Brésil: l’ex-président Lula a écrit au pape

Dans une longue lettre ouverte adressée au pape François le 2 septembre 2016, l’ancien président brésilien Lula da Silva dénonce la»gravissime situation politique et institutionnelle que vit le Brésil» avec la destitution de la présidente Dilma Rousseff.

Le document de sept pages, rédigé en espagnol, dénonce notamment les»forces conservatrices qui ont agi contre le pays. Lula commence sa lettre en informant le pape sur la»gravissime situation politique et institutionnelle que vit le Brésil». L’ancien président précise qu’il a pris la liberté d’écrire au nom de l’amitié que le souverain pontife éprouve pour le Brésil.

Dans un vibrant plaidoyer pro domo, l’ex-président rappelle que»par des moyens démocratiques et pacifiques», le gouvernement du Parti des Travailleurs (PT) est parvenu à sortir le Brésil de la carte de la faim de l’ONU,»libérant de la misère» plus de 35 millions de Brésiliens, en plus»d’augmenter le revenu et la capacité de consommation de 40 autres millions de personnes», ce qui a provoqué, souligne-t-il, le plus grand mouvement de mobilité sociale de l’histoire du Brésil.

Lula affirme que, après la victoire de Dilma Rousseff en 2014, face à une»puissante coalition de partis», les adversaires n’ont pas accepté la défaite et»ont tenté de contester le résultat par tous les moyens légaux, sans succès.» L’ancien président écrit que, à partir de ce moment-là,»les partis défaits et les grands groupes de communication se sont rebellés contre les règles du régime démocratique, commençant à saboter le gouvernement et à conspirer afin de prendre le pouvoir par des moyens illégitimes.»

«Dilma, une femme intègre»

Durant l’année 2015,»avec des efforts massifs de paralyser le pays, ils (n.d.l.r. les partis politiques) ont agi contre le pays, votant au Parlement un ensemble de mesures irresponsables destinées à compromettre la stabilité fiscale». Et de rajouter qu'»ils n’ont pas hésité à déclencher le processus de destitution anticonstitutionnel et complètement arbitraire contre la présidente de la République.»

Dès lors, dans le courrier, Lula va défendre Dilma Roussef,»une femme intègre dont l’honneur personnel et public est reconnu jusque dans les rangs de ses adversaires les plus farouches. Elle n’a d’ailleurs jamais été, et ne l’est toujours pas aujourd’hui, accusée d’un quelconque acte de corruption.»

Violation des règles démocratiques

Lula affirme à ce titre que le gouvernement de Dilma Rousseff n’a pas commis de crime de responsabilité fiscale et assure que les procédures comptables, utilisées comme prétexte pour destituer la présidente, n’ont jamais été utilisées comme argument pour pénaliser un quelconque gouvernement. Il s’agit en fait d’un processus strictement politique qui viole ouvertement la Constitution et les règles du système présidentiel», affirme Lula.

Dans la dernière partie de la lettre, Lula écrit que»les forces conservatrices veulent obtenir par des moyens obscurs ce qu’elles n’ont pas pu obtenir par la voie démocratique: empêcher la continuité et l’avancée du projet de développement et d’inclusion sociale porté par le Parti des Travailleurs, et imposer au pays un programme politique et économique défait par les urnes.»

La»généreuse attention» du pape François

En conclusion, l’ex-président souligne que ces mêmes forces veulent aussi criminaliser les mouvements sociaux et l’un des plus grands partis de la gauche démocratique d’Amérique latine, le Parti des Travailleurs.» Et de rajouter: «Il ne s’agit pas de simple rhétorique, car le PSDB (n.d.l.r. Parti de la Sociale Démocratie Brésilienne-centre gauche) a déjà présenté une demande formelle de dissolution du Parti des Travailleurs», assure Lula.

D’après l’ex-président, ils ont peur que, lors des élections libres, le peuple brésilien puisse le réélire président de la République, pour sauver le projet démocratique et populaire. Lula écrit encore que le combat contre la corruptionest devenu beaucoup plus vigoureux sous le gouvernement du PT et assure personnellement ne craindre aucune enquête. En revanche, l’ex-président souligne que»ce que je ne peux pas accepter, ce sont les actes pratiqués contre moi et contre ma famille par les autorités judiciaires et policières.»

Lula considère que sa trajectoire de plus de 40 années de militantisme démocratique est son plus grand patrimoine et que personne ne le fera renoncer à cela.

Avant de signer, Lula remercie «la généreuse attention que Sa Sainteté a dédié à cette lettre» et qu’il se tient à sa disposition pour tout éclaircissement ou réflexion d’intérêt commun. (cath.ch-apic/jcg/mp)

Maurice Page

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