Boko Haram: affaibli mais loin d'être détruit

Malgré l’affaiblissement considérable de la secte islamiste Boko Haram, au nord du Nigeria, sa capacité de nuisance reste préoccupante. Tel est le constat du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), diffusé le 24 mai 2017.

Le gouvernement nigérian a assuré avoir vaincu l’insurrection de Boko Haram, qui avait prêté allégeance en 2015 au groupe djihadiste Etat islamique (EI). La prise en décembre 2016 de ‘Camp Zero’, dans la forêt de Sambisa, la dernière place forte des miliciens, est apparue comme le commencement de l’ère post-insurrection au nord-est du pays.

La libération négociée, en avril 2017, de 82 jeunes filles enlevées de Chibok (113 d’entre elles sont toujours retenues) a été présentée comme un signe supplémentaire que la rébellion surgie sept ans plus tôt était brisée.

Le gouvernement et les partenaires de développement ont déjà commencé les travaux de reconstruction d’après-guerre dans les Etats les plus affectés de Borno, Yobe et Adamawa. Si les conditions de vie demeurent précaires, les maisons et les écoles sont en train d’être reconstruites, des semences sont distribuées, et des programmes de récupération d’autonomie économique sont lancés.

Un réseau bien établi

Malgré tous ces facteurs d’optimisme, il est important de reconnaître que des motifs de préoccupation latents subsistent, note l’UNHCR. Même si ‘Camp Zero’ a été démantelé, le fait est que Boko Haram possède une importante capacité d’adaptation. Il est connu que le mouvement est en train de former de nouvelles zones de repli dans le bassin du Lac Tchad. Les miliciens sont également en train de se fondre au sein des communautés locales.

Le réseau de Boko Haram est en outre beaucoup plus profondément établi que ce que l’on pense communément. Les services de sécurité nigérians dénichent régulièrement des insurgés dissimulés dans tout le nord du Nigeria.

Les attentats continuent

Plus inquiétant: 12 attentats suicides ont été commis dans les derniers mois, ce qui suggère que le mouvement est loin d’être neutralisé.

Mais depuis que la secte s’est divisée en deux factions, en août dernier- celle d’Abubakar Shekau et celle d’Abu Musab al-Barnawi-, il s’est produit un changement de tactique. Le groupe d’al-Barnawi a critiqué l’option de Shekau de viser des cibles civiles. Le premier groupe s’attaque plus spécifiquement aux militaires. Depuis novembre dernier, 11 postes de l’armée ont été pris d’assaut et 40 soldats tués. De l’armement a été saisi ainsi que des véhicules légers, notamment des motocyclettes. Cela signifie qu’une partie des rebelles est mobile et bien armée. Même si la faction d’al-Barnawi tente effectivement de ne pas tuer les civils, elle n’hésite cependant pas à piller les villages.

L’incapacité du gouvernement à tarir complètement les sources de financement des islamistes constitue toujours un problème. Boko Haram a ainsi toujours les moyens de mener des actions violentes.

Les troupes de sécurité se heurtent aussi parfois au refus de coopération des populations locales. L’idéologie de Boko Haram selon laquelle l’occidentalisation est mauvaise rencontre une certaine approbation dans les milieux ruraux très conservateurs, souligne le UNHCR. (cath.ch/com/rz)

 

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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