Evangile de dimanche: coup de trompette!

Pourquoi les qualifier de sottes ou de folles ces cinq jeunes filles, honorables et fréquentables, qui ont «oublié» de recharger leur lampe à huile? Oubli coupable, dites vous? Restons calmes. Comme leurs compagnes «avisées», elles savaient qu’elles étaient invitées à la noce et même que l’époux fantasque pouvait se faire désirer. Parées pour le recevoir, elles ne pouvaient donc prévoir l’heure exacte de son arrivée. Elles estimaient sans doute disposer d’assez de temps pour se procurer un flacon d’huile. Mais le voilà qui arrive, tambour battant, sans prévenir! Au moment où personne ne s’y attend. Seules les demoiselles d’honneur aux lampes allumées courent à sa rencontre. Et les portes se referment impitoyablement sur leurs compagnes désolées et éplorées.

Cette histoire, invraisemblable dans sa littéralité, devait être souvent contée dans les communautés chrétiennes du premier siècle, alors que l’on vivait encore intensément de la foi au proche retour du Christ. Mais plusieurs passages du Nouveau Testament attestent que le retard pris par cet événement avait fini par attiédir cette ferveur primitive. Certains chrétiens s’étaient mis à vivre comme si le Christ ne devait plus jamais revenir et qu’il fallait désormais construire son royaume sans lui. La parabole qui met en scène ces dix jeunes filles avait mission de leur dire qu’il n’en était rien. Et de leur rappeler que «pour le Seigneur un seul jour est comme mille ans et que mille ans sont comme un seul jour». Qu’ils ne se laissent donc pas perturber ni abuser par ce prétendu retard!

C’est alors que cette parabole trouve une pertinence et une résonance modernes et même contemporaines. Soyons francs, chers frères et sœurs! Attendons-nous vraiment le retour du Christ pour les jours à venir? N’avons-nous pas appris nous aussi à nous  passer de sa présence, à nous organiser sans lui? Et même, de passer notre existence comme si Dieu lui-même n’existait pas? »Etsi Deus non daretur», un mode de vie que le philosophe Hugo Grotius (1583-1645) proposait déjà à ses contemporains européens. Autrement dit, notre foi au Christ et en Dieu peur devenir formelle et  théorique, sans conséquences concrètes ni pratiques. En faisons-nous référence sur le terrain, là où nous nous affairons et nous agitons? Pas plus qu’une révérence conventionnelle quand il nous arrive le dimanche de «réciter», plutôt que vivre, notre Credo traditionnel.

Et bien, sur la terre endormie de ma foi superficielle, je perçois cette parabole comme un coup de trompette. Ou, mieux encore, comme un coup de pied dans ma tranquille fourmilière. J’entends une voix qui me réveille: «Voici l’époux qui vient. Allez à sa rencontre!» Je prends alors conscience que Dieu n’est pas une construction mentale et que le Christ est davantage qu’un élément folklorique de mon inconscient collectif. Je suis là devant lui qui m’appelle par mon nom. Pourquoi attendrai-je demain pour lui répondre? C’est aujourd’hui que Jésus veut entrer dans ma maison. Debout! Il est temps.

Fr.Guy Musy op | 10 novembre 2017

PS

Depuis trois ans  –  un cycle liturgique –  je fais paraître chaque mois sur ce site un commentaire d’évangile. Le temps est venu de prêter ma plume à de plus jeunes amoureux de la Parole. Merci à vous toutes et tous, chers internautes, de m’avoir permis cet échange.


Mt 25, 1-13

En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples cette parabole :
« Le royaume des Cieux sera comparable
à dix jeunes filles invitées à des noces,
qui prirent leur lampe
pour sortir à la rencontre de l’époux.
Cinq d’entre elles étaient insouciantes,
et cinq étaient prévoyantes :
les insouciantes avaient pris leur lampe sans emporter d’huile,
tandis que les prévoyantes avaient pris, avec leurs lampes,
des flacons d’huile.
Comme l’époux tardait,
elles s’assoupirent toutes et s’endormirent.
Au milieu de la nuit, il y eut un cri :
›Voici l’époux ! Sortez à sa rencontre.’
Alors toutes ces jeunes filles se réveillèrent
et se mirent à préparer leur lampe.
Les insouciantes demandèrent aux prévoyantes :
›Donnez-nous de votre huile,
car nos lampes s’éteignent.’
Les prévoyantes leur répondirent :
›Jamais cela ne suffira pour nous et pour vous,
allez plutôt chez les marchands vous en acheter.’
Pendant qu’elles allaient en acheter,
l’époux arriva.
Celles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle des noces,
et la porte fut fermée.
Plus tard, les autres jeunes filles arrivèrent à leur tour et dirent :
›Seigneur, Seigneur, ouvre-nous !’
Il leur répondit :
›Amen, je vous le dis :
je ne vous connais pas.’

Veillez donc,
car vous ne savez ni le jour ni l’heure. »

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