A Hongkong, le prochain chef de l’exécutif pourrait bien être catholique

Le nouveau chef de l’exécutif de Hongkong sera élu dimanche 26 mars 2017 par le Comité électoral, composé de 1194 membres représentatifs de groupes d’intérêts en grande partie acquis à la Chine. Sur trois candidats en lice pour succéder à Chun-ying Leung, les deux favoris s’avèrent être de religion catholique.

A Hongkong, quelques 600’000 catholiques (soit 8 % des 7,2 millions d’habitants que compte la Région administrative spéciale) sont très actifs dans la vie locale, selon Eglise d’Asie (EDA), l’agence information des Missions Etrangères de Paris. Par leur engagement dans le secteur éducatif, dans le domaine de la santé et de l’aide sociale, ou bien encore leur réseau de paroisses, les Eglises chrétiennes en général font partie du paysage.

La liberté religieuse est garantie par la Loi fondamentale, le texte qui organise le fonctionnement des institutions depuis le retour du territoire sous le drapeau chinois, en 1997. Dans ce contexte, les habitants de Hongkong sont habitués à entendre leurs dirigeants politiques faire état de leur appartenance religieuse, voire même de leur relation personnelle à la croyance religieuse.

L’appel de Dieu

C’est le cas de l’ancienne directrice générale de l’administration de la Région administrative spéciale de Hongkong de 2012 à 2017, présentée comme la protégée de Pékin. Carrie Lam Cheng Yuet-ngor, âgée de 60 ans, est connue pour être une catholique pratiquante. Lorsque qu’elle a officialisé sa candidature à la succession du «très impopulaire» Chun-ying Leung en janvier dernier, elle a affirmé que le seul motif qui la poussait à se présenter était de répondre à un «appel de Dieu».

L’affirmation n’a pas soulevé de commentaires particuliers, ni dans la presse ni dans l’opinion publique. Ce sont plutôt certains milieux catholiques qui ont questionné la réalité de cet «appel». Ils s’interrogeaient ouvertement sur le fait de savoir si le «Dieu» de Carrie Lam n’était pas plutôt «Pékin», reprochant à la candidate d’utiliser le nom de Dieu à son propre avantage.

«La joie de l’Evangile»

Son principal adversaire, John Tsang Chun-wah, 65 ans, est également catholique. Ministre des Finances du territoire de 2007 à 2017, il fait aussi partie de l’establishment et des élites politiques de Hongkong. Mais contrairement à Carrie Lam, il n’est pas connu pour être un catholique pratiquant – une information que le diocèse de Hongkong a confirmée à la presse locale – bien que, comme sa rivale, il ait bénéficié d’une éducation chrétienne.

Scolarisé dans un établissement des Frères des écoles chrétiennes, il a servi comme enfant de chœur à la paroisse Saint-Francis, à Kowloon. Plus discret que Carrie Lam sur sa foi chrétienne, il a cependant récemment pris la parole à ce sujet. Répondant à la lettre ouverte d’un enseignant protestant lui demandant de préciser sa relation à Dieu et ses valeurs religieuses, John Tsang a répondu que la foi catholique occupait une grande place dans sa vie.

Il y cite La joie de l’Evangile, l’exhortation apostolique publiée en 2013 par le pape François, pour dire que l’engagement politique est «la forme la plus élevée de charité dans la mesure où il vise au bien commun». En réaction aux sentiments d’impuissance ressentis ces temps-ci par les Hongkongais, John Tsang répond en citant la réponse que le pape François a faite en 2015 à Manille à une jeune Philippine qui l’interrogeait sur la souffrance des enfants innocents.
«Le pape a dit: ‘C’est seulement quand nous pouvons pleurer avec ceux qui souffrent que nous nous approchons d’une réponse à cette question.’ Notre seule option est d’insister sur nos convictions et de faire ce que nous pensons être juste de faire. Je crois que la justice sociale peut à nouveau revenir à Hongkong pour créer une société rationnelle et harmonieuse», a expliqué le candidat.

Un scrutin incertain

A trois jours du scrutin, l’issue du vote est incertaine. Si Carrie Lam a reçu le plus grand nombre de parrainages (580 contre 180 pour l’ancien magistrat Woo Kwok-hing et 165 pour John Tsang), les sondages réalisés auprès de la population indiquent que John Tsang est le candidat le plus populaire (52,8 % des sondés se prononcent en sa faveur), face à Carrie Lam (32,1 %) et à Woo Kwok-hing (10,1 %). Menée à bulletin secret, l’élection au sein du Comité électoral peut réserver des surprises. Le camp démocrate, ne contrôlant qu’environ 300 des 1194 délégués, ne peut pas orchester de grands bouleversements.

Pour les démocrates comme pour l’Eglise catholique à Hongkong, ce scrutin ne peut masquer le fait que Pékin n’a rien cédé, en dépit des manifestations massives d’Occupy Central à l’automne 2014 et de la percée des «indépendantistes» aux élections législatives de septembre 2016, indique l’agence EDA. De même que la perspective d’une élection du chef du gouvernement au suffrage universel véritable est plus éloignée que jamais.

Anciens gouverneurs catholiques

Que le Comité électoral élise Carrie Lam ou John Tsang, le prochain chef du gouvernement sera donc un catholique, dimanche 26 mars. Sans compter le catholique Chris Patten, dernier gouverneur de Hongkong (1992-1997), la région, depuis son retour sous le drapeau chinois, a déjà été dirigée par un catholique: Donald Tsang Yam-kuen, chef de l’exécutif de 2005 à 2012.

Poursuivi pour des faits de corruption, Donald Tsang a été condamné le 22 février 2017 à vingt mois de prison ferme. Une peine qu’il purge actuellement, avec pour voisin de cellule son ancien numéro deux, Raffael Hui, un catholique lui aussi, condamné en 2014 à sept ans et demi de prison pour des faits de corruption. (cath.ch/eda/ra/gr)

Grégory Roth

Portail catholique suisse

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