Algérie: Mgr Claverie et ses 18 compagnons martyrs bientôt béatifiés

Mgr Paul Desfarges, archevêque catholique d’Alger, affirme le 15 octobre 2017 dans les colonnes du quotidien algérien francophone Reporters que les 19 catholiques assassinés par les terroristes islamiques dans les années 1990 en Algérie pourraient être bientôt béatifiés.

Le prélat jésuite, né en 1944 à Saint-Etienne, était depuis 2008 évêque de Constantine, avant d’être nommé archevêque d’Alger le 24 décembre 2016. Il a été reçu par le pape François le 1er septembre dernier, en compagnie de Mgr Jean Paul Vesco, évêque d’Oran. Les deux évêques étaient accompagnés du Père Thomas Georgeon, postulateur de la cause de béatification de Mgr Pierre Claverie, évêque d’Oran, assassiné le 1er août 1996, et des 18 autres religieux et religieuses catholiques assassinés en Algérie dans les années 1990 par les groupes terroristes.

L’Eglise d’Algérie ciblée par le GIA

Au cours de la rencontre, le pape François s’était montré très sensible à la signification du sacrifice de l’ancien évêque d’Oran, tué dans l’explosion d’une bombe déposée devant son évêché, et de ses 18 compagnons, dont les sept moines de Tibhirine. L’Eglise d’Algérie avait alors été frappée de plein fouet par les violences du GIA (Groupe Islamique Armé).

L’archevêque d’Alger a confié à Reporters que la béatification de Mgr Pierre Claverie et ses 18 compagnons pourrait être déclarée dans les mois qui viennent. «Le Saint-Père s’est montré très attentif à la cause de ces frères et de ces sœurs qui seront béatifiés», a déclaré Mgr Desfarges, car il est «sensible à la souffrance, d’abord, du peuple algérien». Mais le pape n’a cependant pas encore signé officiellement le décret de béatification, a-t-il précisé.

Il faut penser à tous les martyrs d’Algérie

«Nos 19 frères et sœurs qui ont été assassinés l’ont été au milieu d’un peuple encore meurtri et dont les plaies ne sont pas encore tout à fait cicatrisées. Nous avons bien conscience qu’ils ne sont qu’une toute petite goutte dans un océan de violence qui a vraiment meurtri l’Algérie pendant une dizaine d’années, et nous ne pouvions pas penser à nos martyrs sans penser à tous les martyrs d’Algérie», assure l’archevêque d’Alger.

Une centaine d’imams assassinés par les terroristes

Mgr Paul Desfarges a rappelé au pape François le sort de la centaine d’imams qui sont morts pour avoir refusé de signer ou de cautionner des fatwas justifiant la violence. «Je pense aussi, a-t-il poursuivi, aux intellectuels, aux journalistes, aux écrivains… mais surtout à ces petites gens, des hommes, des femmes, des papas et des mamans qui refusaient d’obéir aux ordres des groupes armés. Nous avons alors voulu dire au Saint-Père que cette béatification, nous souhaitions que, lors de son annonce, elle soit une source de paix, de paix pour tous!»

Le pape François, relève Mgr Desfarges, a été très sensible à tout cela. «Il nous a écoutés avec beaucoup d’attention et nous a dit combien était vraie la souffrance que le peuple algérien a endurée il y a vingt ans et a dit comprendre que les plaies ne soient pas encore refermées. Ainsi il nous a dit: ‘Soyez très délicats, car il ne faut pas blesser; il faut que l’évocation de ce souvenir soit une occasion de se tourner vers l’avenir. Nous désirons le vivre ainsi'».

Après Charles de Foucauld

C’est la deuxième fois, dans l’histoire contemporaine de l’Eglise catholique algérienne, qu’un religieux est béatifié. La première fois, ce fut le frère Charles de Foucauld, en 2005, par le pape Benoît XVI. Seulement, cette fois-ci, la béatification, après être présentée à la signature du pape, pourrait avoir lieu sur le sol algérien, plus précisément à Oran, note Reporters. Et Mgr Desfarges de rappeler que l’Eglise locale, aux premiers siècles du christianisme, a eu ses martyrs à Hippone, Madaure et Lambèse.

L’archevêque d’Alger souhaiterait que la cérémonie de béatification ait lieu à Oran «avec l’accord des autorités», parce que la cause de béatification s’appellera la «Cause du martyr de Monseigneur Pierre Claverie et de ses dix-huit compagnons et compagnes martyrs».

Le jeune Mohamed assassiné avec Mgr Claverie

En effet, Mgr Pierre Claverie est justement mort à Oran, assassiné en même temps qu’un jeune Algérien, Mohamed. Ce dernier avait lui-même écrit dans un petit carnet qu’il acceptait de risquer sa vie en gardant sa relation d’amitié avec cet évêque.

«Mgr Pierre Claverie avait déclaré que ‘rien que pour un jeune comme Mohamed, je suis prêt à rester’. C’est là un beau signe que nos martyrs sont morts avec des frères et des sœurs au milieu d’un peuple meurtri, un peuple aussi de martyrs, d’hommes et de femmes qui ont perdu leur vie en voulant rester fidèles à Dieu et à leur conscience», conclut Mgr Desfarges, pour qui le sang de tous les martyrs est mêlé. (cath.ch/imedia/reporters/be)

 

 

 

Jacques Berset

Portail catholique suisse

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