doivent passer par la Porte qu’il est lui-même, Jésus-Christ. Et si l’on tient à la fois que le Christ est le Bon Pasteur et la Porte de la bergerie, alors on peut comprendre un peu mieux la nature de la relation entre le prêtre et la communauté chrétienne que l’évêque lui confie (Cette thèse est développée par Dom Mauro-Giuseppe Lepori O. Cist, ancien Père Abbé d’Hauterive et actuel Père général des Cisterciens, dans une conférence au Séminaire de Fribourg en 2010).

Le berger qui n’entre pas par la porte qu’est le Christ, mais qui, pour entrer dans la bergerie, escalade par un autre endroit, celui-ci n’est pas un pasteur, mais un voleur et un bandit ; on pourrait même dire un abuseur. Traduisons pour les pasteurs d’aujourd’hui : le prêtre ou l’évêque qui n’entre pas en relation avec sa communauté par la porte, par le Christ, celui qui n’entretient pas sa relation avec le troupeau par le Christ, n’est pas le pasteur des brebis, mais c’est un bandit. Ce qui définit le bandit, c’est le faux accès qu’il a pour entrer en relation avec son troupeau.

En ces temps de l’Eglise où, chez nous, il est difficile d’être prêtres, il est bon de prendre conscience que la bonté du pasteur dépend de l’accès qu’il a au troupeau par le Christ, de la relation qu’il vit avec le troupeau dans le Christ. Si le pasteur rate la porte, l’unique accès légitime à sa communauté, il rate toute la relation avec elle, il rate tout son ministère, il rate tout ! C’est l’accès à la communauté qui détermine l’identité du responsable du troupeau, bon pasteur ou mercenaire.

Le Christ demande aux évêques et aux prêtres d’avoir la même relation que lui à son troupeau, d’être pour la communauté des bergers comme lui, donc des bergers qui ne convoitent pas le troupeau pour en retirer un quelconque avantage mais qui donnent leur vie pour lui. Il demande aux évêques et aux prêtres de faire-leur le destin de leur communauté, en adhérant à cette communauté jusqu’à donner leur vie, cela veut dire jusqu’à la mort, à l’image du Bon Pasteur qui devient lui-même l’Agneau immolé. Le bon pasteur n’est pas à côté, au-dessus ou au-dessous de son troupeau, mais il est avec et dans sa communauté.

C’est donc dans la juste compréhension d’accès à son troupeau et d’appartenance à la communauté dans le Christ, par une communion inconditionnelle avec le destin de cette communauté, que le prêtre d’aujourd’hui doit comprendre la nature et le sens de son ministère et de sa vocation. Mais cela veut dire que l’existence d’une communauté de foi réelle et bien vivante est nécessaire pour que le pasteur puisse exercer son ministère. En ce dimanche de prière pour les vocations religieuses et presbytérales, il est non seulement bon d’approfondir le sens du ministère presbytéral diocésain, mais il est aussi nécessaire de poser la question de la vitalité de nos communautés chrétiennes : il est bon de se demander si les pasteurs de l’Eglise ont vraiment une communauté qui les aide à devenir de bons pasteurs, une terre dans laquelle ils peuvent vraiment enraciner leur vie, leur ministère et leur vocation, pour porter le fruit d’une Eglise qui vit et fait vivre l’humanité. Il n’y a pas de pasteur sans communauté.

Chers frères et sœurs, nous comprenons que la prière pour les vocations commence par un examen de conscience dans le silence de chacun de nos cœurs de pasteurs et de fidèles. C’est la vitalité de notre foi et la ferveur de notre amour qui exercent une efficacité réelle sur l’éclosion des vocations dans l’Eglise, malgré les raisons trop humaines par lesquelles nous expliquons la raréfaction des vocations. Le pape François avertissait ainsi des évêques : « Devant la pénurie de vocations, nous faisons parfois des diagnostics de riches : riches du savoir des sciences anthropologiques modernes qui, avec leur masque de suffisance absolue, nous éloigne de l’humble prière de supplication et de demande au Maître de la moisson » (Pape François, Amour, service et humilité, Magnificat, Paris 2013, p. 15) .

Nous savons qu’il y a un peu partout en Suisse romande des cœurs priants transformés par la foi, des cœurs suffisamment pauvres pour être exaucés, des cœurs auxquels nous nous unissons aujourd’hui pour demander au Seigneur les vocations dont l’Eglise a besoin. Amen.»

4e dimanche de Pâques et Dimanche du Bon Pasteur

Lectures bibliques : Actes 13, 14.43-52 ; Apocalypse 7, 9.14b-17 ; Jean 10, 27-30

https://www.cath.ch/homelie-du-21-avril-2013/