Revue Choisir: les multiples visages de la nuit

Dans son premier numéro de l’année 2017, la revue culturelle jésuite Choisir décline la nuit sous différentes facettes, de la Bible à la poésie en passant par la science, le cinéma ou encore la psychanalyse. Aussi angoissante qu’elle puisse paraître à certains, « la nuit physique, symbolique et spirituelle » n’est pourtant qu’un « passage vers l’aube ».

Dans le sillage du mystique espagnol saint Jean de la Croix, la nuit vient à l’homme pour le libérer de ses servitudes. Elle a « partie liée avec l’invisible », écrit le théologien et essayiste Yvan Mudry. « Aussi angoissante et paralysante soit-elle, l’obscurité ne met pas fin à l’aventure intérieure (…) puisqu’elle est promesse d’aube ».

Mais la modernité veut s’y soustraire. « Avec ses luminaires, ses phares, ses vitrines illuminées, ses éclairages à laser, [elle] nous a délivrés de l’obscurité de ses tourments », selon Marie Romanens. Pour la psychanalyste, cependant, « le développement de l’âme passe par (…) un travail de transmutation qui s’effectue par la confrontation avec l’ombre et la dissolution de nos représentations ». « La lumière est toujours née des ténèbres », écrivait Carl G. Jung.

Selfies mortels

C’est également l’hypertrophie du moi qu’aborde la revue trimestrielle. On y découvre ainsi l’histoire récente du selfie, « né en même temps que Facebook », ainsi que l’origine du mot. Il « est apparu en 2002 au détour d’un échange de mails entre deux Australiens, repris par le site de média ABC Online« .

Le selfie devient un phénomène inquiétant lorsqu’il s’exacerbe dans l’hypernarcissisme. Pour décrocher des millions de J’aime sur Facebook, des jeunes « se sont mis à se photographier dans des situations extrêmes et dangereuses, écrit la journaliste Annick Chevillot. De janvier à septembre 2015, douze personnes sont mortes alors qu’elles prenaient un selfie » – les selfies tueraient donc davantage que les requins.

Les réseaux sociaux n’ont pas le monopole de « l’hypertrophie de l’égoïsme » pour autant. Elle gagne aussi le monde des journalistes, selon Daniel Cornu, médiateur romand du groupe de presse Tamedia. « La présence physique et le discours personnel, avatars médiatiques des selfies si souvent, semblent désormais destinés à occuper le premier rang, même dans des situations où rien ne les justifie ». (cath.ch/pp)


Revue Choisir N° 682, La traversée de nos nuits. Moi pour horizon, janvier-mars 2017

Pierre Pistoletti

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