Dans le sillage des rencontres d’Assise, ce colloque est un lieu de rencontres interreligieuses et sociales. « La famille franciscaine a toujours en esprit la rencontre de saint François avec le Sultan[1], explique Denise Savioz, secrétaire du Souffle d’Assise. Apprendre à se connaître et à dialoguer fait partie du charisme franciscain. C’est aussi l’esprit dans lequel ont eu lieu les rencontres du week-end. »
Et cet esprit s’est incarné à travers quatre conférences qui ont été autant d’optiques pour aborder le lien du religieux au monde. Premier intervenant à ouvrir les feux, le pasteur genevois Henri Nerfin, secrétaire du Groupe citoyen « Culture religieuse et humaniste à l’école laïque », a rappelé l’importance de la quête de sens, « dont l’Education Nationale ne peut faire litière », « sans pour autant reconnaître aux ‘religions’ un quelconque monopole du sens ». « Les religions instituées n’ont ni exclusivité ni supériorité a priori » quant aux « anxiétés métaphysiques de l’être humain ». Il appartient néanmoins à l’Etat d’assurer « la transmission du fait religieux », au risque de favoriser « la pathologie du terrain », a affirmé le pasteur genevois.
Dans une perspective concrète, Henri Maudet, secrétaire de la Plateforme Interreligieuse de Genève, a rappelé « l’importance de la connaissance permettant un dialogue amical et intelligent entre personnes qui ont soif de se découvrir ». « Permettre un espace de parole, parfois conflictuelle, est une nécessité vitale pour la bonne santé du vivre-ensemble », soutient-il, et ce particulièrement à Genève, « ville internationale, où plus d’une centaine d’entités religieuses coexistent ».
Le vicaire général du diocèse de Sion Pierre-Yves Maillard a pour sa part souligné les ambigüités historiques qu’a entretenu le christianisme dans son rapport au monde. En prenant appui sur l’Evangile de Marc – « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu», Mc 12, 17 – et sur les Constitutions conciliaires Gaudium et Spes et Lumen Gentium, il a indiqué la manière dont l’Eglise s’est récemment ouverte au monde. « L’Eglise est au service de l’humanité », car « chaque homme porte en lui les semences du divin », a affirmé le prêtre valaisan.
Le témoignage, dimanche, de Latifa Ibn Ziaten, invitée « exceptionnelle » de ces rencontres franciscaines, a ému l’assemblée. Latifa Ibn Ziaten, musulmane pratiquante de Rouen est la mère d’Imad, premier militaire tué par le terroriste Mohamed Merah, en mars 2012 à Toulouse. La mort de son fils est devenue pour elle une « source de vie ». En fondant l’association « Imad Ibn Ziaten pour la Jeunesse et la Paix », elle lutte désormais contre la violence et l’inhumanité auprès des jeunes dans les écoles, mais également dans les prisons. « Il faut toujours regarder l’autre sans peur, les yeux dans les yeux, à hauteur d’homme », a-t-elle affirmé.
Ses rencontres, organisées chaque année depuis 2006, vingt après la rencontre d’Assise, auront lieu l’an prochain à nouveau. Elles marqueront le trentième anniversaire de la première journée mondiale de la prière instituée par le pape Jean-Paul II. (apic/com/pp)
[1] La rencontre de François d’Assise et du Sultan Al-Kâmil a certainement eu lieu pendant la cinquième croisade (1217-1221), très vraisemblablement au mois de septembre 1219, près de la forteresse de Damiette, au nord-ouest de l’embouchure du Nil, pendant une trêve entre l’armée et celle des croisés.
Pierre Pistoletti
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