Entre août et septembre 1942, près de quatre mille juifs installés en Belgique avaient été arrêtés puis déportés vers les camps de concentration. L’association pour la Mémoire de la Shoah a organisé une commémoration dans le quartier des Marolles, à Bruxelles. Dans ce quartier populaire de la capitale belge, où de nombreuses familles juives n’ayant pas la nationalité belge étaient installées, 718 personnes avaient été arrêtées la nuit du 3 au 4 septembre 1942 pour être déportées vers Auschwitz.
Dans son allocution, l’archevêque de Malines-Bruxelles a évoqué le « prosélytisme malsain des baptêmes à tour de bras », célébrés dans l’Église à l’époque. Des conversions souvent dues « aux demandes des parents qui pensaient protéger leurs enfants ». « Nous voudrions demander pardon pour ce qui s’est apparenté, dans un certain nombre de cas, au viol de conscience et à l’abus de faiblesse », a regretté le cardinal De Kesel. « Cette première reconnaissance officielle par le plus haut dignitaire de la religion catholique en Belgique était importante », estime Michel Lussan, membre de l’association pour la Mémoire de la Shoah .
Le cardinal a cependant aussi rappelé que de nombreux enfants juifs ont été cachés dans des institutions chrétiennes: « Au milieu de cet enfer, des réseaux de solidarité vont permettre à des enfants, des ‘ketjes’ juifs, d’échapper à la déportation. Dans la tourmente, des parents confieront aussi de façon privée leurs enfants à des personnes non juives. Certaines paieront de leur vie leurs actes de courage. (…) D’autres laisseront leurs enfants à des institutions catholiques, comme ce couvent de Bruxelles-Anderlecht qui abritera pour un certain temps des fillettes. Nombre de prêtres vont se lancer aussi dans des actions de sauvetage, parfois au péril de leur vie. »
« Septante-cinq ans après, nous osons commencer à regarder, à penser les conséquences dramatiques de la Shoah et entreprendre un travail de mémoire vraie, c’est-à-dire qui se refuse aux justifications, aux minimisations et aux explications déresponsabilisantes. Nous devons nous interroger sur l’ampleur du mal qui ronge notre culture, cette culture qui a permis la Shoah, qui l’a laissé se produire et même qui l’a préparée », a poursuivi le cardinal.
L’archevêque n’a pas manqué d’évoquer l’actualité de la migration: « Ouvrons l’espace en agrandissant notre regard vers les autres, ceux qu’aucun statut social ne protège ou n’assure. Je pense ici tout spécialement aux réfugiés, ceux que leur différence risque à tout moment de désigner au rôle de victime émissaire. Le fait qu’en 1940, plus de 90% des juifs en Belgique étaient soit des migrants, principalement originaires d’Europe de l’Est, soit des réfugiés venus d’Allemagne, doit nous faire réfléchir pour relire autrement l’actualité. »
L’archevêque a insisté sur l’importance historique de ce travail de mémoire : « Se souvenir, refuser d’oublier, éviter la banalisation et la négation de l’histoire, lutter contre l’érosion du temps, c’est donner à tous une chance supplémentaire que cela ne se reproduise plus à l’avenir « , a-t-il affirmé. (cath.ch/cathobel/cx/mp)
Maurice Page
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