Délégation catholique/protestante suisse au Liban: appel à la solidarité avec les réfugiés

Les chrétiens de Syrie et d’Irak réfugiés dans les pays voisins doivent pouvoir rentrer chez eux. L’exode massif des chrétiens, forcés de quitter des terres qui ont vu naître le christianisme, est une «tragédie». Il faut œuvrer pour qu’ils ne soient pas déracinés, estime la délégation commune de la Conférence des évêques suisses (CES) et de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) qui s’est rendue au Liban du 23 au 27 novembre 2015.

Au cours de la conférence de presse tenue le 26 novembre au siège du catholicossat arménien de Cilicie à Antélias-Beyrouth, la délégation emmenée par le président de la CES, Mgr Markus Büchel, et le président de la FEPS, le pasteur Gottfried Locher, a relevé la signification de ce voyage de solidarité avec les minorités religieuses menacées.

«Une première œcuménique qui ne devrait pas être la dernière»

«C’est une première œcuménique qui ne devrait pas être la dernière», ont souligné les deux responsables religieux à l’occasion de la présentation d’une déclaration commune intitulée «La liberté religieuse, ressource pour l’avenir d’une société multiculturelle».

Ce voyage à la découverte de la pluralité sociale et religieuse du Liban – qui comprenait notamment des rencontres avec les chefs des différentes communautés religieuses chrétiennes, sunnite, druze et chiite – a permis aux représentants des deux principales confessions chrétiennes de Suisse de toucher de près la réalité tragique des réfugiés. Ils ont pu entendre les témoignages de familles fuyant les bombardements et les exactions des groupes terroristes djihadistes qui contrôlent une bonne partie de la Syrie.

Les leaders chrétiens craignent un changement brutal de régime à Damas

Les échanges ont permis de mettre en évidence le fait que tant qu’aucune paix durable ne sera établie au Moyen-Orient, les chrétiens, comme les autres minorités, tels les yézidis, demeureront une cible particulièrement vulnérable pour les groupes usant de la violence et de la terreur. Les leaders chrétiens rencontrés, qui n’ont pas caché les souffrances subies durant l’occupation syrienne du Liban (les derniers soldats syriens quittèrent le pays en avril 2005), se sont tous prononcés contre un changement brutal de régime à Damas.

Ils craignent en effet le terrible chaos que pourrait engendrer la prise de pouvoir par les extrémistes de Daech, l’Etat islamique, ou du Front al-Nosra. Cette éventualité amènerait inexorablement la fin des chrétiens dans la région, les djihadistes ne tolérant aucun pluralisme religieux, sans parler de l’exportation du terrorisme en direction de l’Europe. Les leaders chrétiens libanais ont souhaité que les Européens soient plus vigilants en accueillant en masse les réfugiés musulmans en provenance de Syrie ou d’Irak, en procédant aux contrôles de sécurité requis. Ils mettent en garde contre l’infiltration d’éléments djihadistes, comme c’est déjà le cas au Liban, en particulier dans la région d’Ersal, dans la Békaa Nord, à la frontière syrienne, ou dans la ville de Tripoli.

La délégation, composée de huit personnes, a rendu visite à des projets d’œuvres d’entraide catholiques et réformées, comme une école évangélique arménienne à Beyrouth, qui accueille des enfants syriens réfugiés, grâce au soutien de l’œuvre d’entraide protestante «Action Chrétienne en Orient» (ACO). Elle s’est également rendue à Zahlé, dans la plaine de la Békaa, où l’Eglise grecque-catholique melkite locale accompagne des familles de réfugiés avec le soutien de l’œuvre d’entraide catholique «Aide à l’Eglise en détresse» (AED).

A Zahlé, avec les réfugiés chrétiens qui ont fui Daech et al-Nosra

Lors de ses rencontres avec des réfugiés, la délégation a été confrontée avec le fait inquiétant que l’aide internationale passe trop souvent à côté des réfugiés chrétiens. A la différence des réfugiés musulmans, ils ne sont pas hébergés dans des camps de tentes, mais sont dispersés dans la ville, dans des maisons ou des garages aménagés en logements précaires qu’ils doivent souvent payer à des prix exorbitants.

L’archevêché grec-catholique de Zahlé, qui vient en aide à quelque 3’000 réfugiés chrétiens, prend en charge une partie des loyers, de l’aide médicale ou de la scolarité des enfants, qui coûte très cher au Liban. Sans cette intervention, ces familles ne pourraient tout simplement pas survivre. L’Eglise locale, qui fournit une aide appréciable, cherche à ce qu’ils restent sur place en attendant de rentrer au pays. Mais de nombreux jeunes, qui ne voient plus d’avenir dans leur pays ruiné, ne pensent qu’à émigrer vers les Etats-Unis, l’Europe ou l’Australie.

Plaidoyer pour la liberté de religion et le pluralisme religieux

Plaidant dans sa déclaration commune sur la liberté de religion et le pluralisme religieux, condition d’une paix durable, la délégation œcuménique souligne qu’aucune véritable société humaine ne peut se construire sans respect de la liberté d’exercer sa foi et sa religion, individuellement ou en communauté. «C’est pourquoi la liberté religieuse est une ressource indispensable pour l’avenir d’une société multiculturelle, que ce soit en Suisse, en Europe, en Orient ou ailleurs dans le monde», peut-on lire dans le document commun signé par le pasteur Gottfried Locher et Mgr Markus Büchel, évêque de Saint-Gall.

Le président du Conseil de la FEPS et le président de la CES soulignent que les religions sont indispensables à la vie en société, «car elles sont un élément constitutif de l’existence humaine et participent à la création de valeurs nécessaires pour la vie en société. Ces valeurs permettent à tous de vivre ensemble dans le respect mutuel, la solidarité, la justice et la paix. Les valeurs chrétiennes d’amour, de foi et d’espérance offrent des perspectives essentielles. Des valeurs comparables se trouvent également au cœur des autres religions».

Appel aux collectes en faveur des réfugiés syriens au Liban

Les œuvres d’entraide des Eglises accomplissent au Liban des services indispensables dans l’accompagnement et le soutien des réfugiés, notent la CES et la FEPS. Elles appellent à cette occasion leurs fidèles et les responsables politiques en Suisse à soutenir leurs coreligionnaires opprimés et persécutés et à les soutenir moralement, mais également matériellement. La Fédération des Eglises protestantes et la Conférence des évêques demandent aux communautés et paroisses de Suisse de soutenir ces organisations, en particulier les œuvres d’entraide «Action Chrétienne en Orient» (protestante) et «Aide à l’Eglise en détresse» (catholique) par des dons ou des collectes durant la période de l’Avent ou de Noël. (cath.ch-apic/be)


Les dons et collectes peuvent être versés, avec mention «Aide aux réfugiés syriens» à «Action en Orient», c/o DM – Echange et Mission, CCP 10-700-2, IBAN CH08 0900 0000 1000 0700 2; et à «Aide à l’Eglise en détresse», CCP 60-17200-9, IBAN CH38 0077 8010 0177 9301 0

 

Jacques Berset

Portail catholique suisse

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