Brésil: Le CIMI appelle à lutter contre la haine à l’égard des peuples indigènes

Cleber Buzatto, le coordinateur du Conseil indigéniste missionnaire (CIMI), dénonce l’augmentation des discours de haine à l’encontre des peuples indigènes du Brésil. Mettant en cause la «bancada ruralista», à l’origine de ce phènomène, il en fait le «point principal de lutte» des indigènes en 2016.

«La «bancada ruralista» (groupe parlementaire informel qui réunit tous les élus liés à la défense des intérêts de l’agrobusiness) tente de faire avancer la proposition d’amendement de la Constitution (PEC 215) destiné à empêcher les démarcations de terres indigènes et remettre en cause celles qui l’ont été. Elle tient pour cela des discours d’incitation à la haine et à la violence pour justifier les actions contre les peuples indigènes. Tout cela ne fait qu’exacerber les tensions», déplore Cleber Buzatto.

Depuis le début de l’année, plusieurs cas viennent en effet corroborer les propos du coordinateur. Parmi lesquels, l’assassinat de Vitor Kaingang, âgé d’à peine huit ans, à Itumba, une petite ville de l’état de Santa Catarina (SC), au sud du Brésil. Autre exemple, l’assassinat d’un indigène, le 15 janvier, à Belo Horizonte (Minas Gerais- MG), au centre du pays.

Attaqués par des hommes de main

Au-delà de ces deux homicides, des peuples indigènes des états du Mato Grosso (MS) du Sud et de Bahia (BA), ont essuyé de violentes attaques en ce début d’année. Dans la ville de Juti (MS), des représentants du peuple Guaranis-Kaiowa ont ainsi été attaqués par des hommes de main alors qu’ils reprenaient possession d’une parcelle de terre indigène sur la commune de Taquara, occupée illégalement jusqu’à lors par des fazendeiros (grands propriétaires terriens).

A ce sujet, Cleber Buzatto a précisé qu’une zone de 9’700 hectares avait déjà été déclarée par le Ministère de la Justice comme terre traditionnelle dès 2010 sur la commune de Tinquara. Les 600 familles de cette ethnie de la région n’occupent  actuellement qu’une parcelle de 300 hectares de cette réserve.

«Malheureusement, le gouvernement fédéral n’a pas effectué le suivi administratif qui prévoit l’homologation et le reste de la zone continue d’être exploité par les grands propriétaires terriens», s’indigne Cleber Buzatto. «Les Guarani, ajoute-t-il, en revendiquent la possession, mais les fazendeiros utilise la force pour empêcher que la loi soit respectée».

«L’État doit assumer ses responsabilités»

Paulo Pimenta (Parti des Travailleurs), Président de la Commission des Droits Humains de la Chambre des Députés s’est rendu récemment dans l’état du Mato Grosso du Sud avec des représentants de la Fondation Nationale de l’Indien (Funai), chargée de faire respecter les droits des peuples indigènes au Brésil. La délégation comptait aussi des fonctionnaires du Ministère Public Fédéral (MPF).

Marqué par les constats effectués sur place et la situation précaire des Guarani, Paulo Pimenta a demandé une plus grande souplesse dans l’application des processus démocratiques. «Cette situation requiert une solution et cette solution passe par un pouvoir public qui assume ses responsabilités en ce qui concerne les homologations de terres (indigènes) et fasse en sorte que ces décisions soient suivies de faits», insiste Paulo Pimenta.

Réintégration de propriété

Pourtant les faits ne vont pas forcément dans ce sens. Le 19 janvier dernier, dans le sud de l’état de Bahia, 24 familles de la tribu Pataxó ont été surprises par une centaine de membre des polices militaire, civile et fédérale. Elles ont été ainsi délogées de la communauté Cahy. Plusieurs édifices, y compris le poste de santé et l’école, ont été détruits.

«La réintégration de propriété a été réalisée par surprise, le jour même où la communauté était en train de s’organiser pour la fête de Saint Sébastien. L’école était déjà prête pour la rentrée scolaire (à partir du 15 février). Les policiers ont sorti tout ce qui se trouvait dans l’école et dans les maisons, puis sont allés le jeter dans une zone distante de plus d’un kilomètre de la communauté. Aujourd’hui, nous nous retrouvons à la rue, sans savoir où aller», se désole le cacique Xawã Pataxó.

Pour Cleber Buzatto, cette action est d’une extrême gravité, dans la mesure où la justice a autorisé la réintégration d’une zone pourtant déjà identifiée comme traditionnelle. La Fondation Nationale de l’Indien (Funai) a indiqué qu’elle allait se porter partie civile dans cette affaire. (cath.ch-apic/jcg/bh)

 

Bernard Hallet

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