Saint Maurice, sainte Vérène: ces martyrs chrétiens soudent l'Egypte et la Suisse

Les chrétiens sont connectés aux coptes. Le futur voyage du pape en Egypte à la fin avril 2017 le confirme. Mais aussi l’exemplaire relation des coptes avec le monastère Einsiedeln et la Fondation Verena à Zurzach. C’est ce qui a été relevé durant le débat «L’Egypte et le christianisme», le 27 mars 2017 à l’Université de Lucerne.

L’abbaye d’Einsiedeln est en relation spirituelle et amicale avec les coptes, a déclaré l’abbé Urban Federer durant l’événement. La relation spirituelle s’explique par la vénération des saints. Einsiedeln a saint Maurice pour premier saint patron, et Marie comme «patrone principale». Saint Maurice est arrivé en Suisse au premier siècle de notre ère avec la Légion venue de la région de Thébes – dans l’actuelle Egypte. La même route avait été parcourue par les saints Felix et Regula, patrons de la ville de Zurich. Leurs reliques sont gardées dans le monastère depuis le 10ème siècle.

«Nous sommes aussi unis par le monachisme», ajoute l’abbé de tradition bénédictine. Ce mode de vie a évolué dans le désert d’Egypte. De là, les moines ont émigré en Suisse et se sont installés dans les forêts. «Quand les coptes du 20e siècle sont revenus, ils ont principalement recherché le contact avec les monastères», a déclaré l’abbé Federer. Ceci en raison de leur forte tradition monastique.

Einsiedeln comme abri

Les prêtres coptes, qui étaient en visite en Suisse, devaient trouver un endroit pour vivre. Ils ont choisi le monastère d’Einsiedeln. Depuis le début des années 1980, ils y trouvent tant un hébergement qu’une connexion. «Les moines coptes qui vivaient avec nous, ont toujours fait partie de la chorale de prière», a déclaré Federer. L’abbé est même en contact avec l’unique prêtre copte local à ce jour, le Père Isidore El-Anba-Samuel. Ce prêtre rassemble des coptes de Suisse alémanique à l’église de Dietlikon, dans le canton de Zurich. Il visite Einsiedeln une fois par semaine.

Les coptes fréquentent moins les célébrations à Einsiedeln que à Zurzach, en Argovie, ou à Saint-Maurice, déclare Federer. Dans la crypte de la collégiale de Zurzach se trouve la tombe de sainte Vérène. Cette chrétienne des premiers siècles a également rompu avec la Légion thébaine, dans l’Egypte à l’Ouest. Elle avait passé par les gorges de Sainte-Vérène, près de Soleure, et plus tard à Zurzach.

«L’attraction Sainte-Vérène» de Zurzach

Père Isidore est en contact étroit avec Zurzach, par le biais de Verena Füllmann-Kuhn, présidente de la Fondation Saint-Vérène. Depuis 2007, il vient chaque année à la fête patronale de sainte Vérène, dit-elle, ajoutant avec enthousiasme: «il est un cadeau pour nous». Isidore El-Anba-Samuel sert aussi de médiateur avec les représentants de l’Eglise en Egypte. «Récemment, deux évêques coptes étaient en visite chez nous», déclare la présidente.

Si bien qu’en décembre 2013, le patriarche copte Tawadros II a visité Zurzach avec une délégation et s’est arrêté un instant sur la tombe de sainte Vérène. Il y a même eu quelques fois un transfert de reliques aux Égyptiens. «Pour nous, ces contacts amicaux avec les coptes se connectent aussi aux premiers temps du christianisme», a déclaré Verena Füllemann.

Nos «pères et mères perdus»

Grâce à cette relation, les coptes ont redécouvert leurs martyrs. «Les saints de la Légion thébaine étaient pour nous des étrangers au départ», explique Rafat Tadros, un copte établi à Herisau, en Appenzell. Pendant des siècles, les gens ne les connaissent pas. Il y a seulement quelques décennies que la relation avec nos «pères et mères perdus» s’est rétablie. «Et maintenant, les filles coptes s’appellent soudainement toutes Vérène», déclare-t-il, non sans rire.

«Et maintenant, les filles coptes s’appellent soudainement toutes Vérène»

«Nous aussi, nous avons redécouvert nos saints grâce aux coptes, ajoute l’abbé Urban Federer. Nous avons pris conscience de l’endroit où ces saints ont grandi essentiellement. Nous avons réalisé qu’ils ne sont pas d’origine suisse».

Selon Urban Federer, cette relation historique comporte également une signification actuelle. L’abbé d’Einsiedeln a rappelé le message du pape François, a propos d’une «fatigue du christianisme» en Europe. «C’est quand les gens sortent de la persécution, du martyre, qu’ils défendent leurs croyances, dit-il. Et c’est une chance pour notre Eglise locale. «Ce sont les gens qui nous donnent envie de vivre notre foi chrétienne.» Il a donc appelé à l’hospitalité généreuse. «Les églises catholiques vides doivent simplement être fournies aux communautés coptes et orthodoxes».


Toujours plus menacés dans leur pays d’origine

«En Egypte, les coptes se sentent de plus en plus menacés par des musulmans fanatiques, comme l’a exposé Walter Bühlmann dans son discours d’entrée. Il y a de plus en plus d’actes de violence à leur encontre». Ancien maître d’enseignement et recherche d’Ecriture Sainte et d’homilétique à l’Université de Lucerne, le prêtre de Sursee, dans le canton de Lucerne, a écrit un livre sur Vérène, au nom de la Fondation Sainte-Vérène de Zurzach, en traitant parallèlement de la situation des coptes.

Dans son analyse, le père Bühlmann qualifie les églises chrétiennes d’Egypte de «plus anciennes du monde». L’Eglise copte avait au 20e siècle «une force missionnaire se déroulant de l’intérieur», ce qui a conduit à un renouvellement importante, explique-t-il. Les églises sont pleines – et enfants, adolescents et adultes très actifs dans leurs paroisses.

Environ 400 familles coptes vivent actuellement Suisse, d’après Walter Bühlmann. L’émigration de nombreux coptes d’Egypte a commencé il y a environ 60 ans. Aujourd’hui, ils sont essentiellement localisés en Amérique du Nord, en Australie, au Royaume-Uni, en France, en Allemagne et en Suisse. (cath.ch/kath.ch/rpf/gr)

Grégory Roth

Portail catholique suisse

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